Quentin du Verdier explore les origines de l’orgue classique français

Quentin du Verdier propose ici un programme très significatif comprenant de grands auteurs français des XVIᵉ et XVIIᵉ siècles, sur un orgue d'inspiration pré-baroque imaginé par Dominique Thomas. Afin de replacer au mieux les œuvres dans leur contexte sacré, l'ensemble Les Meslanges apporte avec la voix et le serpent l'alternance indispensable à la compréhension des pièces.

Cet enregistrement est le premier de Quentin du Verdier. Qu'un jeune organiste fraichement diplômé du Conservatoire de Paris s'intéresse aux origines de l'orgue français, voilà qui a de quoi attirer l'attention.

Un disque hautement pédagogique puisqu'il propose un programme des pères de l'orgue français réalisé sur un instrument dont la conception est en parfaite adéquation avec le répertoire interprété. En effet l'histoire de la littérature pour orgue est directement imbriquée avec les caractéristiques des instruments qui n'ont cesser d'évoluer depuis l'époque gothique.

Pour ce récital, le choix s'est porté sur l'orgue de Champcueil dans l'Essonne construit en 2009 par Dominique Thomas. Il s'agit de la reconstitution d'un orgue d'esthétique franco-flamande au tournant des XVIᵉ et XVIIᵉ siècles, suivant les indications décrites par le Père Marin Mersenne dans son Harmonie universelle. Avec un tel orgue tous les possibles sont permis pour mettre en valeur le répertoire de l'époque au travers d'un tempérament mésotonique intégral grâce à des claviers munies de touches supplémentaires, un diapason à 415 Hz, et un grand ravalement de pédale qui permet l'exécution de notes graves en dessous de l'ambitus habituel.

L'alchimie des registrations utilisées nous est dévoilée dans le livret du disque par un chapitre intitulé : « Pour les connaisseurs », mais qui s'applique aussi à qui voudra s'instruire et comprendre les secrets de la construction du son. Quentin du Verdier s'inspire largement des suggestions de l'article de l'Harmonie universelle consacré aux mélanges des jeux, le résultat est éclairant et met en évidence tout un art sonore que l'orgue de Champcueil restitue à merveille. Tout cela représente un travail particulier d'étude historique, musicologique, organologique, assez considérable si l'on veut se rapprocher de l'esprit de ces musiques. Seule une sensibilité aiguë permet à l'artiste d'en révéler le message, au travers de son jeu, nourri de connaissances théoriques et pratiques. Plus que jamais l'art du discours est présent, agrémenté de subtils ornements parfaitement intégrés, tout cela est magnifiquement pensé et appliqué avec inspiration par l'interprète.

Par le passé, certains organistes, pionniers en la matière, avaient commencé à explorer ces répertoires en mettant en application les connaissances des traités. En 1964, Michel Chapuis à l'orgue de Saint-Séverin à Paris faisait découvrir au monde musical la musique de Titelouze en se référant aux registrations du XVIIᵉ siècle. Ce fut le début d'un long chemin initiatique qui porte ses fruits aujourd'hui. Quentin du Verdier fait partie de la jeune génération, porteur d'une tradition transmise par les « passeurs » de la fin du siècle dernier, à l'écoute du style ancien des orgues, toujours d'excellents inspirateurs. Tel un écrin illuminant les pièces d'orgue, la voix de Thomas van Essen et le serpent de Volny Hostiou viennent compléter harmonieusement ce panorama le replaçant au plus profond dans son contexte liturgique. Le livret renferme un Edito où Olivier Latry et Thomas Ospital, ses maitres au Conservatoire de Paris décrivent son brillant parcours et ses diverses récompenses.