Éruptif Hofesh Shechter aux Abbesses

Le Théâtre de la Ville maintient des représentations diffusées en live sur différentes plateformes de partage de vidéos. La jeune compagnie Hofesh Shechter II, composée de danseurs de différentes nationalités et âgés de 21 à 25 ans, danse pour quatre soirées Political Mother, dont la création remonte à 2010.

Tout commence par le seppuku solennel d'un samouraï, accalmie avant la tempête sonore dont est coutumier Hofesh Shechter. L'immersion sonore sursaturée dans lequel travaille habituellement le chorégraphe ne peut évidemment pas être rendue avec la même puissance qu'en salle, mais le fait que le spectacle soit dansé en direct permet toutefois de rendre l'urgence de la scène. Le nombre de danseurs augmente au fur et à mesure de la pièce, dans une explosion de lumière et de sons.

Le langage de Shechter est volcanique et tellurique, dans une grande liberté de mouvement et respectant le rythme des phrases musicales, répétitives et dans une obnubilation entêtante. Shechter maîtrise de façon aussi heureuse les danses à deux danseurs que celle de groupe dans des mouvements de masse hypnotisants, mais semble moins intéressé par la performance individuelle qu'il utilise assez peu.

La danse est éclatante dans les moments de musique percussive mais semble devoir se civiliser quand c'est Bach qui est en fond sonore. Hofesh Shechter a intégré pour cette nouvelle version de cette pièce des bandes vidéo sur fond sombre, haranguant la foule de façon véhémente. La réalisation vidéo est très aboutie en cela qu'elle accompagne les danseurs sans brider le regard du spectateur, et c'est d'autant plus un exploit qu'il s'agit d'un spectacle en direct pour lequel la dimension tribale peut compliquer la captation. Sorti des décibels tonitruants, la bande son laisse des temps de sidération, accompagné par le ralentissement des mouvements des danseurs.

Cette alternance de passages contemplatifs et bienheureux avec la majorité du reste de la pièce expose à l'idée que la violence ne se situe pas nécessairement dans ses manifestations les plus bruyantes…

Crédits photographiques : © Hofesh Shechter company