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Le Journal d’Hélène Berr, monodrame de Bernard Foccroule

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Paris. Théâtre des Bouffes du Nord. 12-VI-2023. Bernard Foccroulle (1953*) : Le Journal d’Hélène Berr, Monodrame lyrique pour voix, piano et quatuor à cordes ; création mondiale. Adèle Charvet, mezzo-soprano ; Jeanne Bleuse, piano ; Quatuor Béla : Julien Dieudegard, violon ; Frédéric Aurier, violon ; Julian Boutin, alto ; Luc Dedreuil, violoncelle

Équivalent français du Journal d'Anne Frank, mais publié seulement en 2008, le Journal d'Hélène Berr inspire le compositeur , pour un monodrame pour voix, piano et cordes qui bénéficie à sa création de la mezzo-soprano .

Écrit à Paris entre 1942 et 1944, dans les heures sombres de l'occupation, le Journal d'Hélène Berr est comme celui d'Anne Frank à Amsterdam un texte de témoignage de la part d'une jeune femme victime de l'oppression nazie. Débuté en 1942 après une visite auprès de Paul Valéry, le journal d'Hélène Berr, 20 ans à l'époque, débute par cette rencontre reprise dans le monodrame de Bernard Foccroule juste après le Prologue.

Au fur et à mesure, Berr décrit la vie de tous les jours, dont une rupture et sa rencontre avec Jean Morawiecki, qui conservera précieusement le manuscrit avant de le léguer à Mariette Job, pour qu'il trouve finalement sa place au Mémorial de la Shoah à partir de 2002. À partir de ce texte, le directeur et compositeur Bernard Foccroule tire un monodrame pour petit ensemble et voix, où l'instrument vocal sert le texte dans un mélange de récit et de chant. Divisé en deux parties et quinze numéros, l'ouvrage dure environ une heure vingt, la première moitié se concluant sur la libération (contre rançon) du père d'Hélène Berr, la seconde avec son départ à Drancy en février 1944, dernier lieu avant Auschwitz et le camp de Bergen-Belsen, où elle mourra en avril 1945.

Entre les deux parties, le dur 3ème mouvement du Quatuor n°15 op.132 de Beethoven sert d'Interlude, ce compositeur ayant déjà été entendu auparavant par plusieurs citations, de même qu'on entend un chant entier de Schumann, porté par le piano de et la voix d'. Alors que le texte de Berr cite souvent Lewis Carroll et William Shakespeare, la musique d'un style de composition proche de celui des premiers ouvrages atonaux de l'École de Vienne revient souvent à des penchants plus romantiques. Vocalement, on pense plutôt à l'écriture des Français d'avant la guerre, où l'on s'attendrait presque à entendre les « Asie » de Ravel après la première partie chantée, avant de ressentir souvent les styles de Debussy et Poulenc par la suite.

Bien construit et bien assemblé, bien que non nouveau dans le matériau compositionnel, le monodrame prend place parfaitement dans les Bouffes du Nord parisiennes, un mois après sa création mondiale au Trident, à Cherbourg-en-Cotentin. Dans le dépouillement des murs, on profite alors autant de la qualité du que du piano toujours adapté à l'atmosphère du texte, en plus de trouver en une véritable qualité de conteuse. Très engagée, la mezzo-soprano crée de l'émotion dans les numéros les plus dramatiques (l'Étoile Jaune ; l'Arrestation du père), pour se montrer plus claire dans les quelques moments d'accalmie. Elle finit sur les « Horror ! Horror ! » du Macduff de Shakespeare, avant de quitter le plateau et de laisser les cinq musiciens décrire dans l'Épilogue les derniers moments d'une jeune juive massacrée comme tant d'autres il y a quatre-vingts ans.

Crédit photographique : @ ResMusica

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