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Paris. Auditorium du Louvre. 13-I-2021. Oeuvres de Jean-Baptiste Lully (1632-1687) ; Charles Tessier (ca.1560- après1610) ; Etienne Moulinié (1599-1676) ; Joseph-Marie Amiot (1718-1793). Claire Lefilliâtre, soprano ; David Tricou et Serge Goubioud, ténors ; Geoffroy Buffière, basse. Orchestre du Poème harmonique, direction : Vincent Dumestre
Concert sans public, diffusé en direct sur la chaîne YouTube du musée du Louvre
L’Auditorium du Louvre poursuit sa diffusion en direct des rendez-vous musicaux programmés dans le cadre des Concerts du midi. Le Poème harmonique de Vincent Dumestre présente un programme qui illustre le goût de l’exotisme oriental dans la musique française du XVIIᵉ siècle.
L’Europe est, depuis le XVIᵉ siècle, férue d’exotisme, sous l’influence de la découverte du Nouveau Monde et des routes de la soie. Alors que le Saint-Empire germanique est en guerre contre les Ottomans, la mode des turqueries atteint la cour de France dès le début du XVIIᵉ siècle. Le premier exemple nous en est donné par les Carnets de voyages de Charles Tessier (1604), auxquels le Poème harmonique a consacré un disque mémorable en 2007. L’autre exemple est la célèbre Marche pour la cérémonie des Turcs de Lully dans la comédie-ballet du Bourgeois gentilhomme. Mais Vincent Dumestre a choisi des chemins moins fréquentés pour son voyage exotique. Du Ballet des Nations, il a retenu les Entrées des Italiens et des Espagnols, nous emmenant aussi du côté des Suisses et des Grecs dans d’autres ballets, et jusqu’en Afrique avec la Chaconne de Cadmus et Hermione. Le dépaysement sera plus complet avec une chanson chinoise rapportée en Europe au XVIIIᵉ siècle par le missionnaire jésuite Joseph-Marie Amiot : elle est ici précédée par une introduction au gong et aux cloches frappées par le percussionniste Joël Grare assisté de Jérémie Papasergio, qui a troqué ses instruments à vent pour cette improvisation originale.
Dans son introduction, Vincent Dumestre nous explique que, comme Dürer « inventait » son rhinocéros pour une représentation des plus fantaisistes, Tessier et Lully inventent leurs propres visions des turqueries. Ainsi, les Chansons turquesques de Tessier sont prétexte à des interludes de violon aux harmonies arabisantes. Quant à sa Chanson suissesse, il s’agit d’un intermède burlesque construit sur des onomatopées accompagnées par les pizzicati des cordes. Les quatre chanteurs de l’ensemble, alternant interventions solistes et formation de chœur, sont parfaitement rodés à ce répertoire. Les airs en français sont prononcés dans la diction de l’époque, ajoutant ainsi une touche d’exotisme au répertoire du XVIIᵉ siècle français. On retrouve avec plaisir la voix ample de Claire Lefilliâtre, et la basse profonde et souple de Geoffroy Buffière. Ils font merveille dans la scène des adieux de Camus et Hermione. Le plaisant « Air du Juif errant » d’Etienne Moulinié est introduit par une sonnerie imitant le chophar. Et dans l’Entrée des Espagnols de Lully, les trois voix d’hommes se déchainent sur un accompagnement de castagnettes ; on remarquera particulièrement la belle théâtralité du ténor David Tricou.
Les instrumentistes semblent heureux de prendre part à cette joyeuse anthologie, sous la direction toujours très précise de Vincent Dumestre. Les changements rythmiques des danses sont très convaincants, et la chaconne de Cadmus et Hermione est un grand moment. Un bis, choisi entre deux titres par les internautes, nous permet d’entendre un air de cour de Pierre Guédron pour lequel le chef retrouve sa guitare, et se termine par un pianissimo de cordes pincées : « Vivons libres et contents », ce pourrait être un beau programme pour un avenir meilleur.
Crédit photographique : © Philippe Delval
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