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Nikolaï Luganski dans Rachmaninov au Théâtre des Champs-Elysées

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Paris. Théâtre des Champs-Elysées. 14-III-2023. Sergueï Rachmaninov (1873-1943) : 10 Préludes op.23 ; Variations sur un thème de Corelli, op. 42 ; 9 Etudes-Tableaux, op. 39. Nikolaï Lugansky, piano

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Engagé dans une quasi-intégrale des œuvres pour piano seul de Rachmaninov en trois concerts au TCE, s'affirme comme la référence incontournable de ce répertoire.

Le deuxième concert-événement de cette série a tenu ce qu'il promettait – et sans doute plus encore. Dès les Préludes de l'opus 23, le pianiste russe témoigne de l'expressivité de son interprétation en installant un puissant jeu d'atmosphères, fait d'ombres et de lumières. Servi par sa virtuosité exceptionnelle, il aborde ces pièces intenses comme autant de récits ou de peintures, s'attachant à en faire ressortir le sens caché. Que ce soit dans les morceaux calmes (Préludes n°4 ou n°10) ou tumultueux (Préludes n°5 ou n°9), l'impression de plénitude domine.

Dans les Variations sur un thème de Corelli, on est emporté par la progression thématique et harmonique de l'œuvre, depuis l'ouverture antique et dépouillée jusqu'aux variations les plus lyriques. Tout est parfaitement en place : chaque nuance, rupture de rythme ou passage d'un plan sonore à un autre. Lugansky ne livre pas ici un simple exercice de style, mais met en évidence toute la richesse de la partition, alliage de baroque européen et de ce romantisme si propre à Rachmaninov.

Les Etudes-Tableaux de l'opus 39 proposées par Lugansky forment un ensemble non seulement impressionnant par la maîtrise technique d'un artiste à son sommet, mais aussi par la puissance d'évocation dégagée par cette interprétation. Dans une approche symboliste de l'œuvre, Lugansky fait surgir de chaque page des mondes enfouis : les vieilles légendes slaves sont convoquées, comme les chœurs orthodoxes, les sonneries de cloches, sans oublier les citations venues d'Orient. Les lignes de chant, qui ressortent remarquablement, frappent par leur lyrisme (Étude n°5), leur tragique (Étude n°7) ou leur douceur (Étude n°8). La Deuxième étude impressionne tout particulièrement par son caractère halluciné. C'est donc une interprétation hors du commun que donne Lugansky, déjà auteur de plusieurs enregistrements exemplaires de ce cycle.

En bis, après l'émouvante Élégie de son compositeur fétiche, Lugansky rend hommage pour finir au transcripteur que fut également Rachmaninov, en offrant ses arrangements du Liebesleid de Fritz Kreisler puis de la Gavotte tirée de la troisième Partita pour violon de Bach. Un final savoureux mêlant les génies de chacun – compositeur, transcripteur… et interprète.

Crédits photographiques : © Marco Borggreve

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Paris. Théâtre des Champs-Elysées. 14-III-2023. Sergueï Rachmaninov (1873-1943) : 10 Préludes op.23 ; Variations sur un thème de Corelli, op. 42 ; 9 Etudes-Tableaux, op. 39. Nikolaï Lugansky, piano

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