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Girolamo Frescobaldi, le prince de Ferrare, fête ses 440 ans

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en 1583, à l'époque charnière de la fin de la Renaissance, apparait comme l'un des plus grands maitres du clavier en Europe à l'orée du baroque, marqué intensément par le premier tiers du XVII siècle. Sa renommée dépassera la péninsule italienne et il deviendra le maitre de nombreux claviéristes tels Froberger, Tunder, Kerll, un savoir qui s'entendra jusqu'à Johann Sebastian Bach.

Sa naissance à Ferrare en 1583 et ses premières années de musicien

vient au monde le 13 septembre. Très tôt il découvre la musique auprès de Luzzasco Luzzaschi, célèbre compositeur représentant la fin de la Renaissance à qui l'on doit notamment des Madrigaux pour 1, 2 et 3 voix féminines connus sous le nom de Concerto delle dame di Ferrara. Vers l'âge de vingt ans, Frescobaldi se rend à Rome une première fois, puis à Bruxelles pour présenter et éditer sa première œuvre constituant un Livre de Madrigaux à 5 voix. Ce voyage jusque dans les Flandres lui a sans doute permis de rencontrer Jan Pieterzoon Sweelinck, surnommé « l'Orphée d'Amsterdam », autre immense musicien et disait-on faiseur d'organistes.

Sa vie à Rome au service du pape

Revenu à Rome après son voyage dans les Flandres, prend, à 25 ans, ses fonctions à la Basilique Saint-Pierre en octobre 1608 auprès du pape Urbain XVIII. Il joue également dans la cathédrale Saint-Jean de Latran, résidence de l'évêque de Rome (le pape) qui possède un orgue monumental de 24 pieds en montre construit par le facteur Luca Biagi en 1599. Cela ne l'empêche pas d'effectuer quelques séjours importants, chez les Gonzagues à Mantoue et auprès du duc de Toscane, Ferdinando II ainsi que les Medicis à Florence. Vers 1610 il rencontre Claudio Monteverdi à Mantoue et envisage un temps de s'y installer mais garde son poste d'organiste du pape à Rome. A nouveau il est attiré ailleurs et notamment à Florence en 1621 auprès de Ferdinand II de Médicis pour lequel il dédie un livre de Canzone. Finalement il revient une nouvelle fois à Rome où sa renommée est devenue internationale. C'est l'époque où il publie ses plus grands recueils, les Fiori musicali et les Livres de Toccate pour clavier. Frescobaldi demeure désormais définitivement à Rome, organiste officiel du Pape jusqu'à sa mort. On sait peu de choses sur ses dernières années, il meurt emporté par une fièvre en 1643, il est enterré dans la Basilique des Saints-Apôtres.

L'œuvre d'un génie du clavier

L'œuvre musicale de Frescobaldi se distingue par un style très personnel, reconnaissable par ses capacités exceptionnelles de mélodiste évoquant souvent l'improvisation. Son discours se caractérise par le chromatisme et la dissonance, la modulation et les ruptures rythmiques. Il excelle dans le contrepoint et reste l'un des pères de la fugue classique. Essentiellement célèbre pour ses œuvres pour clavier, Frescobaldi laisse également divers recueils destiné au chant (Arie musicali, Madrigali, Motets et Messes).

Les recueils de compositions destinés au clavier se répartissent en sept Livres écrits entre 1608 et 1645, le dernier étant posthume. On y trouve les principales formes musicales de ce temps destinées au clavier soit pour une utilisation de type profane : Toccate, Canzoni, Balletti, Ciaconne, Passacagli, Ricercari, Capricci… ainsi que des Danses et Fantaisies, ou de type sacrée : Hymnes, Magnificat, Messes. Le clavecin est l'instrument idéal pour traduire ces textes notamment pour les œuvres à caractère profane. Parfois l'orgue est préférable pour des pièces où l'évocation liturgique est évidente : Toccate per l'Elevazione, Messes et Magnificat. De plus on remarque dans sa production l'existence de deux autres Livres de Canzoni pour ensemble d'instruments.

Son ouvrage le plus célèbre reste les Fiori Musicali (Fleurs musicales) datant de 1635 et comprenant trois Messes et pièces diverses. Cette œuvre majeure se situe dans ces années fastes du premier tiers du XVIIᵉ siècle qui a vu naitre les plus grands livres d'orgue en Europe. En effet cette époque charnière engendre un nouveau langage. En Allemagne Samuel Scheidt publie sa Tabulatura nova, Jehan Titelouze en France compose ses Hymnes et Magnificat, Francisco Correa de Arauxo édite à Alcalà de Henares sa Facultad organica. Autant de musiques savantes d'esprits supérieurs qui scellent une apogée dans l'écriture pour le clavier au début de la période dite baroque.

L'apport de la musique de Frescobaldi pour toutes les générations suivantes

De son vivant Frescobaldi instruit de nombreux élèves dont plusieurs allemands : Franz Tunder, Johann Caspar Kerll et le plus célèbre d'entre eux, Johann Jakob Froberger (1616-1667). Il se rend à Rome auprès de Frescobaldi en 1637 pour travailler durant plus de trois années. A l'instar de son maitre il compose dans les mêmes formes musicales qui en font le plus prestigieux successeur de Frescobaldi et l'un des plus grands maitres du clavier en Allemagne avant Johann Sebastian Bach. Ce dernier se procure un exemplaire en 1713 et s'en inspirera pour plusieurs de ses propres œuvres : Fugue, Canzone… D'autres compositeurs ont bénéficié de son influence dont Dietrich Buxtehude et toute l'école de l'Allemagne du Nord, d'où leur surnom de « Méridionaux du nord » portés par le fameux Stylus phantasticus. Le rayonnement de l'organiste papal ne faiblit pas au cours du temps et se verra ravivé avec le retour au baroque, initié dès les années 1950. Aujourd'hui, Frescobaldi occupe une place de tout premier rang pour les claviéristes, tant au niveau de l'étude du clavier que pour sa place au concert et dans une discographie des plus abondante.

Crédit photographiques : Orgue de Saint-Jean de Latran © Frédéric Muñoz

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