Le Palazzetto Bru Zane met les compositrices à l’honneur

Dans ce coffret de huit disques, le Palazzetto Bru Zane nous fait traverser l'histoire du XIXᵉ siècle musical uniquement à travers des œuvres de compositrices ayant exercé en France.

Une œuvre composée par une femme vaut-elle moins qu'une œuvre écrite par un homme ? Non. Les femmes compositrices ont-elles pour autant composé uniquement des chefs-d'œuvres injustement oubliés ? Non plus. Tout comme chez les compositeurs masculins, la production musicale féminine comprend des pièces de qualités diverses et c'est tant mieux car cela démontre que la musique n'a pas de sexe et que le genre n'a aucune influence sur le talent. Cependant, jusqu'à très récemment encore, les femmes compositrices avaient beaucoup plus de difficultés à diffuser leur art. À de rares exceptions près, elles devaient se contenter la plupart du temps de composer pour petits effectifs, rester dans le registre de l'intime, composer des œuvres qui pouvaient être jouées à la maison, des pièces qui, comme elles, ne devaient pas quitter le domaine de la sphère privée.

Vivement le jour où les femmes compositrices de toutes époques seront uniquement programmées et enregistrées en raison de leurs talents et non pas de leur sexe! Mais pour ce faire, il faut déjà les connaître et connaître leurs compositions. C'est tout l'intérêt de ce coffret de 8 CD proposé par le label Bru Zane qui offre un panorama de la musique française du XIXᵉ à travers les compositrices. L'histoire de la musique n'étant pas totalement misogyne non plus, plusieurs d'entre elles sont déjà connues des mélomanes (Lili et Nadia Boulanger, Pauline Viardot…) ou des instrumentistes (pensons à tous les flûtistes qui ont travaillé le Concertino de Cécile Chaminade). Mais qui, à part quelques spécialistes, connaît Hedwige Chrétien, Augusta Holmès ou Hélène de Montgeroult dont les œuvres méritent pleinement d'être jouées ?

Confiés à des orchestres et à des solistes reconnus (Orchestre national du Capitole de Toulouse, Orchestre national de France, Victor Julien-Laférrière, Théo Foucheneret, Frank Braley, Anna Agafia…), les disques font entendre œuvres symphoniques (dont la très belle Symphonie n°3 en sol mineur de Louise Farrenc subtilement interprété par l'Orchestre national de Metz Grand Est dirigé par David Reiland), pièces de musique de chambre, œuvres pour piano et nombreuses mélodies d'une vingtaine de compositrices.

Au sein de cette compilation, la mélodie, genre intime par excellence, tient une place de choix. Ainsi, le ténor Cyrille Dubois et le pianiste Tristan Raës ressuscitent, dans une grande clarté d'interprétation le charme parfois suranné des mélodies de Cécile Chaminade, Hedwige Chrétien, Marie-Foscarine Damashino ou encore de Madeleine Jaeger. La musique de chambre est également bien représentée, notamment par Ismaël Margain et le Quatuor Hanson qui font revivre avec brio la Grande Fantaisie-Quintette de Rita Strohl au style anachronique. Il est impossible d'énumérer ici toutes les œuvres et leurs interprétation dans ce coffret, témoignage de l'évolution de l'écriture musicale du XIXᵉ à la première moitié du XXᵉ siècle où chaque compositrice s'inscrit dans le style de son époque.

Un seul regret devant ce coffret remarquable : que chaque disque ne fasse pas l'objet d'une classification chronologique ou thématique au lieu que chaque œuvre ou compositrice soit présentée dans un ordre qui peut sembler aléatoire.

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