Un spectacle Dvořák avec les Tchalik pour lancer la Biennale du quatuor à cordes
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Paris. Cité de la Musique, Salle des concerts. 12-I-2022. Dvořák en Amérique. Antonín Dvořák (1841-1904) : Quatuor à cordes n°12 « Américain ». Pauline Lambert, livret. Anne Delrieu, coordination artistique et réalisation audiovisuelle. Alain Lenglet, comédien. Valli, voix off. Quatuor Tchalik
L'édition 2022 de l'événement a pour fil rouge le compositeur tchèque, et c'est un concert augmenté à destination d'un public familial qui ouvre le bal.
La musicologue, journaliste et autrice Pauline Lambert, qui s'est fait une spécialité des concerts commentés, et la réalisatrice Anne Delrieu ont sorti les grands moyens pour donner à l'auditeur toutes les clés de compréhension du Quatuor « Américain ». Un savant montage de vidéos actuelles et anciennes, un texte tantôt enregistré tantôt dit par le comédien Alain Lenglet, et des extraits musicaux venant tantôt des instruments du Quatuor Tchalik tantôt des hauts-parleurs : tout cela mène pendant une bonne demi-heure le public sur les traces d'Antonín Dvořák pendant son séjour américain et sur celles de la genèse de l'œuvre.
Alain Lenglet incarne Josef Kovařík, le secrétaire de Dvořák, et retrace les épisodes qui, à partir du télégramme de Jeannette Thurber demandant en 1891 au compositeur de venir prendre la direction du Conservatoire de New York, en passant par la traversée de l'Atlantique et un séjour éprouvant dans cette ville, le mènent à passer l'été 1893 à Spillville dans l'Iowa, parmi les émigrés tchèques, et à trouver l'inspiration pour composer en quelques jours ce chef d'œuvre de la musique de chambre. Le propos est volontiers didactique, mais le comédien parvient à l'aborder avec ce qu'il faut de naturel et de simplicité pour le rendre captivant. Sur scène, les frères et sœurs du Quatuor Tchalik illustrent le récit avec divers extraits musicaux, avant de détailler différents passages et thèmes du Quatuor « Américain » en illustration d'un propos qui, dans un second temps, se concentre davantage sur l'œuvre. Pauline Lambert est parvenue à isoler les différentes sources d'inspiration (la musique populaire tchèque, celle des afro-américains, des mélodies amérindiennes, les chants d'oiseaux, et même la musique d'église – au mitan du quatrième mouvement), sans pour autant verser dans le simplisme. L'inspiration personnelle d'un compositeur qui a su « laisser infuser en lui » tous ces motifs est bien soulignée.
L'apparat est luxueux (la voix enregistrée de Valli n'apporte pas grand-chose d'autre qu'une couleur locale) ; il serait bien vain cependant si le spectacle s'en tenait à cette analyse du Quatuor « Américain ». Heureusement, l'œuvre est donnée in extenso dans un second temps et, riche d'images et d'explications, on se laisse porter par cette musique si sublimement inspirée. À bien y réfléchir, il s'agit sans doute de l'œuvre idéale pour introduire le grand public au genre du quatuor à cordes. Encore faut-il que l'interprétation soit à la hauteur des promesses de la partition. En la matière, le Quatuor Tchalik réussit pleinement sa mission : cohérents et maîtres des difficultés techniques, les quatre musiciens s'accordent parfaitement pour entraîner l'auditoire dans l'élan rythmique et les beautés mélodiques de l'œuvre. En particulier, le Lento est superbement chantant, d'un lyrisme assumé, et la profondeur du violoncelle y fait merveille. Sans brutalité, les changements de rythme et d'ambiance sont bien marqués, spécialement dans le Finale si contrasté, que les musiciens concluent en une coda puissante et pleine de joie.
Crédits photographiques © Steve Murez
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Paris. Cité de la Musique, Salle des concerts. 12-I-2022. Dvořák en Amérique. Antonín Dvořák (1841-1904) : Quatuor à cordes n°12 « Américain ». Pauline Lambert, livret. Anne Delrieu, coordination artistique et réalisation audiovisuelle. Alain Lenglet, comédien. Valli, voix off. Quatuor Tchalik