Hélène Cao brosse le portrait d’Augusta Holmès à partir de la presse de son temps

Cette belle biographie très documentée d'Hélène Cao, s'appuyant sur des articles de l'époque, apporte un heureux éclairage sur la musicienne Augusta Holmès.

Longtemps citée uniquement comme élève et proche de César Franck, Augusta Holmès fut pourtant aussi une compositrice à succès à qui l'on doit de vastes partitions défendues à leur époque par Colonne, Lamoureux et Pasdeloup. Oubliée dès sa mort prématurée, elle revient aujourd'hui grâce à quelques disques.

Augusta Holmès fut l'une des figures de la vie musicale parisienne des premières années de la Troisième République. D'abord pianiste virtuose, elle se fit vite connaître comme compositrice et poétesse (« je compose la musique le jour, et mes poèmes pendant la nuit »).

Hélène Cao lui rend hommage en partant des nombreux articles de presse qui lui furent consacrés de son vivant. On y lit les attaques parfois féroces de plumitifs oubliés, comme la haute estime que lui témoignèrent Saint-Saëns ou Franck qui lui a dédié son troisième choral. On y découvre aussi l'ascension de la musicienne culminant dans de vastes symphonies dramatiques comme les Argonautes, Lutèce ou Ludus pro Patria, la reconnaissance officielle venue avec son Triomphe de la République, grande ode d'une démesure toute berliozienne commandée pour l'exposition universelle de 1889, puis la chute brutale avec l'échec de son unique opéra La montagne noire créé en 1895. La fin prématurée et triste d'Augusta Holmès, morte à 56 ans, sera suivie d'un oubli presque immédiat.

L'angle d'attaque d'Hélène Cao, outre qu'il permet de se délecter du style souvent savoureux des critiques de l'époque, offre aussi une passionnante plongée dans la production la plus académique de ce temps, les intrigues et les jalousies des concours officiels à la recherche de commande, art dans lequel Augusta Holmès a manifestement excellé. On y découvre aussi la personnalité d'une artiste hors convention (elle eut cinq enfants de sa liaison avec Catulle Mendès, lequel était marié par ailleurs, et fit ensuite adopter ses enfants par son propre père après leur rupture) ; la description par Octave Mirbeau d'une visite au domicile des deux amants, au milieu de couples en pleine action, ne manque pas de piquant (« c'était une orgie romaine »).

Une bibliographie soignée vient enrichir ce précieux ouvrage, mais on regrette l'absence d'une discographie d'autant que récemment de nombreux enregistrements notamment des pages symphoniques sont venus documenter l'art de la musicienne, ce dont les critiques de l'époque partagées entre wagnérolâtres et anti-wagnériens ne rendent que partiellement compte. De quoi donner envie d'en découvrir davantage d'une musicienne qu'on ne saurait réduire à un douceâtre cantique de Noël chanté par Tino Rossi.

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