Daniil Trifonov et Andris Nelsons à Leipzig : pour que la joie demeure…
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Allemagne. Gewandhaus de Leipzig. 9-IV-2021. Samuel Barber (1910-1981) : Adagio pour orchestre à cordes ; Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791 : Concerto pour piano et orchestre n° 25 en ut majeur K. 503 ; Robert Schumann (1810-1856) : Symphonie n° 1 en si bémol majeur op. 38 dite « Printemps ». Daniil Trifonov, piano. Orchestre du Gewandhaus de Leipzig, direction : Andris Nelsons
Concert sans public, enregistré en direct, diffusé sur Arteconcert
Pour faire face à la morosité actuelle liée à la pandémie, Andris Nelsons et l'Orchestre du Gewandhaus de Leipzig nous invitent à un concert plein d'espérance associant le célèbre Adagio pour cordes de Barber, le Concerto pour piano n° 25 de Mozart avec Daniil Trifonov en soliste et la Symphonie n° 1 « Frühling » de Robert Schumann.
Faisant presque figure d'intrus dans ce programme empreint de vitalité et d'optimisme, l'Adagio pour cordes de Samuel Barber ouvre la soirée. Célébrissime, composée en 1938 à partir du mouvement lent du Quatuor à cordes n° 1, cette courte pièce, à l'émotion facile et à la passion contenue, a fréquemment été galvaudée, réduite à un pathos léthargique par nombre de chefs. Hélas, ce soir, Andris Nelsons et les cordes du Gewandhaus ne font pas exception à la règle : certes la sonorité est magnifique et la polyphonie limpide, mais la lecture parait assez convenue, plate et statique et l'ardent crescendo semble bien timide, à mille lieues de l'interprétation déchirante d'un Bernstein par exemple.
D'un climat bien différent le Concerto pour piano n° 25 de Mozart rayonne de sa vitalité conquérante sous les doigts de Daniil Trifonov. Une œuvre de la maturité (1786) qui marque le terme de la période heureuse des années 1784-1786. Contemporain de la Symphonie n° 38 « Prague », il se caractérise, curieusement comme elle, par l'absence de clarinette dans son instrumentarium. Après une introduction très cantabile laissée aux seuls soins de l'orchestre, l'Allegro maestoso séduit par la souplesse et l'élégance du jeu de Trifonov dans un dialogue serré avec la phalange saxonne qui va rapidement tourner à l'avantage du soliste. Comme à son habitude le pianiste russe se montre très démonstratif, presqu'illuminé, alliant une virtuosité envoûtante, une grande fluidité des phrasés et une infinie palette de couleurs qui trouveront leur sommet dans une cadence originale signée de sa main. Annoncé par le basson, le cor et la flute, gracieux, presque galant l'Andante déploie une musicalité subtile et poétique où Trifonov dans un tempo très retenu habite les silences, précédant un Finale Allegretto dévastateur où le piano jubilatoire se taille encore une fois la part du lion concluant, avec éclat une interprétation magistrale en parfaite symbiose avec l'orchestre. Le fantasque Rondo en ut mineur de CPE Bach, donné en « bis » conclut de superbe façon, dans un clin d'œil cette première partie.
La Symphonie n° 1 de Robert Schumann dite « Printemps » reste fidèle au thème de la soirée. Composée en 1841 dans les suites de son mariage tant attendu avec Clara, elle constitue un véritable message d'amour. Hélas ce soir, Andris Nelsons a l'amour triste, car contrairement au concert donné en 2019 à la Philharmonie de Paris avec le même orchestre, le chef ne parvient pas à aérer suffisamment la pâte sonore, nous livrant de cette partition bondissante et pleine de vie une vision bien pâlichonne et pesante ! L'éclosion du printemps tarde à apparaitre sous la baguette du chef letton et l'Andante-Allegro initial peine à prendre son envol, malgré de belles performances solistiques individuelles (bois) et collectives (cordes). Le Larghetto manque quelque peu de lyrisme et de légèreté tandis que le Scherzo perd son âme dans des contrastes et nuances trop émoussés. Le Finale retombe dans les mêmes travers que le premier mouvement, sombrant dans une lourdeur accablante ponctuée par cuivres et timbales tonitruantes…Bref, une interprétation qui aurait pu grandement bénéficier d'une lecture plus allégée pour que la joie demeure !
Crédit photographique : Daniil Trifonov © Jennifer Taylor
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Allemagne. Gewandhaus de Leipzig. 9-IV-2021. Samuel Barber (1910-1981) : Adagio pour orchestre à cordes ; Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791 : Concerto pour piano et orchestre n° 25 en ut majeur K. 503 ; Robert Schumann (1810-1856) : Symphonie n° 1 en si bémol majeur op. 38 dite « Printemps ». Daniil Trifonov, piano. Orchestre du Gewandhaus de Leipzig, direction : Andris Nelsons
Concert sans public, enregistré en direct, diffusé sur Arteconcert