Le Young Conductors Award du Festival de Salzbourg, trois chefs pour un prix
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Salzbourg. Mozarteum. Young Conductors Award, concerts de la finale. Camerata Salzburg.
4-VIII-2023. Zoltán Kodály : Danses de Galánta ; Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Récitatif et air Misero! O sogno – Aura, che intorno spiri KV 431 ; Alfred Schnittke : Polyphonischer Tango ; Franz Schubert (1797-1828) : Symphonie n° 3 D 200. Anthony León, ténor ; Tobias Wögerer, direction.
5-VIII-2023. Olga Podgaskaya (née en 1981) : Epitaph ; Wolfgang Amadeus Mozart : Air Vado, ma dove?, KV 583 ; Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Symphonie n° 2, op. 36 ; Valentin Silvestrov (né en 1937) : Stille Musik. Daria Kolisan, soprano ; Vitali Alekseenok, direction.
6-VIII-2023 Gioachino Rossini (1792-1868) : Il Barbiere di Siviglia, ouverture ; Wolfgang Amadeus Mozart : Air Ah se in ciel, KV 538 ; Donghoon Shin (né en 1983) : Of Rats and Men ; Felix Mendelssohn Bartholdy (1809-1847) : Symphonie n° 3. Lilit Davtyan, soprano ; direction : Hankyeol Yoon.
Aux côtés de Tobias Wögerer et Vitali Alekseenok, le vainqueur Hankyeol Yoon s'impose parmi plusieurs centaines de candidats, suscitant un enthousiasme limité.
Après quelques années de turbulence, le concours de jeunes chefs d'orchestre du festival de Salzbourg reprend avec une formule inchangée – nous en avions rendu compte lors de l'édition précédente, en 2021. Trois jeunes chefs donc, à nouveau tous les trois masculins, pour trois concerts d'une heure avec la Camerata Salzburg, et un programme qui impose, à côté d'œuvres du répertoire librement choisies, un air de concert de Mozart et une pièce contemporaine. Ce dernier point est d'ailleurs toujours un problème : plutôt que de puiser dans les œuvres des grands compositeurs d'aujourd'hui, les jeunes chefs choisissent trop souvent des œuvres un peu désuètes, et souvent de compositeurs qui sont leurs compatriotes.
Tobias Wögerer, qui ouvre le concours, choisit ainsi une œuvre d'un compositeur mort il y a vingt-cinq ans, et dont le langage est si peu audacieux qu'il rend l'exercice entièrement vain : le Tango polyphonique de Schnittke n'est pas même une curiosité, et il ne permet aucunement de voir comment Wögerer, à supposer qu'il le souhaite, aborderait des écritures sortant du cadre classique. De même, les deux partitions choisies par Vitali Alekseenok ont leur justification politique – le jeune chef biélorusse dit avoir quitté son pays après avoir manifesté contre son dictateur, et il choisit une œuvre de l'Ukrainien Valentin Silvestrov pour confirmer sa position, aux côtés d'une courte pièce de sa compatriote Olga Podkaiskaya, elle aussi opposée au dictateur biélorusse : le message politique est fort pertinent, mais ces œuvres insignifiantes n'ont aucune vertu discriminante. Seul le troisième candidat, Hankyeol Yoon, choisit une œuvre un peu plus ambitieuse, Of Rats and Men, de son compatriote Donghoon Shin : créée en 2019 par Peter Eötvös, il s'agit d'une pièce d'une dizaine de minutes d'après Kafka et Bolaño
Les Danses de Galánta choisies par Wögerer pour ouvrir son concert ne gagnent rien à être interprétées avec une telle brutalité qui noie la danse dans les décibels. La fraîcheur de la troisième symphonie de Schubert ne gagne elle aussi rien à un tel traitement, et on se désintéresse vite de ce premier candidat.
Vitali Alekseenov, lui, choisit la Symphonie n° 2 de Beethoven, en alternance avec l'œuvre de Silvestrov, dont il donne le dernier mouvement comme si c'était un bis, ce qui est une étrange idée. Lui comme ses concurrents ont du mal avec l'acoustique du Mozarteum, qu'ils saturent vite à coup de percussions et de cuivres en roue libre, mais du moins ce Beethoven a une grande fluidité, beaucoup d'esprit et d'invention – la clarté polyphonique est impeccable, le travail sur le son de l'orchestre aussi.
On retrouve certaines de ces qualités le lendemain chez Hankyeol Yoon qui a choisi la Symphonie écossaise de Mendelssohn, mais avec moins de constance dans la maîtrise sonore. Comme dans l'ouverture du Barbier de Séville qui ouvre son programme, il y a souvent un trop-plein d'intentions et des transitions trop marquées entre les scènes du vaste paysage dessiné par Mendelssohn ; à côté de moments où l'équilibre sonore est un peu incertain, on trouve cependant aussi des moments de grande poésie, qui témoignent d'une attention de détail qui reste à étendre à l'œuvre toute entière.
Avec la musique contemporaine, le choix d'un air de concert interprété par un jeune chanteur du programme de soutien du festival est l'autre contrainte que les candidats doivent respecter. Le ténor Anthony León chante avec élégance, mais sans s'investir vraiment, et il est fort peu soutenu par Wögerer ; la soprano Daria Kolisan est beaucoup mieux traitée par Alekseenov, qui organise un véritable dialogue entre l'orchestre et sa voix qui, un peu étouffée dans le grave, a une réelle séduction. Lilit Davtyan est cependant la seule des trois à trouver le ton juste dans l'un des airs tardifs, Ah se in ciel : on avait déjà pu se rendre compte lors des éditions précédentes que la rhétorique émotionnelle des airs de concert semblait difficile à restituer. On pourra lui reprocher de passer souvent en force, et Hankyeol Yoon propose un accompagnement un peu plus sommaire que son prédécesseur, mais cette probité stylistique emporte l'adhésion.
Aucun des trois candidats, cette année encore, n'aura réussi à susciter un vrai enthousiasme comme avaient su le faire Kerem Hasan ou Aziz Shokhakimov, mais le lauréat Hankyeol Yoon, tout comme son concurrent Vitali Alekseenok, ont certainement beaucoup de potentiel et des carrières solides devant eux.
Crédits photographiques : Tobias Wögerer ; Vitali Alekseenok ; Hankyeol Yoon © SF/Marco Borrelli
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5-VIII-2023. Olga Podgaskaya (née en 1981) : Epitaph ; Wolfgang Amadeus Mozart : Air Vado, ma dove?, KV 583 ; Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Symphonie n° 2, op. 36 ; Valentin Silvestrov (né en 1937) : Stille Musik. Daria Kolisan, soprano ; Vitali Alekseenok, direction.
6-VIII-2023 Gioachino Rossini (1792-1868) : Il Barbiere di Siviglia, ouverture ; Wolfgang Amadeus Mozart : Air Ah se in ciel, KV 538 ; Donghoon Shin (né en 1983) : Of Rats and Men ; Felix Mendelssohn Bartholdy (1809-1847) : Symphonie n° 3. Lilit Davtyan, soprano ; direction : Hankyeol Yoon.