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Bataclan, l’histoire d’une salle de spectacles

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Bataclan – Histoire d’une salle. Daniel Habrekorn. Editions Robert Laffont. 336 pages. 45 €. Décembre 2022

 
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Marquée par les attentats meurtriers du 13 novembre 2015, la salle de spectacles parisienne n’a pas renoncé à poursuivre son activité, fruit d’une histoire mouvementée et passionnante remontant à Offenbach à la fin du XIXe siècle.

Petit-fils d’un des principaux directeurs de la salle, Daniel Habrekorn, l’auteur de cet ouvrage, a vécu dans les lieux ces vingt dernières années.

Le livre d’un format agréable attire tout d’abord par son design pimpant, sa tranche jaune citron et sa couverture bleu vif montrant le bâtiment dans toute sa splendeur, d’après une gravure de 1865. Nous le savons tous, la salle a connu les heures les plus tragiques qui soient, mais cette présentation attirante, nous invite à découvrir aussi toutes celles, festives et joyeuses qui ont jalonné son parcours. Car le Bataclan a été voulu comme un lieu de divertissement. D’où le choix de cette architecture de pagode à la façon des chinoiseries en vogue à la fin de cette deuxième moitié du XIXe siècle. C’est à cette époque que Napoléon III et le préfet Haussmann décident de recouvrir le canal Saint-Martin sur 1500 mètres, entre le faubourg du Temple et la Bastille. Cette portion deviendra le boulevard Richard Lenoir. C’est à l’intersection avec le boulevard du Prince Eugène (futur boulevard Voltaire), dans un quartier populaire mais en voie d’urbanisation et de modernisation, qu’une parcelle est louée à condition d’y établir un établissement de café à billards, spectacles et concerts. Le bâtiment avec sa façade richement ouvragée est l’œuvre de l’architecte renommé Charles Duval. Il est construit en dix mois (1864-1865).

Son nom, Ba-Ta-Clan, est emprunté à celui de l’opérette éponyme loufoque d’Offenbach et d’Halévy créée en 1855 pour l’ouverture des Bouffes parisiens (théâtre qui était situé passage Choiseul). Le titre faisait référence au bataclan, nom commun, sorte d’onomatopée imitant le bruit d’objets hétéroclites. C’est par l’air du bataclan que se termine l’opérette qui connut un grand succès à cette époque. L’œuvre sera donnée au Bataclan bien après : en 1980 !

L’inauguration de la salle a lieu le 4 février 1865 avec numéros d’acrobates, magnétiseurs, ballets et douze chanteurs lyriques qui interprètent entre autres des airs de L’Africaine de Meyerbeer et de La Favorite de Donizetti. Certains après-midi les badauds peuvent venir aussi pour admirer le palais et sa décoration opulente. Le rideau de scène est alors signé Eugène Carpezat, futur décorateur à l’Opéra de Paris et à l’Opéra Comique. Dès 1866 c’est la faillite, en cause les coûts exorbitants et une épidémie de choléra ! C’est ensuite au tour du « Père Paris » de reprendre l’affaire et d’y introduire les comédies, vaudeville et variétés. Puis à partir de 1883 les directions successives y apportent l’opérette ou de nouveaux aménagements. Même Buffalo Bill s’y produira !

En 1905, la salle devient la propriété de Gaston Habrekorn qui ne manque pas d’ambition « je veux faire de ce bel établissement le premier Théâtre-Concert de Paris (…) j’y ferai défiler tout ce qui a un nom… » proclame-t-il à l’occasion de la réouverture qui fait entendre La chanson de Fortunio d’Offenbach. Sont proposés à cette époque de véritables tableaux vivants s’inspirant de scènes mythologiques, souvent dénudés comme le montrent les photos reproduites. Cette époque faste verra ensuite Colette et Musidora s’y produire.

Du music hall la salle devient ensuite un cinéma à partir de 1932, mais un incendie la ravage en 1933. Ce n’est qu’en 1952 que, réhabilité, le lieu voit revenir le spectacle vivant. Autre étape majeure plus proche de nous, la rénovation de la salle dans les années 90 par Daniel Habrekorn qui reprend la gérance. Jusqu’en 2005 de grands travaux sont entrepris, y compris dans les moindres détails décoratifs, pour redonner le lustre et les couleurs chatoyantes d’antan.

Le chapitre consacré à l’attentat du 13 novembre 2015 s’attache à revenir de façon détaillée sur la chronologie des événements et sur la polémique concernant les condition de l’intervention des forces de l’ordre. Après de gros travaux de rénovation faisant suite à cette tragédie, c’est un Bataclan quasiment neuf qui a rouvert le 12 novembre 2016. L’ouvrage décrit différents épisodes ou affaires qui s’en sont suivies dont celle des fausses victimes de l’attentat (une vingtaine) ou en 2018 le vol d’une œuvre de Banksy en hommage aux victimes, imprimée sur la porte d’une issue de secours, puis retrouvée, avant d’aborder le procès des attentats.

Avec une très riche iconographie et une foule d’informations et de reproductions de documents rares en tous genres : photos, plans, affiches, gravures, billets etc., le lecteur dispose d’un panorama complet et particulièrement bien illustré de l’histoire de la salle, de l’engouement qu’elle a suscitée et du drame qu’elle a vécue. Les annexes vont même jusqu’à donner la programmation complète sous chaque direction !

Un livre précieux et émouvant sur une salle qui nous tient à cœur.

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