Theodora de Haendel, après la tournée, le disque

À la suite de la série de concerts donnés par l'ensemble Il Pomo d'Oro et un cast exceptionnel, la tournée de l'oratorio Theodora de Haendel trouve sa conclusion dans un nouvel enregistrement.

Initiée à Vienne à le 18 novembre 2021, puis passant par La Scala de Milan, le 20, puis au Théâtre des Champs-Elysées à Paris les deux jours suivants pour enfin s'arrêter à la Philharmonie de Essen le 26 novembre, la tournée de l'ensemble baroque Il Pomo d'Oro et sa brochette de solistes a donc bénéficié de cinq concerts avant de finaliser leur prestation de cette Theodora de Haendel dans les micros des techniciens d'Erato. Cinq concerts-répétitions publics avant un enregistrement en studio, qui lui-même s'est déroulé sur trois jours, voilà de quoi accoucher d'un disque parfait. Parfait, il l'est. Sans contredit.

Tout est en place, tout est dit avec soin, tout est chanté à la perfection, tout est joué superbement. Avec ces musiciens rompus à ce genre de musique, avec les avantages qu'apportent les techniques d'enregistrement actuelles capables d'individualiser à son avantage chaque instrument, ce disque se révèle bien meilleur que la version que Niklaus Harnoncourt nous a laissée à la tête du Consentus Musicus Wien en 1991 et plus encore que celle enregistrée au festival de Glyndebourne en juin 1996 par William Christie et l'Orchestra of the Age of Enlightenment. Sauf que les interprètes d'alors, quand bien même ils n'avaient pas toutes les clés interprétatives de cette musique, l'exprimaient avec une conviction bien plus profonde que celle qu'on entend dans cet enregistrement.

Notre confrère Pierre Degott qui a assisté à l'un des concerts parisiens de cette tournée en a fait un compte-rendu exhaustif qui correspond parfaitement à ce que cet enregistrement nous donne à entendre. En effet, la présence simultanée de Joyce DiDonato (Irene), de Michael Spyres (Septimus) et de Lisette Oropesa (Theodora) apparait comme un miracle en soi quand on sait l'emploi du temps de ces vedettes lyriques. Et si l'on adhère à la sobriété de l'interprétation vocale des chanteurs, on reste plus réservé sur l'intensité interprétative. Peut-être est-ce une question de goût, mais il nous apparaît que l'implication artistique d'une Jard van Nes chez Harnoncourt ou d'une Lorraine Hunt chez William Christie reste bien au-dessus de celle de Joyce DiDonato qui, dans ce disque, semble offrir à son propre contentement une voix grandement fabriquée.

Reste que la qualité sonore de ce nouvel opus est si remarquable qu'elle devrait faire l'unanimité auprès des amateurs de beau son même si certaines séquences des contrebasses tendent à saturer le boomer des enceintes acoustiques. Qui recherchera une vérité théâtrale s'attardera donc plus volontiers sur le live de William Christie et qui préfèrera une version plus analytique se penchera sur ce nouvel enregistrement.