Stéréo Deluxe : Philippe Decouflé pour la première fois aux Nuits de Fourvière
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Lyon. Grand théâtre de Fourvière. 31-V-2023. Dans le cadre des Nuits de Fourvière. Philippe Decouflé : Stéréo Deluxe. Mise en scène et chorégraphie : Philippe Decouflé. Assistante chorégraphique : Alexandra Naudet. Musiques originales : Arthur Satàn, Louise Decouflé, Romain Boutin. Orchestrations : David Lewis / Arthur Satàn. Lumière et régie générale : Begoña Garcia Navas. Décor : Jean Rabasse, assisté d’Aurélia Michelin. Création costumes : Philippe Guillotel, assisté de Charlotte Coffinet, Catherine Coustère, Jean Malo. Musicien·ne·s : Arthur Satàn (guitare), Louise Decouflé (basse), Romain Boutin (batterie), David Lewis (trompette), Yannick Jory (saxophones), Philippe George (trombone), Vincent Bestaven (claviers). Avec la participation exceptionnelle de David Ghetto. Avec : Violette Wanty, Aurélien Oudot, Eléa Ha Minh Tay, Olivia Lindon, Vladimir Duparc, Pierre Boileau, Baptiste Allaert
Pour l'ouverture des Nuits de Fourvière, à Lyon, Philippe Decouflé propose une version « Deluxe » de son Stéréo créé l'an dernier à Montpellier Danse. Un spectacle joyeusement foutraque.
Il s'en est fallu de peu. De plus gros nuages, et le spectacle se déroulait sous la pluie pour les 3 000 spectateurs du Grand Théâtre Antique de Fourvière à Lyon. En prévision de plus grosses gouttes, le festival des Nuits de Fourvière distribua pour cette nuit inaugurale, des ponchos en film transparent, créant une surprenante image de foule sous cloche mouvante, très inspirant, cela dit, pour de futures chorégraphies. Pour sa première venue aux Nuits de Fourvière (étonnamment), Philippe Decouflé aura eu de la chance : la pluie passa son chemin, et le déchargement de décibels pouvait commencer.
Stéréo, sa nouvelle création, est une version « Deluxe » (allusion à ses camarades du Royal de Luxe, la compagnie de rue nantaise) d'un premier jet proposé l'été dernier à Montpellier, enrichi pour ce plus grand plateau, de sections de cuivres et de plusieurs autres danseurs. L'idée est simple : il s'agit de constituer un orchestre de rock (guitare, basse – tenue par Louise Decouflé, la fille du chorégraphe, clavier, batterie, cuivres…) et de le marier avec une tribu de sept danseurs, des fidèles et de nouveaux arrivés, pour constituer un concert-dansé, ou un spectacle de rock comme on voudra. Un mariage de déraison, qui ne ressemble en rien au style Decouflé que l'on connait, mais qui décoiffe néanmoins, à sa façon. Ici, pas d'images visuelles, peu de travail de lumières, pas de costumes animalesques, rien que de la musique, de la danse et du sketch, parce que l'humour est sûrement le maître-mot de Decouflé.
Et cela commence par un homme nu (ou presque), qui s'avance et effeuille des cartons pour annoncer « une production alléchante et dynamique ». L'artiste en question, Baptiste Allaert, est assurément le grand triomphateur de ce spectacle, sorte de Philippe Katerine de la danse, mime parlant, danseur contrarié, agitateur de sons dans l'humour comme dans l'émotion. Il sait tout faire d'une habile maladresse extrêmement touchante et maitrisée. Il sait ainsi danser un son, en réagissant aux rythmes de la musique, comme si celle-ci émanait de son propre corps plutôt que de ses camarades musiciens derrière lui. Il grimpe debout sur les épaules d'un danseur (le cirque, vieille passion de Decouflé…) et tremble comme une feuille à l'idée de chuter, mais il ne chute pas… Il parle, et c'est drôle. Ce personnage au corps ordinaire et particulier, rappelle à l'évidence celui de Christophe Salengro, complice fidèle du chorégraphe pendant près de 30 ans, et le compliment n'est pas mince.
Pendant 1h45 (durée un peu longue), danseurs et musiciens enchaînent les chansons, les danses et les situations burlesques, dans un esprit parodique, interrogeant l'image et les clichés du concert de rock où les filles font les choristes-papier peint, où la vedette triture son micro, tortille ses lunettes, joue d'une sexualité forcée, court dans la salle à la recherche d'un peu d'amour, et lance «Bonsoirrrr, Laïonne », comme si la star ne savait pas vraiment dans quelle ville elle jouait… Le tout, afin de marquer le temps, avec un vestiaire de latex, de paillettes et de chaussures plate-forme bien à l'image de ces années 70-80 au plus fort moment du disco et de la fin du rock.
Chorégraphiquement parlant, la danse est omniprésente et mixe l'acrobatie, le duo contemporain, le break, le voguing, le hip hop…. Rien de novateur, mais tout se déroule. Les filles (notamment la fidèle Violette Wanty ou l'incroyable Eléa Ha Minh Tay, volcanique boule d'énergie) assurent avec une vitalité et une forme qui n'est, signe des temps, quasiment plus genrée. Il y a pourtant un duo très féminin et stupéfiant : celui de ces deux danseuses où l'une arrive sur pointes, et l'autre porte des chaussures plateforme hyper design 70's au bout très large et arrondi et aux talons aiguilles stiletto d'au moins 15 cm de haut, et l'on découvre soudain, lorsque ces quatre pieds sont côte à côte que ces talons aiguilles qui forcent le cou-de-pied donnent la même illusion optique que la pointe. Et lorsqu'un danseur arrive, doté d'une incroyable chaussure dépourvue de talons et créant la même illusion, on comprend alors qu'un chausson pointes n'est guère qu'une chaussure très hype et super designée… Une folle remise au goût du jour ! Un télescopage à l'image aussi d'un spectacle joyeusement foutraque et légèrement bordélique à revoir cet automne à La Villette, Martigues, Chambéry et Grenoble , mais qui plaît à qui a juste envie de se dérider le corps et l'esprit. Ce qui n'est déjà pas si mal.
Crédits photographiques © Paul Bourdrel
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