L’absurde selon Pierre Rigal dans Même

Le chorégraphe et metteur en scène toulousain Pierre Rigal propose au Théâtre du Rond-Point à Paris une reprise de Même, créé en 2016 au festival Montpellier Danse, avec une équipe de danseurs et musiciens très soudés.

Pierre Rigal choisit le registre de l'absurde pour Même, qu'il construit autour de boucles sémantiques, musicales et chorégraphiques. Au ralenti ou en accéléré, voire en super accéléré, ses personnages répètent des mots du quotidien dans un simulacre de répétition. Ce fil conducteur est prétexte à des expérimentations techniques de superposition et de réverbération du son ou du mouvement, et cultive la légèreté dans les situations : déséquilibre, retour aux racines de l'évolution de l'homme, ou blocages émotionnels.

Si la mécanique théâtrale fonctionne particulièrement bien, le spectacle lui-même se répète à la fin, avec une impression de déjà-vu assumée par le scénario qui part d'une situation absurde, celle d'un accident de voiture qui aurait eu lieu et entraîné la mort d'un des personnages. « Vous êtes pris dans la boucle ? » interroge l'un d'eux, parlant du phénomène de désynchronisation des deux hémisphères qui donne une impression de déjà-vu. L'enjeu est alors de briser la boucle de l'infini qui les enferme dans un espace temporel bloqué.

Ces errements, dont les gags tournent parfois à vide à force d'être répétés, ne font rire que les interprètes, laissant le public un peu à côté. Du côté de la danse, cela mouline dans tous les sens, avec un certain goût pour l'imperfection. On est loin de l'efficacité de Système Castafiore qui sait créer un univers foisonnant et riche en surfant sur l'absurde. Dommage pour les musiciens de Microréalité, totalement imbriqués dans le spectacle, dont on entend à peine trois chansons. On salue cependant le talent et l'engagement intense et généreux de tous les interprètes, musiciens et danseurs.

Photos : © Giovanni Cittadini Cesi