Jakub Hrůša magnifie à Bamberg la fascinante symphonie de Hans Rott
Plus de détails
Hans Rott (1858-1884) : Symphonie n° 1 en mi majeur. Gustav Mahler (1860-1911) : Andante allegretto « Blumine ». Anton Bruckner (1824-1896) : Prélude symphonique en ut mineur. Orchestre symphonique de Bamberg, direction : Jakub Hrůša. Enregistré à Bamberg, Joseph-Keilberth-Saal, en septembre et octobre 2021 (Rott), décembre 2021 (Mahler) et mars 2022 (Bruckner). 1 CD Deutsche Grammophon. Texte de présentation en allemand et anglais. Durée : 70:11
Deutsche GrammophonPartition géniale bien qu'un peu déséquilibrée, la Symphonie n° 1 de Hans Rott porte en elle le germe de l'univers mahlérien. Jakub Hrůša à Bamberg la met avec pertinence en regard de deux œuvres courtes dues l'une au maître de Rott, Anton Bruckner, l'autre à son condisciple et ami Mahler.
Hans Rott, élève très aimé de son maître Anton Bruckner, ami et condisciple de Hugo Wolf et Gustav Mahler, n'a que vingt ans lorsqu'il compose sa seule grande œuvre, la Symphonie n° 1 en mi majeur ; il n'y en aura pas de deuxième car Rott, après s'être heurté au refus de Hans Richter et aux critiques de Brahms, sombre dans la folie. Interné, il meurt d'une maladie pulmonaire à vingt-six ans. Mais cette unique symphonie, exhumée dans les années 1980 par le musicologue Paul Banks, fut une redécouverte majeure quand parut le premier enregistrement par Gerhard Samuel. Depuis, de nombreux chefs de valeur l'ont gravée (Friedemann Layer, Paavo Järvi, Sebastian Weigle, Denis Russell Davies) ; mais ce nouvel enregistrement par Jakob Hrůša s'impose devant tous les précédents.
La symphonie est articulée en quatre mouvements de forme classique mais de contenu extrêmement original et novateur, malgré d'évidents déséquilibres. Le premier mouvement d'une dizaine de minutes évoque beaucoup Wagner (notamment l'ouverture des Maîtres chanteurs) mais le rôle de la trompette solo anticipe sur Mahler. Le second, adagio marqué Sehr Langsam, lui aussi d'une dizaine de minutes, s'éloigne du modèle brucknérien par ses accents dramatiques, curieusement proches de ceux des futures symphonies de Franz Schmidt. Mais c'est l'extravagant scherzo qui marquera Mahler au point que celui de sa propre première symphonie en reprendra presque textuellement certains thèmes. A cette page fascinante suggère l'immense finale (vingt-trois minutes) où passent les ombres de Brahms (dans le grand thème hymnique inspiré de celui de la première symphonie), Bruckner et déjà les futurs accents des échos de trompettes de la Résurrection mahlérienne. Malgré le déséquilibre de sa trop grande durée et de ses redites, ce mouvement recèle une richesse et une variété d'accents proprement sidérante. Magnifiquement enregistré dans une prise de son qui a la sagesse de laisser à l'arrière plan l'omniprésent triangle (une gaucherie d'orchestration du très jeune compositeur), l'orchestre de Bamberg, somptueux, sonne avec une rare plénitude sous la baguette inspirée de Jakob Hrůša, chef déjà remarqué il y a peu pour son passionnant coffret confrontant les diverses versions de la Symphonie n° 4 « Romantique » de Bruckner (Accentus). Il parvient à unifier cette partition dont la richesse d'inspiration ne va pas sans un certain caractère composite.
En complément, Hrůša ajoute le « Blumine », cet andante que Mahler avait initialement inclus dans sa première symphonie entre le premier mouvement et le scherzo. Sa parenté avec le premier mouvement de la symphonie de Rott apparaît ici dans l'utilisation de la trompette. Enfin, le Prélude symphonique en ut mineur attribué à Bruckner achève cet album. C'est une partition écrite apparemment en 1876, mais bien différente, ne serait-ce que par sa concision des vastes mouvements de la première version de la Romantique, contemporaine. L'orchestration en est sans doute due à Rudolf Krzyżanowski, élève de Bruckner dans les archives duquel l'œuvre fut tardivement retrouvée. L'interprétation pleine de fougue et de grandeur de Jakob Hrůša fait taire les interrogations quant à l'origine réelle de cette partition et son auteur.
Plus de détails
Hans Rott (1858-1884) : Symphonie n° 1 en mi majeur. Gustav Mahler (1860-1911) : Andante allegretto « Blumine ». Anton Bruckner (1824-1896) : Prélude symphonique en ut mineur. Orchestre symphonique de Bamberg, direction : Jakub Hrůša. Enregistré à Bamberg, Joseph-Keilberth-Saal, en septembre et octobre 2021 (Rott), décembre 2021 (Mahler) et mars 2022 (Bruckner). 1 CD Deutsche Grammophon. Texte de présentation en allemand et anglais. Durée : 70:11
Deutsche Grammophon