Les mélodies de Chopin par le duo Camarinha-Héreau : une réussite
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Frédéric Chopin (1810-1849) : Mélodies op. posth. 74. Franz Schubert (1797-1828) : Sehnsucht D. 359 ; Mignon I D. 726 ; Mignon II D. 727 ; Gesänge aus Wilhelm Meister D. 877. Raquel Camarinha, soprano ; Yoan Héreau, piano. 1 CD Mirare. Enregistré dans la grande salle de l’Arsonic à Mons (Belgique) du 14 au 20 janvier 2019. Textes en polonais, notes de présentation et traductions en français, allemand et anglais. Durée : 64:00
MirareAprès un bel album de mélodies françaises et en attendant un autre disque de lieder, le duo Camarinha-Héreau nous propose l'intégrale des mélodies de Chopin. Le travail, venant d'une non-polonaise, est à saluer. Le résultat est incontestablement une réussite, même s'il ne bouscule pas vraiment la solide discographie d'une œuvre encore peu connue des mélomanes français.
C'est d'ailleurs plutôt étrange, qu'un tel cycle de mélodies soit aussi peu joué dans nos salles. Est-ce la langue polonaise qui rebute, ou la faiblesse des traductions allemandes longtemps utilisées, ou encore la rareté des chanteurs polonais ? Ce n'est en tout cas pas la beauté des mélodies qui devrait s'opposer à leur popularité : les climats créés sont typiquement romantiques et même un peu patriotiques, fortement ancrés dans un terroir idéalisé, et donc faciles d'accès. Quant à l'écriture pianistique, elle est d'un très haut niveau d'expressivité. C'est du grand Chopin.
Raquel Camarinha n'a pas froid aux yeux, et n'a pas peur de travailler une langue a priori plutôt éloignée de son idiome natal. Le résultat est assez satisfaisant, nous a dit un ami polonais. Un auditeur français sera sensible à la fluidité du texte, à la fraicheur de la voix et aux intentions qu'elle parvient à faire passer dans son chant. Car ce n'est pas un simple bouquet de fleurs qui nous est proposé : ce sont de vrais poèmes, de vraies émotions qui émergent de chaque mélodie. Avec délicatesse, qu'il s'agisse du deuil, de l'humour, d'une griserie ou de la peur de ne plus revoir sa terre natale, Raquel Camarinha va au-delà de la joliesse, au cœur de chaque texte. Sans doute le caractère un peu acidulé de sa voix limite l'éclosion de cette nostalgie romantique que savait y mettre une Teresa Żylis-Gara, mais sa spontanéité juvénile est de bon aloi et vivifie ces instantanés émotifs et poétiques.
Le grand artisan de cette réussite est le pianiste Yoan Héreau. Son jeu tour à tour brillant et réflexif, passionné ou intériorisé, léger ou dramatique fait merveille à chaque mélodie. On voudrait l'entendre nous jouer les Nocturnes du même Chopin. Avec cet art de la nuance et des dynamiques, c'est lui qui traduit le mieux tous les états d'âme de ce corpus admirable, et qui porte indéfectiblement sa partenaire.
En complément de programme, les deux jeunes gens nous offrent quelques beaux Schubert. On y trouvera les mêmes qualités de fraîcheur, d'intelligence et d'engagement, mais cette fois-ci, la médiocrité de l'allemand devient problématique. Si pour Schubert l'ombre de Schwarzkopf, Christa Ludwig et tant d'autres rend la démarche difficile, pour Chopin, l'antériorité – voire la suprématie – d'Ewa Podleś, Dorothée Mields et Hana Blažíková ne fait pas un trop grand ombrage.
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Frédéric Chopin (1810-1849) : Mélodies op. posth. 74. Franz Schubert (1797-1828) : Sehnsucht D. 359 ; Mignon I D. 726 ; Mignon II D. 727 ; Gesänge aus Wilhelm Meister D. 877. Raquel Camarinha, soprano ; Yoan Héreau, piano. 1 CD Mirare. Enregistré dans la grande salle de l’Arsonic à Mons (Belgique) du 14 au 20 janvier 2019. Textes en polonais, notes de présentation et traductions en français, allemand et anglais. Durée : 64:00
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