La classe d’Alexandre Kalioujny en DVD : une leçon de maître

La transmission orale est l'élément crucial sur lequel repose l'enseignement de la danse. L'enregistrement sur DVD des classes des maîtres permet d'en conserver un témoignage précieux pour les générations à venir.

Alexandre Kalioujny a laissé une forte empreinte en tant que maître de danse à l'Opéra de Paris en assurant une classe pour les Étoiles de la compagnie. L'école de danse de l'Opéra met à disposition ses élèves dirigés par Élisabeth Platel et Charles Jude pour l'apprentissage des classes de ce danseur émérite.

Il convient peut-être de commencer, une fois n'est pas coutume, la lecture du DVD par les bonus qui sont fournis et qui consistent en des entretiens inédits avec Noëlla Pontois, Attilio Labis, Gil Isoart. En effet, Kalioujny est peu connu de la génération actuelle. Il est donc intéressant d'avoir fait appel aux témoins de la vie de cet homme, d'évoquer les anecdotes du séducteur qu'il était, son parcours en tant que danseur étoile sous l'ère Lifar, ses rapports avec Noureev, comme lui Russe expatrié. Il y a eu en 1985 l'idée de recenser ses cours, mais Kalioujny est décédé avant l'aboutissement du projet et, désormais, près de trente-cinq ans plus tard, il s'agit de sauvegarder cette mémoire encore vivante dans l'esprit de Mme Platel et de M. Jude. Il est émouvant d'entendre les lignes directrices qui lui servaient à élaborer ses exercices, dont Élisabeth Platel souligne la modernité pour l'époque (notamment ceux avec des changements de directions au sein du même exercice). Les bonus permettent également de caractériser rapidement la spécificité de l'enseignement de Kalioujny, qui semblait être peu prolixe, ne laissant que très peu d'indications de bras afin que l'élève soit en mesure d'élaborer lui-même avec fluidité la coordination nécessaire à trouver pour ce travail spécifique. Enfin, l'importance de la puissance est soulignée chez les filles qui bénéficient des mêmes exercices que les garçons.

L'objet principal du DVD est les classes elles-mêmes, qui se déroulent avec le concours des élèves des divisions supérieures de l'école de danse de l'Opéra, dans la succession classique d'une leçon de danse. L'importance du plié est motivée par le fait de constituer un travail préparatoire indispensable pour le reste du cours. Élisabeth Platel et Charles Jude attirent l'attention sur le travail du talon posé à terre, les transferts de poids du corps, la spécificité des ports de bras en couronne quand la jambe est levée. Ils sont également capables de relever les choses que Kalioujny privilégiait moins dans ses exercices, tels que les frappés (qui étaient manifestement toujours construits de la même façon). Les deux professeurs s'accordent à dire que Kalioujny envisageait la répétition comme l'origine du travail de mémorisation et d'apprentissage progressif dans le corps des pas complexes, sans trop d'explications verbales : c'est ainsi que les pas travaillés à la barre étaient repris au milieu, dans le même ordre.

Le pivot central du cours est l'adage, très dansant, fluide, mais également machiavélique avec des combinaisons réalisées en-dehors puis en-dedans.

Ce DVD s'adresse donc en premier lieu aux professeurs et élèves de danse qui pourront y puiser une inspiration pour leur travail, mais son visionnage ne manque pas d'intérêt pour découvrir le personnage auquel il rend un hommage appuyé par le biais de ses élèves qui en ont gardé un souvenir émerveillé.