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À Lausanne, Barbara Hannigan en artiste accomplie

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Lausanne. Salle Métropole. 22-II-2023. Albert Roussel (1869-1937) : Le Festin de l’araignée op. 17. Maurice Ravel (1875-1937) : Les Histoires naturelles (arr. Antony Girard). Benjamin Britten (193-1976) : Les Illuminations op. 18. Joseph Haydn (1732-1809) : Symphonie en ré majeur, Hob. I : 104 «Londres». Stéphane Degout, baryton. Orchestre de Chambre de Lausanne. Direction et soprano : Barbara Hannigan

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Phénomène de la musique classique, la cheffe d'orchestre et soprano a convaincu le public lausannois de ses indéniables talents dans un concert empreint d'émotions musicales rares.


Toute de noire vêtue, robe de tulle simple, salue et gravit rapidement le podium. D'un geste, les bras étendus, le corps fléchi vers l'avant, elle capte l'attention des musiciens de l'orchestre et, d'une main écartant subitement les doigts, la musique du Festin de l'araignée d' s'élève. Avec les musiciens de l' particulièrement en forme, la cheffe les mène vers des lignes mélodiques superbement soignées. Expressive dans le geste, précédent l'intention musicale à laquelle l'orchestre répond dans l'immédiateté, offre quelques moments suspendus du plus bel effet. On apprécie particulièrement son ultime fragment symphonique de l'oeuvre «La nuit tombe sur le jardin solitaire» où la cheffe sait imprimer un lyrisme exacerbé à cette mélodie dominée par une flûte discrète mais inspirée.

On s'acheminait vers un moment de pur bonheur avec les poèmes piquants et spirituels de Jules Renard qui font « Les Histoires naturelles » mises en musique par . On sait le soin que le baryton porte à la diction de la mélodie française. Mais le merveilleux n'est pas au rendez-vous. La voix du baryton qui nous avait tant enchanté lors de son récital lausannois de 2017 apparait assombrie, voir engorgée. L'acoustique très réverbérante de la salle ne rend pas justice aux subtilités d'un chant aussi varié. Certaines phrases dites en mode plus intimistes ne dépassent pas la moitié du parterre. Ainsi, seuls les premiers rangs de la salle réagissent quand le baryton lance en aparté «…il engraisse comme une oie», les derniers vers du Cygne. On tend l'oreille mais on ne saisit plus les mots, chante sans pouvoir tenir compte de l'acoustique de l'endroit. Lorsque enfin il attaque à pleine voix « La Pintade » magnifiquement accompagné par l'orchestre et sa direction, on réalise la frustration qu'a pu ressentir une partie du public.

Puis, l'impatience d'entendre Barbara Hannigan dirigeant et chantant en même temps « Les Illuminations » de sur des poèmes posthumes d'Arthur Rimbaud gagne le public. Certes moins spectaculaire que la prestation des « Mystères du Grand Macabre » de György Ligeti aux Proms de Londres en 2015, cette interprétation s'inscrit dans une démarche artistique intense quand bien même la soprano canadienne ne laisse aucune ambiguïté sur ses capacités vocales extraordinaires. Tournant partiellement le dos à l'orchestre faisant face au public, Barbara Hannigan impose sa direction d'orchestre par d'infimes mouvements du corps et quelques mouvements des mains et des bras en harmonie avec son chant. Bientôt, ce qu'on imaginait comme une performance se transforme en un moment artistique inspiré. Orchestre et chant ne font plus qu'un. La voix superbe, les aigus éthérés, sont l'orchestre et l'orchestre se fait chant par l'entremise du premier violon de François Sochard tout entier dédié à l'œuvre et à son accomplissement. La voix et le geste de Barbara Hannigan opère une fascination dévastatrice tant sur le public que sur l'orchestre dont elle ne lâche pas un seul instant la direction. Profondément inspirée par le texte rimbaldien, à l'exemple du «Being beauteous» où les aigus et tout le corps de la soprano participent à l'expressivité musicale. Quand le dernier accord s'efface lentement, pianissimo, comme suspendu dans l'espace, il se passe de longues secondes avant que le public manifeste à juste titre son enthousiasme pour ces si émouvants instants.

Changement d'ambiance total avec la Symphonie en ré majeur, n° 104 « Londres » de . Favorisant des couleurs orchestrales sombres dans un découpage abrupt, Barbara Hannigan imprime du tragique à l'Adagio initial offrant ainsi une approche très personnelle de cette symphonie. Tout au long de cette interprétation, on ressent ce que l' avait laissé transparaître dès le début du concert, une grande complicité avec cette cheffe d'orchestre peu commune. Au moment des saluts, devant un public à l'évidence ravi de ce concert, Barbara Hannigan se confondait en remerciements envers les musiciens de l'orchestre, signe tangible du plaisir partagé dans la communion de la musique.

Crédit photographique : Barbara Hannigan © MarcoBorggreve

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Lausanne. Salle Métropole. 22-II-2023. Albert Roussel (1869-1937) : Le Festin de l’araignée op. 17. Maurice Ravel (1875-1937) : Les Histoires naturelles (arr. Antony Girard). Benjamin Britten (193-1976) : Les Illuminations op. 18. Joseph Haydn (1732-1809) : Symphonie en ré majeur, Hob. I : 104 «Londres». Stéphane Degout, baryton. Orchestre de Chambre de Lausanne. Direction et soprano : Barbara Hannigan

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