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Paris. Opéra Comique. 28-IX-2022. Léo Delibes (1836-1891). Lakmé, opéra en trois actes, livret d’Edmond Gondinet et Philippe Gille, d’après le roman, Le mariage de Loti de Pierre Loti. Mise en scène et costumes : Laurent Pelly. Assistant mise en scène : Luc Birraux. Assistants costumes : Léonore Boyot-Gellibert, Jean-Jacques Delmotte. Décors : Camille Dugas. Assistante décors : Adeline Millet. Lumières : Joël Adam. Adaptation dialogues : Agathe Mélinand. Chefs de chant : Mathieu Pordoy, Marine Thoreau La Salle. Avec : Sabine Devieilhe, Lakmé ; Frédéric Antoun, Gérald ; Ambroisine Bré, Mallika ; Stéphane Degout, Nilakantha ; Philippe Estèphe, Frédéric ; Elisabeth Boudreault, Ellen ; Marielou Jacquard, Rose ; Mireille Delunsch, Mistress Bentson ; François Rougier, Hadji ; Guillaume Gutiérrez, Un Marchand chinois ; François-Olivier Jean, Un Domben ; René Ramos Premier, Un Kouravar. Ensemble Pygmalion, direction musicale : Raphaël Pichon
Huit ans après sa prise de rôle, Sabine Devieilhe revient Salle Favart pour reprendre Lakmé, toujours face au Gérald de Frédéric Antoun, aujourd'hui dans une nouvelle production de Laurent Pelly dirigée par Raphaël Pichon.
Créé en 1883 à l'Opéra Comique et joué depuis plus de 1 600 fois dans les lieux, Lakmé de Léo Delibes retrouve en cette rentrée une artiste déjà sublime pour sa prise de rôle en 2014, alors dans une production de Lilo Baur seulement réutilisée ensuite à Lausanne. Huit ans plus tard, Sabine Devieilhe reprend le rôle et si la voix montre évidemment moins de juvénilité, elle a gagné en technique et affiche toujours une superbe agilité, pour un duo des fleurs déjà magnifique en début d'opéra avec la belle Mallika d'Ambroisine Bré, jusqu'à un air des clochettes d'une parfaite maîtrise des vocalises jusqu'au contre-mi. Superbe aussi pour le grand air de l'Acte I, où l'on pardonnera juste une petite inversion de texte inoffensive pour la musique, la soprano colorature porte son héroïne jusqu'à une touchante mort, à nouveau dans l'idée de sauver le Gérald de Frédéric Antoun.
Le ténor toujours charismatique accuse cependant une voix plus altérée, et si les ensemble et duos du début montrent encore un timbre agréable et un véritable lyrisme, il souffre plus dans son premier air, toutefois seulement émaillé dans l'aigu, quand la scène finale de l'acte II et encore plus l'acte III montrent souvent un chant détimbré, limité par le souffle en fins de phrases. Stéphane Degout pour Nilakantha présente bien plus d'aise, d'une voix particulièrement bien placée dans la tessiture de sa partition, à laquelle il offre également une ample présence scénique, notamment au deuxième acte. Des seconds rôles, Philippe Estèphe se fait remarquer dès le premier ensemble, duquel son Frédéric ressort par rapport aux quatre autres protagonistes, tandis que François Rougier se démarque par son émouvant mélodrame à la Scène 8 de l'Acte II. Dans la distribution féminine se retrouve toujours avec plaisir Mireille Delunsch, ici Mistress Bentson guindée dans une robe anglaise en accord avec la proposition scénique, bien accompagnée d'Elisabeth Boudreault pour Ellen et de la sémillante Marielou Jacquard pour Rose.
Le chœur Pygmalion accompagne le plateau par sa dynamique et un volume sonore conséquent lorsqu'il chante groupé face au public, avec pour avantage de donner du corps au peuple hindou, dont les parures contrastent par rapport aux vêtements guindés des Anglais. Aux costumes classiques n'hésitant pas à jouer la carte coloniale du livret, la proposition scénique de Laurent Pelly évite presque totalement les fleurs et la couleur, pour plonger l'action sur une scène nue, à laquelle sont seulement ajoutés des lampes de papiers et quelques éléments afin d'apporter une sobre touche d'exotisme. À ces décors (Camille Dugas) et lumières (Joël Adam) blancs s'accorde une dramaturgie soucieuse de bien caractériser les personnages, en plus de jouer la carte de l'opéra-comique, puisque c'est cette version, et non celle habituelle, qui est aujourd'hui choisie. Démarquée par ses textes parlés (adaptés par Agathe Mélinand) écrits pour être divertissants, la partition jouée dans l'édition Leduc perd seulement l'entracte entre les deux premiers actes ainsi que l'une des danses du ballet. Elle trouve avec Raphaël Pichon un flux continue toujours soucieux de stimuler le plateau, parfois altéré par les sonorités aigres des cuivres, mais rapidement ravivé par celles de la petite harmonie, à commencer par un magnifique piccolo.
Crédits photographiques : © S. Brion
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