Pendulum de Lucy Guerin, en majesté à la Biennale de danse de Venise

Lors de la Biennale Danse de Venise, Pendulum, la création de la chorégraphe australienne Lucy Guerin donnée en première mondiale, fait voir et entendre des « percussions dansées ».

Les spectateurs sont disposés à droite et à gauche d'un grand rectangle scénique, à même le sol. Des pendules sont suspendus au-dessus de la scène plongée dans l'obscurité, que seuls éclairent des leds sous des cloches tandis que des cymbales accrochées depuis le haut plafond du théâtre résonnent. Les sons de cloches sont dansés par sept vaillantes interprètes de la compagnie australienne Lucy Guerin Inc. Les danseuses en ensemble souple couleur chair, soyeux et brillant, pantalon-veste et baskets noires, se meuvent sous, autour, entre et avec le balancement régulier non aléatoire, calculé, des pendules, dans un rendu très réussi donnant à méditer. Il est question d'épousailles avec le son, ici celui des percussions de Matthias Schack-Arnott. Comme chez la chorégraphe Anne Teresa de Keersmaeker, la musique donne la direction complète du mouvement. Les sept danseuses se fondent dans le son des cloches, subtil, précis, géométrisé parfaitement, en cette scène panoramique que le spectateur du Teatro alle Tese dans l'Arsenal arpente du regard tout en étant comme hypnotisé par le son des pendules.

La précision du dispositif scénique rend possible cette immersion dans le mouvement dansé avec virtuosité par des femmes d'âges différents, tout aussi belles et concentrées les unes que les autres, s'attelant à des exercices de style, difficile car il s'agit de frôler, de passer sous ou entre les pendules en épousant leurs balancement sans jamais les toucher. Incroyable performance que ce bel opus millimétré. Évoquons plus précisément le dispositif scénique tant son élaboration sert le propos dansé : des rangées de pendules cuivrés pendent du plafond à la même hauteur, alternant les balancés en diagonale l'un après l'autre. Les fondus au noir ponctuent les tableaux dansés. Et les sept danseuses s'attendent et alternent aussi leurs mouvements en solos, duos, trios, etc… il est assez impressionnant de voir ces danseuses ramper sous les cloches, les éviter furtivement, les contourner avec grâce. Et sonnent les cloches d'un son pur, ni strident, ni perçant, un son doux, envoutant, lancinant. Le beau surgit de l'obscurité sous l'éclairage des pendules, et dessine une forme de prière inversée nous faisant approcher du sacré en toute pureté et délicatesse.

Le final synthétise l'ensemble dans des mouvements subtils qui résonnent dans l'obscurité tandis que se perd peu à peu la beauté des sons des pendules. La composition musicale de Matthias Schack-Arnott prend racine dans cette complicité entre la danse et la musique, qui prend le nom ici d'harmonie. Ces quarante minutes de grâce sont une belle réussite au bord de la lagune, un condensé de virtuosité ne laissant jamais transparaitre l'effort, dans ce subtil équilibre de percussions dansées. Une simplicité apparente, fruit d'un travail minutieux et sensible de la chorégraphe.

Crédits photographiques : Pendulum de Lucy Guerin et Mattias Shack-Arnott © Gregory Lorenzutti

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