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Paris. Opéra de Paris, Opéra Bastille. 16-IX-2023. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Don Giovanni, dramma giocoso en deux actes sur un livret de Lorenzo Da Ponte. Mise en scène : Claus Guth. Assistante mise en scène : Caroline Staunton. Décors & Costumes : Christian Schmidt. Lumières : Olaf Winter. Chorégraphie : Ramses Sigl. Dramaturgie : Ronny Dietrich. Avec : Kyle Ketelsen, Don Giovanni ; Julia Kleiter, Donna Anna ; Cyrille Dubois, Don Ottavio ; John Relyea, Il Commendatore ; Tara Erraught, Donna Elvira ; Bogdan Taloş, Leporello ; Guilhem Worms, Masetto ; Marine Chagnon, Zerlina. Chœurs de l’Opéra de Paris (chef des chœurs : Alessandro Di Stefano). Orchestre national de l’Opéra de Paris, direction musicale : Giancarlo Rizzi
Apparue en 2008 à Salzbourg, la mise en scène de Claus Guth pour Don Giovanni de Mozart intègre l'Opéra de Paris, avec deux distributions, la seconde portée par Kyle Ketelsen dans le rôle-titre.
Créée il y a quinze ans au Festival de Salzbourg dans le cadre d'un projet sur la Trilogie Mozart-Da Ponte avec Claus Guth, la production de Don Giovanni présentée deux ans après celle des Noces et un an avant Cosí est depuis considérée comme l'un des spectacles référents du metteur en scène, son meilleur selon ses dires. Reprise en 2010, puis pour la trilogie complète en 2011, elle avait ensuite été récupérée par le Staatsoper Berlin en 2013, avant d'être proposée en 2014 à La Scala.
Toutes les bonnes choses ayant une fin, cette mise en scène commençait à s'essouffler lors de ses dernières reprises berlinoises, de même que celle de Haneke à Bastille accusait de nombreuses faiblesses pour ses dernières apparitions, remplacée depuis 2019 par une nouvelle proposition trop classique d'Ivo van Hove. C'est donc avec un désir de renouveau, mais sans prendre de risque, qu'Alexandre Neef intègre ce spectacle à sa nouvelle saison parisienne, revivifié grâce à l'assistance de Caroline Staunton et à une dramaturgie à nouveau au cordeau de Ronny Dietrich. Donnée avec deux distributions pendant presque un mois, la production affiche en cast A le chanteur le plus marquant de celle de Haneke, Peter Mattei (d'après les échos de la première encore plus sombre qu'auparavant), auquel nous avons préféré la découverte de Kyle Ketelsen dans le rôle-titre du cast B.
Dynamique scéniquement, le baryton-basse américain est aussi agile vocalement, notamment dans ses airs, où il peut devenir sensible pour la Canzonetta, puis très souple avec Meta di voi qua vadano. D'une couleur très différentiée (là où certaines distributions cherchent au contraire la similarité), Leporello trouve avec Bogdan Taloş un artiste concerné, drôle dans le duo avec Donna Elvira et bien en voix dès le catalogue des exploits de son maître en début d'opéra. John Relyea manque de volume en Commandeur à sa réapparition en fond de scène, mais conclut bien l'ouvrage, achevé en forme de boucle sur la mort de Don Giovanni, donc sans le finale de Prague.
Dans cette sombre forêt d'épineux où l'on cherche des femmes, on retrouve avec brio l'atmosphère ténébreuse créée par Claus Guth sous les lumières d'Olaf Winter. Illustré par la mort du héros en début d'opéra, le propos se veut ensuite un flash-back sur ses dernières heures, et sur-utilise, comme dans tous les spectacles du metteur en scène à l'époque, un plateau tournant d'une grande efficacité. Au cours de ses nombreuses rotations, Don Giovanni tombe aussi souvent sur les amants que sur d'éventuelles conquêtes, batailleur face au Masetto de Guilhem Worms et rapidement apeuré devant le Don Ottavio de Cyrille Dubois, d'une voix moins colorée sur la grande scène parisienne que dans d'autres salles plus propices, mais bien défini dans les ensembles et très applaudi pour son air Dalla sua pace. Des femmes, on préfère la pétillante Zerlina et le charme des arias portées par Marine Chagnon, à la Donna Elvira un peu courte en souplesse comme en souffle de Tara Erraught. Quant à Donna Anna, Julia Kleiter s'y démarque aujourd'hui plus par sa superbe prestation scénique que par son chant, loin du souvenir de Dorothea Röschmann les cinq premières années de la production en terres germaniques.
Jamais couverts, le plateau comme les chœurs (bien préparés pour le chant par Alessandro di Stefano et pour la chorégraphie par Ramses Sigl) se voient souvent livrés à eux-mêmes, tant l'Orchestre de l'Opéra de Paris paraît transparent. Très énergique dans ses gestes pour sa première apparition à Bastille, le jeune chef Giancarlo Rizzi semble se démener pendant les trois heures de représentation, sans jamais parvenir à donner ni volume ni présence à une formation symphonique atone, d'une fadeur rare dès l'Ouverture. Tout juste un peu plus audible dans les finales, l'ensemble parisien se montre ici bien loin des prestations des Wiener Philharmoniker et de la Staatskapelle Berlin auparavant en fosse pour cette production.
Crédits photographiques : © Bernd Uhlig / Opéra de Paris
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