Aspects chambristes de Louis Vierne par l’Ensemble le Déluge

L'Ensemble le Déluge nous invite à découvrir quatre œuvres de Louis Vierne appartenant à sa musique de chambre, marquée par l'inestimable Sonate pour violoncelle et piano en si mineur. 

Le catalogue de Louis Vierne, élève de César Franck et de Charles-Marie Widor est dominé par ses 6 éblouissantes symphonies pour orgue, mais sa musique de chambre est à découvrir.

La Sonate pour violon et piano en sol mineur, commande du virtuose Eugène Ysaÿe est composée en 1905 et créée en mai 1908 par son ami le fameux Raoul Pugno qui l'inscrivit souvent à ses programmes. Il statua : « Après la sonate de Franck, la sonate de Vierne est de loin la première ». Nathan Mierdel (violon) et Laurent Wagschal (piano) en offrent une lecture parfaite, mettant en avant le brillant de sa forme, son opulence lyrique, sa personnalité harmonique et les qualités de son écriture instrumentale. Ils soulignent parfaitement les sections où dominent tantôt un sentiment tragique (Andante sostenuto) tantôt une expression toute de grâce et d'élégance (les deux Allegros).

L'inestimable Sonate pour violoncelle et piano en si mineur, dédiée à Pablo Casals, date des années 1910-1911, une période emplie de douleur et d'épreuves. Elaborée à Paris, elle précède de peu la fameuse Symphonie pour orgue n° 3 en fa dièse mineur. Vierne la pare d'une ferveur incandescente, lui offre une structure formelle accomplie et un discours des plus concentré et habité. Son premier mouvement débute par un court Poco lento rapidement suivi d'une section Allegro moderato où le violoncelle, d'abord ténébreux et décidé devient mélodieux et passionné. Métamorphose que la violoncelliste Pauline Bartissol défend avec talent. Le Molto largamente appartient aux meilleures pages de la musique de chambre française que Vierne construit sur une inspiration pénétrante et ardente que Bartisssol et Wagschal magnifient de part en part. Le dernier mouvement Risoluto-Allegro molto se libère de ce climat oppressant et opte pour davantage de légèreté tout en se souvenant habilement des thèmes constitutifs des deux premiers mouvements.

La beauté du timbre et la précision de l'expression dues au hautbois dans le bref Largo e Canzonetta (1896) doit particulièrement aux qualités d'Alexandre Gattet, magnifique.

Le programme s'achève avec les Deux pièces pour alto et piano (Le soir et Légende) écrites en 1895, choix qui complète la palette créatrice de Louis Vierne, encore trop peu fréquentée et estimée.

La discographie de Vierne n'est pas inexistante. Elle s'intéresse principalement à son catalogue consacré à l'orgue, à l'association voix et orgue et plus lointainement à sa musique pour piano. Quant à sa musique de chambre on rappellera l'existence d'une intégrale (2 CD) parue chez Timpani en 1990 et de quelques gravures mettant en avant les Sonates et le Quintette chez Hortus, Lyrinx, Erato, Pierre Verany.

Nul doute que cette gravure centrée autour du piano omniprésent de Laurent Wagschal contribuera à repositionner la musique de chambre de Vierne.