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Besançon. Micropolis. 8-I-2022. Maurice Jarre (1924-2009) : Lawrence d’Arabie ; Nino Rota (1911-1979) : Le Parrain, La Strada ; Pascal Gaigne (né en 1958) : El sol del Membrillo, El Olivo ; John Williams (né en 1932) : Terminal, La Liste de Schindler, Harry Potter, E.T. ; Howard Shore (né en 1946) : Le Seigneur des anneaux ; Ennio Morricone (1928-2020) : Mission, Il était une fois en Amérique, Cinema paradiso ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Seduced and abandonned, Valse n°2 ; Mathieu Lamboley (né en 1980) : Arsène Lupin ; John Barry (1933-2011) : Danse avec les loups. Orchestre Victor Hugo, direction : Jean-François Verdier
Contraint de jouer seul en ligne en 2021, l'Orchestre Victor Hugo et son chef Jean-François Verdier, dans la grande salle de Micropolis, renouent avec leur traditionnel Concert du Nouvel An en public. Une soirée entièrement dévolue à la musique de film.
Tout indique aujourd'hui que la musique pour le cinéma est enfin regardée à la bonne hauteur par les grands orchestres qui n'hésitent plus à l'inscrire dans le fil de leur saison. Dans le sillage pionnier de Koyaanisqatsi et de La Belle et la Bête, la liste des ciné-concerts s'allonge jour après jour. Des compositeurs inspirés ont progressivement relégué dans les limbes de la calomnie l'idée qu'une musique de film ne pouvait s'écouter hors l'image, apportant à l'histoire du septième art comme à celle de la musique pléthore de chefs-d'œuvre. Les deux heures du programme, forcément partial, de l'Orchestre Victor Hugo lancent les dés du jeu du bon grain et de l'ivraie.
La récupération par l'image du génie mahlérien (immarcescible Adagietto de la Cinquième Symphonie pour l'immortel Mort à Venise de Visconti) ou chostakovien (l'Allegretto d'une autre Cinquième pour le plus méconnu Seduced and abandonned de James Toback) n'appelle aucune réserve. Le sommet Mission du très regretté Morricone (magnifié par le hautbois de Fabrice Férez et par son antinomique dialogue cordes/percussions) domine de très haut le film appliqué de Roland Joffé. Lancinant (le sublime thème recyclé du Parrain) ou entraînant (La Strada), Nino Rota est emballant et l'on rêve d'entendre un jour dans d'aussi luxueuses conditions d'interprétation son génial Défilé de mode ecclésiastique pour Fellini Roma. Le wagnérien Howard Shore parvient à faire se soulever les semelles de plomb de la saga Tolkien de Peter Jackson.
Le Lawrence d'Arabie de David Lean, qui ouvre en grand le concert, déroule le cinémascope de Maurice Jarre : une partition inféodée aux grands studios américains, comme celle du Danse avec les loups de John Barry, dont le thème ample et beau fait mouche malgré tout. John Williams enfonce ce clou hollywoodien et on s'agace, avant de s'interroger, quant au tapis rouge déroulé ce soir devant la manière du compositeur américain, quand son art d'artisan, au don mélodique assez terne, doit principalement sa renommée à sa pompière présence dans des blockbusters sans style véritable. Si le méconnu, et chostakovien, Viktor's Tale composé pour Le Terminal de Spielberg impose un solide métier (et le talent du clarinettiste Luc Laidet), pas de quoi s'enthousiasmer devant la palette mélodique limitée de la B.O. d'Harry Potter donnée en faux sommet d'une soirée qui aura, en revanche, su faire un peu de place à des compositeurs à la notoriété naissante (Mathieu Lamboley), ou encore dans l'ombre, comme Pascal Gaigne : les pièces de ce compositeur français ayant jusqu'ici surtout composé pour le cinéma espagnol (El sol del Membrillo exposant le très beau violoncelle de Sophie Paul Magnien et les arabesques fluides des cordes ; El Olivo) allient science orchestrale et inspiration mélodique. Pascal Gaigne étant présent dans la salle, on aurait été inspiré de lui offrir le partage des feux de la rampe.
Conduit par le geste stylé et swingué de Jean-François Verdier, l'Orchestre Victor Hugo au grand complet et en grande forme, introduit avec gourmandise par un très télévisuel Monsieur Loyal masqué de rouge, aura enchanté un public accouru, comme c'est l'usage, à guichets fermés. « On aurait pu faire 50 concerts rien qu'avec le seul Ennio Morricone », conclut malicieusement le maestro, après un vibrant hommage à la palette solistique de sa formation (outre ceux cités, le très pur violon de Jan Orawiec, les flûtes de Thomas Saulet et Mélisande Daudet, les trompettes de Pierre Kumor et Florent Sauvageot, le cor anglais de Suzanne Bastian). Alors, rendez-vous l'an prochain pour un nouveau concert dédié aux bandes (plus) originales?
Crédit photographique : © JC Polien
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Besançon. Micropolis. 8-I-2022. Maurice Jarre (1924-2009) : Lawrence d’Arabie ; Nino Rota (1911-1979) : Le Parrain, La Strada ; Pascal Gaigne (né en 1958) : El sol del Membrillo, El Olivo ; John Williams (né en 1932) : Terminal, La Liste de Schindler, Harry Potter, E.T. ; Howard Shore (né en 1946) : Le Seigneur des anneaux ; Ennio Morricone (1928-2020) : Mission, Il était une fois en Amérique, Cinema paradiso ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Seduced and abandonned, Valse n°2 ; Mathieu Lamboley (né en 1980) : Arsène Lupin ; John Barry (1933-2011) : Danse avec les loups. Orchestre Victor Hugo, direction : Jean-François Verdier