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Christian Thielemann et la Staatskapelle de Dresde : Bruckner en Majesté

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Paris. Théâtre des Champs-Elysées. 2-VI-2022. Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonie n° 9 en ré mineur). Orchestre de la Staatskapelle de Dresde, direction : Christian Thielemann

En tournée avec la Sächsische Staatskapelle Dresden dont il est le directeur musical, livre au Théâtre des Champs-Elysées une lecture éblouissante de la Symphonie n° 9 d'.

Ultime symphonie du maitre de Saint Florian, véritable œuvre testamentaire, récapitulative, ambitieuse par son propos fortement spiritualisé, dédiée à Dieu, la Symphonie n° 9 est une composition hors normes, monumentale bien qu'inachevée (limitée à trois mouvements grandioses) qui n'est accessible qu'aux plus grands… , brucknérien reconnu de longue date, à la scène comme au disque, (deux intégrales à son actif avec Dresde et bientôt Vienne) et la qui connait son Bruckner sur le bout des doigts (l'Intégrale avec Jochum fait encore référence) répondent sans aucun doute à ce cahier des charges. Peut-être Bruckner, plus qu'aucun autre compositeur, craint-il la lourdeur et l'ostentation, aussi, conscient de ces écueils nous propose-t-il une lecture d'une grande beauté formelle, allégée, fluide, transparente et équilibrée qui concilie avec une souveraine justesse lecture analytique et globalité du discours.

Le premier mouvement rayonne par la clarté de sa texture et la rigueur de sa mise en place dans l'agencement des pupitres dont on ne sait qu'admirer le plus du lyrisme des cordes, d'une rare cohésion, des cuivres omniprésents solennels, mais bien contenus, des traits mystérieux de la petite harmonie ou de la véhémence, jamais gratuite, des percussions (timbales). Dans un flot musical continu, riche en nuances et plein d'allant le chef berlinois ne force pas le trait, dirige avec souplesse, laisse émerger les nombreux contrechants (cors), conduit les crescendos avec maestria, sans surenchère dans les effets de masse.

Le second mouvement, à type de Scherzo, impressionne par sa rythmique implacable (timbales et attaques de cordes) envoutante dans une marche inexorable des damnés, plus écrasante que cauchemardesque d'où émergent quelques épisodes d'un lyrisme éperdu (trio), parfois presque dansant, chanté par les cordes et les bois (hautbois) comme un relent d'espoir d'une humanité en quête de rédemption.

Dans l'Adagio final, celui de l'« Adieu au monde », Thielemann choisit la ferveur plus que le prosélytisme outrancier. Tout imprégné d'attente et de silences habités, il est conduit comme une longue prière recueillie, alternant lumière radieuse (cantilène des cordes et des tubas wagnériens) et zones d'ombre douloureuse (cuivres) avant qu'un immense crescendo recrutant tous les pupitres ne voit s'ouvrir les portes de l'Eternité annonçant la sérénité finale des épousailles avec Dieu dans une coda apaisée…Magnifique !

Une réserve toutefois : Pour un orchestre de cette notoriété, en tournée, on peut regretter amèrement la brièveté du programme : une heure, une seule œuvre ! En plagiant Cyrano de Bergerac on serait tenté de dire : « Ah ! non ! c'est un peu court Maestro !!! »

Crédit photographique : © Matthias Creutziger

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