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À Verbier, magique et envoûtant Klaus Mäkelä

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Verbier. Salle des Combins. 23-VII-2023. Sergueï Rachmaninov (1873-1943) : Concerto pour piano et orchestre no. 2 en do mineur op. 18. Richard Strauss (1864-1949) : Une Symphonie alpestre op. 64. Mikhaïl Pletnev (piano). Verbier Festival Orchestra. Direction musicale : Klaus Mäkelä.

Le charisme de , magnifiant l'enthousiasme d'un en grande forme, s'adjuge la complicité intériorisée du piano de pour porter le Concerto pour piano et orchestre n° 2 en do mineur op. 18 de .

Le concert d'ouverture de ce 30ème Verbier Festival voyait une inspirée Yuja Wang briller de toute sa débordante énergie dans le Concerto pour piano et orchestre n° 3 de Rachmaninov. Avec , l'approche pianistique est diamétralement opposée à celle de la jeune pianiste chinoise sans pour autant qu'on puisse juger de la version qui doit primer. La brillance de Yuja Wang s'oppose à l'intériorité de . Pourtant Yuja Wang ne manque pas de profondeur ni Mikhaïl Pletnev d'agilité.

On reste un peu sur sa faim dans ce premier mouvement du Concerto pour piano et orchestre n° 2 de Rachmaninov. Marqué par un certain manque d'audace, le soliste Mikhaïl Pletnev (et aussi à ses heures chef d'orchestre) tente de s'insérer dans l'esprit de la direction de peut-être, lui aussi, un peu timoré de diriger un aîné aussi maître de la baguette. L'un observe l'autre avec respect sans que se décide qui prendra le commandement. Il faudra attendre le second mouvement Adagio sostenuto pour prendre la mesure de l'exceptionnelle musique qui se dégage tant du piano que de la direction d'orchestre. Le visage impassible, comme privé d'émotions, Mikhaïl Pletnev parcourt le clavier les doigts collés aux touches. À de courts instants, il pose un regard convenu sur ses mains, sur ses doigts, comme pour en constater leur agilité. Mais qu'on ne se leurre pas, sous cette apparente nonchalance, le jeu reste techniquement d'une limpidité extrême. Mais l'attention du pianiste reste fixée aux gestes du chef. Conscient de l'importance de l'unité musicale, peu enclin à l'effet, le pianiste russe livre une prestation empreinte de beaucoup d'intériorité. Sa musique rejoint celle de qui, d'amples gestes, rassemble l'orchestre et le piano en un seul discours, celui de la musique de Rachmaninov. Alors que s'emballe le troisième mouvement Allegro scherzando, la tension ne faiblit pas. On s'étonne de l'apparente aisance de Mikhaïl Pletnev, tout y est, la vélocité, le toucher, la puissance, la mise en place. Avec l'envoûtement de la direction inspirée de Klaus Mäkelä, avec les cordes superbes d'un visiblement heureux, l'ovation du public est sans réserve. Rappelé plusieurs fois, Mikhaïl Pletnev, d'un habile coup de pied envoie son tabouret sous le clavier de son piano, signifiant de manière péremptoire qu'il n'y a pas de place pour un bis à ce concerto exécuté magistralement.

Au retour de l'entracte, le public découvre un plateau couvert de musiciens. Tout cela pour Une Symphonie alpestre de . Œuvre monumentale, cette journée en montagne comporte une vingtaine de tableaux musicaux aux couleurs orchestrales variées. En magicien des sonorités, Klaus Mäkelä embrasse cette ampleur sonore avec une élégance et une précision déconcertante. Visiblement happé par la masse instrumentale, il déploie une énergie démentielle à diriger l'orchestre jusque dans le moindre détail. Ici un départ, là une nuance, là encore un rythme qu'il indique avec sa baguette. Et toute cette attention réglée avec une élégance de geste admirable. Fascinant, magnétique. Et comme « son » est grand. Qu'ils sont beaux ces cors du Lever de soleil ! Quelle douceur apaisante avec ces violons des Pâturages alpins ! Quelle grandeur quand, les bras majestueusement et lentement étendus, Klaus Mäkelä offre cette Entrée dans la forêt ! Avec lui, on découvre les cors victorieux du Sommet, on goûte aux délices d'un hautbois annonçant l'amplitude sonore du tutti illustrant la Vision alentour. Noyé dans cette immensité orchestrale, le chef finlandais est totalement à l'aise. En symbiose avec la musique, avec ce Verbier Festival Orchestra qui semble lui convenir à merveille, Klaus Mäkelä offre un concert dense, d'une qualité musicale remarquable. Quand les dernières mesures de la Nuit revenue s'éteignent, de longues secondes s'écoulent dans un respectueux silence avant que, baissant sa baguette, relevant la tête, ouvrant des yeux pleins de gratitude envers les musiciens, Klaus Mäkelä libère le public qui applaudit très chaleureusement. Un concert qui s'inscrit parmi les grands moments de ce festival.

Crédit photographique : Klaus Mäkelä © Marco Borggreve

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