Hänsel et Gretel d’Humperdinck, un opéra participatif réduit
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Clermont-Ferrand. Opéra Théâtre. 26-XI-2021. Engelbert Humperdinck (1854-1921) : Hänsel und Gretel, conte théâtral adapté par Valérie Marestin. Mise en scène : Valérie Marestin. Lumières : Matthieu Delmonte. Avec : Coline Dutilleul, Hänsel ; Deborah Salazar-Sanfeld, Gretel ; Christine Craipeau, La Mère et la Sorcière ; Géraldine Jeannot, l’Homme au sable et l’Homme à la rosée. Eric Pisano, accordéon. Evelyne Robbe, violoncelle. Jean-David Paloyan, clarinette. Frédéric Durand, cor. Sylvain Souret, piano.
La salle comble de l'Opéra de Clermont-Ferrand prouve que l'annonce du spectacle a visé juste : c'est un nouveau jeune public qui attend avec impatience les aventures de deux personnages célèbres des contes de Grimm, mises en musique par Engelbert Humperdinck.
Au lieu de repriser des bas ou fabriquer des balais la faim au ventre, Hänsel joue aux jeux vidéos et Gretel surfe sur Facebook. Ce clin d'œil contemporain fait rire dès les premières minutes de la représentation, mais déçoit une fois que l'on comprend que cette allusion perdure et devient en vérité une « adaptation » lointaine du Märchenspiel initial. Que le texte en allemand soit traduit en français passe encore, qu'il soit « adapté » à un récit de nos jours aurait pu être un choix intéressant avec plus de matière (même si le spectateur attend plus la magie du conte que sa réalité quotidienne en allant voir Hänsel und Gretel), mais l'allègement des cinq tableaux en une heure à peine de spectacle (contre trois heures initialement), la trame orchestrale conséquente se réduisant à un petit ensemble d'instrumentistes réunis autour d'un accordéon, la mise en scène quelque peu sommaire avec un décor unique (une maison à étage transformable et démontable) assez éloigné de la féerie attendue, sont justifiés par Valérie Marestin, à l'origine de cette adaptation, par la volonté « de conquérir leur innocente écoute en se mettant à leur portée ». C'est bien vite oublié – ou méconnaître -, l'origine de cet ouvrage lyrique qui s'inscrit pleinement dans la tradition germanique d'opéra pour enfants, celui-ci étant aussi incontournable que le Casse-noisette de Tchaïkovski chez nos voisins allemands. Pourquoi alors une adaptation quand cette œuvre a été écrite précisément pour de jeunes oreilles, ce spectacle étant même annoncé pour les enfants de 7 ans et plus ?
L'écriture complexe d'Engelbert Humperdinck ne gagne pas en accessibilité puisqu'elle l'est déjà, mais l'approche wagnérienne de l'écriture par les leitmotiv et leur variation et la découverte de la luxuriance orchestrale pour un public de non-initié passent à la trappe, tout comme la variété des atmosphères orchestrales en découlant, alors que le riche talent mélodique du compositeur qui fait la force de cet ouvrage, inspiré du folklore, est largement atténué par ce parti-pris. L'absence du père de famille – justifiée par le besoin de présenter une famille monoparentale ! – a pour conséquence la disparition de plusieurs richesses de l'ouvrage, comme le thème de la « chevauchée » (Eine Hex) qui génère le superbe interlude entre les deux tableaux.
Les quatre solistes sont ainsi confinés dans un spectacle pour enfants des plus classiques, où l'on s'intéresse plus à la qualité de la projection et de la diction de Coline Dutilleul (Hänsel) et Deborah Salazar-Sanfeld (Gretel) afin de s'assurer que les enfants comprennent parfaitement la trame de l'histoire, plutôt que par la démonstration de leurs qualités vocales et scéniques. Dans cette démarche, les aigus de Christine Craipeau (La Mère et la Sorcière) pourraient être moins ardents pour de jeunes oreilles, alors que Géraldine Jeannot (L'Homme au sable et l'Homme à la rosée) a pour principale mission de faire chanter une salle non préparée à l'exercice : facile quand il faut simplement répéter le chant de l'homme au sable ou l'homme à la rosée en découpant chaque phrase, beaucoup moins évident lorsque le public découvre la mélodie et les paroles du chant de victoire d'Hänsel et Gretel, les jeunes spectateurs marmonnent alors tant bien que mal malgré toute leur bonne volonté. Bref, beaucoup de maladresses qui atténuent la magie d'un Märchenoper qui n'en est pas dépourvu.
Crédits photographiques : © Cédric & Mickaël / Studio Delestrade
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Clermont-Ferrand. Opéra Théâtre. 26-XI-2021. Engelbert Humperdinck (1854-1921) : Hänsel und Gretel, conte théâtral adapté par Valérie Marestin. Mise en scène : Valérie Marestin. Lumières : Matthieu Delmonte. Avec : Coline Dutilleul, Hänsel ; Deborah Salazar-Sanfeld, Gretel ; Christine Craipeau, La Mère et la Sorcière ; Géraldine Jeannot, l’Homme au sable et l’Homme à la rosée. Eric Pisano, accordéon. Evelyne Robbe, violoncelle. Jean-David Paloyan, clarinette. Frédéric Durand, cor. Sylvain Souret, piano.