Nguci, Goerner et Grosvenor au Festival de piano de la Roque d’Anthéron 2021
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La Roque d’Anthéron. Festival international de piano
9-VIII-2021, auditorium du parc : Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concertos pour piano et orchestre n° 20 K. 466, n° 21 K. 467. Marie-Ange Nguci, piano ; Sinfonia Varsovia, dir. Arie van Beek
10-VIII-2021, auditorium du parc : Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Fantaisie chromatique et fugue en ré mineur BWV 903. Franz Schubert (1797-1828) : 4 Impromptus opus 142. Isaac Albéniz (1860-1909) : Ibéria, 4e cahier. Nelson Goerner, piano
11-VIII-2021, auditorium du parc : Franz Liszt (1811-1886) : Sonnets de Pétrarque 104 et 123, extraits des Années de pèlerinage, 2ème année (Italie) ; Sonate en si mineur. Alberto Ginastera (1916-1983) : Dansas argentinas opus 2. Maurice Ravel (1875-1937) : Gaspard de la nuit. Benjamin Grosvenor, piano
Le Festival de la Roque d'Anthéron honore cette année Marie-Ange Nguci, Nelson Goerner et Benjamin Grosvenor. L'accueil des cigales, l'ombre des platanes et le vol erratique des chauves-souris opèrent toujours la même magie dans ce temple ouvert dédié au piano roi.
Marie Ange Nguci donne dans les Concertos n° 20 et n° 21 de Mozart une nouvelle démonstration de sa virtuosité et de sa douce élégance. Mais sa maturité artistique est encore plus surprenante. La délicatesse de son approche fait ressortir avec acuité des contrastes étonnamment modernes (les cadences des Allegro, par exemple), et ses Andante ou Larghetto, délicieusement intériorisés, sont marqués d'une pointe de nostalgie qu'on n'attendait pas d'une si jeune interprète. Le Sinfonia Varsovia, qui a beaucoup gagné en cohésion et en précision, l'accompagne poliment sous la direction efficace de Arie van Beek, mais sans dépasser l'esthétique galante alors que Nguci nous entraine dans les tensions d'un Sturm und Drang intense. Le public, enthousiasmé par autant de charme et de brillance réclame des bis. Les ondoiements de La Barque sur l'océan de Ravel et une prodigieuse partita de Froberger confirment la maîtrise étonnante de Nguci, que ce soient des couleurs ou de l'architecture interne des pièces. Aucun doute : cette puissante et fine dentelière a rendez-vous avec J.S. Bach.
Nelson Goerner, lui, n'est plus au début de sa carrière. Il y a atteint une sorte d'apogée solaire, dans une maitrise totale de tous les paramètres du jeu pianistique. Sa Fantaisie chromatique de Bach montre l'extrême raffinement de chaque attaque, de chaque phrase, de chaque respiration, de chaque couleur, tout en donnant à l'ensemble une subtile illusion de spontanéité. La même fraîcheur, la même sérénité prévaut dans les Quatre Impromptus op 42 de Schubert, certes brillants, mais surtout lumineux, avec un jeu clair, un perlé de velours et une dynamique parfaitement posée. Dans l'Iberia d'Albeniz, le maître donne libre cours à son énergie et à sa poésie. La luxuriance végétale de Malaga couvre à peine sa puissance tectonique, et les jeux de lumière continuent à nous enivrer. Dans Jerez et Eritana, Goerner déclenche des orages auxquels font suite des silences denses de bonheur. Pour remercier le public de ses nombreux vivats, Nelson Goerner lui octroye notamment un Nocturne n° 20 de Chopin d'une douceur et d'une profondeur infinies. Une heure inoubliable avec un grand seigneur du piano.
Benjamin Grosvenor est connu pour ses interprétations de Franz Liszt. Il donne des Sonnets de Pétrarque une vision introspective, virtuose et transparente. C'est dans la Sonate en si mineur que le pianiste lâche ses grands chevaux : violences et fulgurances, alternent avec des méditations et des prières, dans une carte du cœur et de l'âme romantique magnifiquement variée, agitée et inspirée. Un grand moment. Si son accointance avec Liszt est évidente, elle l'est un tout petit moins avec Ravel. Non que le Gaspard de la nuit manque de virtuosité ou de couleur, mais ce parti-pris d'expression décomplexée, impétueuse, s'il va bien à Liszt, nuit à l'émergence de certaines subtilités ravéliennes. Mais cette petite réserve n'oblitère pas le bonheur d'une excellente soirée.
Crédits photographiques : © Valentine Chauvin
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La Roque d’Anthéron. Festival international de piano
9-VIII-2021, auditorium du parc : Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concertos pour piano et orchestre n° 20 K. 466, n° 21 K. 467. Marie-Ange Nguci, piano ; Sinfonia Varsovia, dir. Arie van Beek
10-VIII-2021, auditorium du parc : Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Fantaisie chromatique et fugue en ré mineur BWV 903. Franz Schubert (1797-1828) : 4 Impromptus opus 142. Isaac Albéniz (1860-1909) : Ibéria, 4e cahier. Nelson Goerner, piano
11-VIII-2021, auditorium du parc : Franz Liszt (1811-1886) : Sonnets de Pétrarque 104 et 123, extraits des Années de pèlerinage, 2ème année (Italie) ; Sonate en si mineur. Alberto Ginastera (1916-1983) : Dansas argentinas opus 2. Maurice Ravel (1875-1937) : Gaspard de la nuit. Benjamin Grosvenor, piano