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Paris. Opéra Comique. 29-I-2023. Jacques Offenbach (1813-1901) : Le Voyage dans la lune, opéra-féérie en quatre actes sur un livret d’Albert Van Loo, Eugène Leterrier et Arnold Mortier d’après le roman de Jules Verne De la Terre à la lune. Mise en scène et costumes : Laurent Pelly. Adaptation du livret et nouvelle version des dialogues : Agathe Mélinand. Décors : Barbara de Limburg. Lumières : Joël Adam. Avec : Franck Leguérinel, baryton (le roi V’lan) ; Arthur Roussel, ténor (le prince Caprice) ; Ludmilla Bouakkaz, soprano (la princesse Fantasia) ; Mateo Vincent-Denoble, baryton (Microscope) ; Enzo Bishop (le roi Cosmos) ; Violette Clapeyron, soprano (Flama) ; Rachel Masclet, soprano (Popotte) ; Micha Calvez-Richer, ténor (Cactus) ; Salomé Baslé, Justine Chauzy Le Joly, Judith Gasnier, Airelle Groleau et Maxence Hermann (Demoiselles d’Honneur). Maîtrise Populaire de l’Opéra-Comique (direction artistique : Sarah Koné). Les Frivolités Parisiennes, direction : Alexandra Cravero
Dans un spectacle conçu pour les jeunes artistes de la Maîtrise Populaire de l'Opéra-Comique, Laurent Pelly signe une nouvelle mise en scène très réussie. La jeunesse et le manque d'expérience de la plupart des chanteurs excusent une restitution musicale dépourvue quelque peu de panache vocal.
On ne compte plus depuis quelques semaines les ouvrages lyriques thématisant un voyage sur la lune. Après la mise en scène de l'ouvrage d'Offenbach par Olivier Fredj, destinée à être vue dans de nombreux théâtres de l'hexagone, après la production à Metz de l'ouvrage de Haydn Il mondo della luna, c'est au tour de l'Opéra-Comique de présenter au public sa propre version de l'opéra-féérie Le Voyage dans la lune. Mise en scène par Laurent Pelly, la production avait été créée devant les caméras de France 5 et diffusée le 29 avril 2021 pendant le troisième confinement. C'est donc la première fois que le public peut voir ce remarquable spectacle, très différent de la mise en scène de Fredj qui tourne actuellement en France, et dont on trouvera la partie musicale dans un des albums publiés par le label Bru Zane. De manière à rendre l'œuvre accessible aux jeunes interprètes de la Maîtrise Populaire de l'Opéra-Comique, l'intrigue a été resserrée et le livret considérablement réécrit par Agathe Mélinand. Il est vrai que la version originale conçue par Offenbach, avec ses 31 musicaux et ses 23 tableaux, proposait un spectacle de près de six heures. Adieu, donc, aux nombreux ballets qui ornaient la fin de chacun des actes, adieu au truculent personnage de Quipasseparlà, adieu au marché aux femmes et à la vente aux enchères, jugés à juste titre inappropriés pour notre époque ! Mais qu'on se console, car même si l'on n'entend pas la totalité de la musique composée par Offenbach, le spectacle est de toute beauté et la mise en scène de Laurent Pelly une réussite absolue. On saluera tout d'abord la beauté intrinsèque des deux décors, qui renvoient à la vision d'une planète Terre dégradée dans ses montagnes et ses accumulations de plastique celle d'une lune poétique et onirique, magnifiée par les superbes costumes blancs des Sélénites et une gestuelle harmonieuse, toute en grâce et en rondeur, qui contraste fortement avec les mouvements hachés et désordonnés des Terriens. On notera également la remarquable fluidité des masses chorales dont les déplacements semblent tirés au cordeau, ainsi qu'une direction d'acteurs qui ne laisse rien au hasard.
Sur le plan musical, le bilan n'est peut-être pas tout aussi heureux, résultat du parti pris de recourir pour cette production à la Maîtrise Populaire de l'Opéra-Comique et de confier, de ce fait, la plupart des rôles à des acteurs-chanteurs encore en formation. Même s'il compte apparemment quelques voix graves, le chœur est très largement dominé par les voix d'alto et de soprano. Plus gênant, plusieurs solistes sont nettement insuffisants du point de vue du chant, même si les relatives carences vocales de chanteurs encore jeunes sont largement compensées par la fraicheur de leur jeu et la clarté de leur diction. Le ténor Arthur Roussel propose ainsi du prince Caprice un portrait tout à fait convaincant et attachant scéniquement, mais il est loin de maîtriser les difficultés vocales d'un rôle de premier plan, conçu par Offenbach pour la voix de mezzo-soprano de son égérie Zulma Bouffar. Si l'on peut saluer le jeu très fluide et la belle diction de Mateo Vincent-Denoble et d'Enzo Bishop, respectivement Microscope et Cosmos – deux personnages qui n'ont pas beaucoup à chanter – on aura plus d'éloges encore pour la très belle prestation de Franck Leguérinel en roi V'lan, seul chanteur véritablement expérimenté de la production. Chez les dames, Rachel Masclet en reine Popotte et Violette Clapeyron en Flama tirent elles aussi leur épingle du jeu, mais la vraie révélation viendrait plutôt de Ludmilla Bouakkaz en Fantasia, laquelle rend plus que justice à une écriture vocale relativement virtuose. Une jeune chanteuse à suivre.
Dirigeant un effectif réduit destiné à ne pas trop éprouver des voix encore jeunes et fragiles, la cheffe d'orchestre Alexandra Cravero tire de l'ensemble orchestral Les Frivolités Parisiennes des sonorités diaphanes et transparentes qui mettent bien en valeur les instruments solistes de l'orchestre. L'orchestre n'en dépeint pas moins, et avec toute l'emphase qui convient, des pages plus dramatiques comme l'alunissage du canon ou, au dernier acte, le réveil du volcan. Une belle soirée, donc, qu'on espère voir immortalisée un jour sur un DVD.
Crédit photographique : © Stefan Brion
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Paris. Opéra Comique. 29-I-2023. Jacques Offenbach (1813-1901) : Le Voyage dans la lune, opéra-féérie en quatre actes sur un livret d’Albert Van Loo, Eugène Leterrier et Arnold Mortier d’après le roman de Jules Verne De la Terre à la lune. Mise en scène et costumes : Laurent Pelly. Adaptation du livret et nouvelle version des dialogues : Agathe Mélinand. Décors : Barbara de Limburg. Lumières : Joël Adam. Avec : Franck Leguérinel, baryton (le roi V’lan) ; Arthur Roussel, ténor (le prince Caprice) ; Ludmilla Bouakkaz, soprano (la princesse Fantasia) ; Mateo Vincent-Denoble, baryton (Microscope) ; Enzo Bishop (le roi Cosmos) ; Violette Clapeyron, soprano (Flama) ; Rachel Masclet, soprano (Popotte) ; Micha Calvez-Richer, ténor (Cactus) ; Salomé Baslé, Justine Chauzy Le Joly, Judith Gasnier, Airelle Groleau et Maxence Hermann (Demoiselles d’Honneur). Maîtrise Populaire de l’Opéra-Comique (direction artistique : Sarah Koné). Les Frivolités Parisiennes, direction : Alexandra Cravero