Un Rheingold entre fantaisie et ennui pour ouvrir le nouveau Ring de l’Opéra de Stuttgart
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Stuttgart. Opernhaus. 16-XII-2021. Richard Wagner (1813-1883) : Das Rheingold, prologue de L’Anneau du Nibelung, livret du compositeur. Mise en scène : Stephan Kimmig ; décor : Katja Haß ; costumes : Anja Rabe. Avec : Goran Jurić (Wotan) ; Paweł Konik (Donner) ; Moritz Kallenberg (Froh) ; Matthias Klink (Loge) ; Leigh Melrose (Alberich) ; Elmar Gilbertsson (Mime) ; David Steffens (Fasolt) ; Adam Palka (Fafner) ; Rachael Wilson (Fricka) ; Esther Dierkes (Freia) ; Stine Marie Fischer (Erda)… Staatsorchester Stuttgart ; direction : Cornelius Meister
Une très bonne distribution ne fait pas oublier la direction molle de Cornelius Meister.
Le poids qui repose sur les épaules du chef n'est sans doute jamais aussi grand que pour le Ring. Aucune représentation ne peut réussir si le chef n'est pas là pour l'animer, et c'est bien là ce qui fait défaut ici avec Cornelius Meister, directeur musical de la maison. On pardonnerait encore volontiers un prélude où la prédominance des vents met en péril le mouvement général, mais c'est tout le spectacle qui est plongé dans une torpeur générale. Rien à voir avec l'ennui des prestations parisiennes de Philippe Jordan, qui découlait des à-coup perpétuels d'un chef qui cherchait le drame dans une succession de détails sans unité ; ici, il n'y a que le son qui compte, comme s'il s'agissait de garder une couleur commune du début à la fin, sans humour et sans surprises.
C'est d'autant plus regrettable que les chanteurs ont été remarquablement préparés, aussi bien scéniquement que musicalement. Goran Jurić en Wotan est sans doute celui qui pâtit le plus de ce contexte : on voit sans difficulté qu'il y a là l'étoffe d'un grand Wotan, mais il manque encore de vie. Matthias Klink est un Loge triste, calculateur, sans beaucoup d'ironie (mais il n'est pas aidé par la fosse), mais d'une impeccable tenue. Des Filles du Rhin très vivantes (et notamment Ida Ränzlöv, par la voix, le texte et le jeu), un bon Mime, des géants efficaces, confirment la qualité de ce travail, mais deux artistes se dégagent de cette distribution cohérente.
En Erda à bicylette, Stine Marie Fischer ne joue pas la déesse mère au premier degré, mais y ajoute une touche de fantaisie, et on comprend bien qu'elle excite la curiosité de Wotan. L'autre grande réussite de la soirée est l'incarnation d'Alberich par Leigh Melrose, acteur remarquable qui rend le ridicule du personnage au moins aussi bien que ses maléfices, très loin des incarnations plus noires que noir.
La direction d'acteurs, sans aucun doute, est le point fort de la mise en scène de Stephan Kimmig. Le Ring précédent de l'Opéra de Stuttgart, abondamment diffusé par le DVD et la télévision, avait marqué les esprits à une époque où les Ring en vidéo étaient encore rares – au point de devenir en France presque un symbole d'abomination pour les amateurs éplorés de carton-pâte. Ce nouveau Ring, comme l'ancien, est confié à plusieurs équipes de mise en scène ; ce spectacle d'ouverture, à défaut de convaincre par une véritable interprétation, est au moins un efficace divertissement. Kimmig choisit le cadre d'un cirque décati, ce qui n'est pas d'une folle originalité, mais il parvient à s'en servir sans en faire trop, ce qui n'est pas si fréquent. Le traitement comique de Donner et Froh, la suractivité d'Alberich, les manigances des filles du Rhin, une Fricka mordante et désabusée (Rachael Wilson) animent l'œuvre et n'attendent qu'un chef plus inspiré pour montrer à quel point l'humour est un outil fort pour faire ressortir les enjeux de L'Or du Rhin.
Crédits photographiques : © Matthias Baus
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