« Nous sommes ici pour faire de l’art, pas la guerre », cette affirmation de Peter de Caluwe, le directeur de La Monnaie, résume les longues explications de l’institution bruxelloise qui vient de présenter sa nouvelle saison. Par « un concours de circonstances », les titres russes sont très présents dans cette future saison 2022/2023 (opéras, concerts et récital). Imaginant que « cette programmation puisse susciter des interrogations, voire des discussions ou de la consternation » , La Monnaie s’explique sur le maintien de ses choix tout en rappelant sa condamnation de la guerre et son soutien au peuple ukrainien et aux artistes qui défendent la paix. En voici quelques extraits :
« Le répertoire russe ne peut être interdit, mais doit continuer à être mis en scène et présenté. Le conflit actuel ne nous incite donc pas à modifier notre programmation. D’autant que les deux compositeurs dont l’œuvre lyrique et symphonique sera au cœur de notre saison ont été victimes des précédents régimes russes [ndlr : Tchaïkovski et Chostakovitch]. Nous ne pouvons imaginer les punir à nouveau pour leurs opinions, alors qu’ils défendaient les mêmes valeurs que celles que nous essayons de protéger aujourd’hui. »
« Bannir les artistes russes de nos théâtres ne contribuera pas, à mon sens, à faire un pas vers la paix. L’agression contre l’Ukraine par un régime violent ne doit ni entraver ni interrompre nos collaborations avec une communauté artistique qui s’engage pour la paix et les valeurs européennes communes. La culture et les arts restent parmi les meilleures recettes pour créer la solidarité, la compréhension et l’harmonie entre les gens, quelle que soit leur nationalité. Bien entendu, les artistes ou institutions qui soutiennent ouvertement les actions de Vladimir Poutine ne seront pas les bienvenus à La Monnaie. En même temps, nous ne pouvons pas forcer les artistes russes qui s’opposent à leurs dirigeants qui se fourvoient à faire des déclarations susceptibles de mettre en danger leur sécurité ou celle de leurs familles »
« Il est clair que nous jouons la carte de la cohabitation et de la collaboration multinationale et multiculturelle. Au cours de notre prochaine saison, des artistes russes et ukrainiens travailleront côte à côte. »
Côté opéra, la saison s’ouvrira par une nouvelle production de La Dame de Pique de Tchaïkovski (qui attendait depuis deux ans) par David Marton sous la direction musicale de Nathalie Stutzmann. Puis, Le Chevalier à la rose sera donné dans la production de Damiano Michieletto sous la direction d’Alain Altinoglu. En décembre, une création mondiale, commande de l’opéra : On purge bébé de Philippe Boesmans mis en scène par Richard Brunel avec Jodie Devos, Stéphane Degout et Julien Behr qui fera ses début à La Monnaie. Une nouvelle production d’Eugène Oneguine par Laurent Pelly, avec Stéphane Degout pour ses débuts dans le rôle-titre. Une autre création et commande avec Solar de Howard Moody. Après « Il Trittico » cette saison, ce sera le tour d’une « Tétralogie Tudor » de Gaetano Donizetti (initialement prévue cette saison) avec le metteur en scène Olivier Fredj et le chef d’orchestre Francesco Lanzillotta, et au menu une présentation conjointe d’Anna Bolena, Maria Stuarda et Roberto Devereux, avec notamment la soprano Myrtó Papatanasiu et le ténor Enea Scala. Henry VIII de Camille Saint-Saëns dans une mise en scène d’Olivier Py. Le Nez de Chostakovitch par Àlex Ollé dirigé par Gergely Madaras pour la première fois dans cette fosse.