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À Manifeste, le concert du Cursus sur grand écran

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Paris. Centre Pompidou, Cinéma 1. 4-IX-2020. Concert du Cursus : œuvres d’Antonio Tules, Kayla Cashetta, Ko Sahara, Maxime Mantovani, Sofia Avramidou, Oren Boneh, Fernando Manassero, Paul Ramage, Justina Repečkaitė, Claudia Jane Scroccaro

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Rendez-vous incontournable à avec les étudiants du « Cursus » de l'Ircam : dix compositeurs du monde entier venus durant une année travailler auprès des maîtres et des logiciels de l'Institut de recherche. 

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En cette année particulière, les œuvres des dix jeunes compositeur.trice.s (moins de 37 ans) qui auraient dû être créées le 10 juin dernier lors d'un concert au Centquatre-Paris, ont fait l'objet d'une captation audiovisuelle par le collectif Année Zéro (Benoît Martin et Guillaume Foresti) dans la Grande salle du Centre Pompidou du 30 juin au 3 juillet. Pour l'heure, le public est convié à la projection sur grand écran de ces créations filmées. Si les conditions acoustiques de la salle de cinéma 1 du Centre Pompidou sont malheureusement assez médiocres, on pourra (ré)entendre les pièces de manière optimale sur la chaîne Youtube de l'Ircam les 7 et 8 septembre à 20h30, en écoute binaurale puis en streaming sur medias.ircam.fr.

Des cinq premières œuvres entendues dans la première partie de la soirée, pointons d'abord celle du japonais (né en 1989), Twinkle Twinkle, Little Star (« Ah! Vous dirai-je maman »), sans doute une des premières pièces à sceller l'union de l'accordéon microtonal de (conçu en 2015) et l'électronique. Le compositeur, qui présente sa pièce à l'écran comme chacun de ses collègues, dit avoir cherché la lumière (Twinkle veut dire scintillement) en réalisant un travail très fin sur les textures ultrachromatiques de l'accordéon, sphère lumineuse magnifiquement révélée par l'interprète à laquelle l'électronique confère l'aura de résonance dont est privé l'instrument.

Très sophistiquée, Existentia célèbre l'absence nous dit (1984). La pièce sollicite la vidéo en temps réel, un disklavier, la voix enregistré de Jean-Christophe Brizard (sur un texte de Christophe Manon) et le saxophone baryton augmenté par l'électronique. L'écriture instrumentale se veut une transposition du langage parlé, la voix du récitant étant entendue seule au départ. Au sein d'une polyphonie de timbres et un espace sonore foisonnant, le saxophone, sous les doigts experts de , découvre un spectre sonore somptueux que vient magnifier l'électronique. Fallait-il vraiment faire revenir la voix à la fin ?

Flavien Laffaille est au piano dans Vallée du Français Antonio Tules (1990), une pièce qui développe la notion de « piano-espace » via l'étirement des registres et l'amplification de la résonance que permettent les ressorts de l'électronique. Reach pour soprano et électronique de l'États-unienne (1991) tire sa matière sonore du poème en anglais de Séverine Daucourt, engendrant un souffle singulier et un univers onirique où la voix de est traitée par l'électronique en temps réel. La violoncelliste a deux archets en main pour mener l'aventure sonore exploratoire de Keep digging the hare hole (Continue à creuser le trou du lapin) de la compositrice grecque (1988) s'inspirant des Aventures d'Alice au pays des merveilles. L'électronique en temps différé tend à fusionner avec la partie instrumentale très bruitée pour créer des textures mouvantes et une profondeur de champ suggestive.

Alvise Sinivia

L'ironie et la distance sont à l'œuvre dans Her Majesty the Fool de l'États-unien (1991) qui débute la seconde partie de la soirée : spectaculaire et à haut voltage, la pièce est jouée par sur le deuxième accordéon microtonal de la soirée (réunis, ils forment le duo Xamp), traité sans ménagement par le compositeur – l'électronique aidant – dans un espace de lutte musclée. Rejoignant la performance du DJ, The Moth (Papillon de nuit) de l'Argentin Fernando Manassero (1984) convoque, avec l'électronique, une platine vinyle et divers accessoires (tige, aiguille, etc.) qui viennent titiller les sillons et perturber le mouvement rotatoire, entre matière saturée, jeu de registres et fluctuations de couleurs. La réalisation est confiée au percussionniste . Le contrebassiste nous fait voyager au cœur du son dans I sing the body electric de l'Italienne (1984), une fantasmagorie sonore qui balance entre transparence et son saturé. L'interprète détend sa corde grave pour chercher sous son archet la vibration, les moirures du son et les battements entre les fréquences qu'il donne à entendre avec beaucoup de délicatesse et de sensibilité. Temps réel et temps différé convergent dans Transduced pour trois caisses claires, transducteurs et électronique de la Lituanienne (1989) qui traque le son de ses instruments, de la membrane externe vibrante à la résonance au centre de la caisse grâce aux micros de contact et aux transducteurs. Sous le geste du percussionniste s'élabore progressivement un espace multidimensionnel engageant une véritable dramaturgie sonore.

De Paul Ramage, enfin, Fragments d'une fin est une pièce écrite pour et en collaboration avec le pianiste et performeur , déjà présent dans l'édition 2019 de Manifeste. La pièce convoque un piano électroacoustique CP-80 et l'électronique. C'est un monde étrange qui nait sous le geste du performeur, une mosaïque de sons inouïs flottants dans un espace discontinu où passent le texte de Lancelot Hamelin et la voix singulière de . Fragments d'une Fin est en effet le socle d'un projet beaucoup plus vaste, Le Hurle, d'après l'histoire de Hamelin, une fable de science-fiction engendrant une réflexion sur la trace et la mémoire, qui sera créée en novembre prochain dans le cadre du festival Mesure pour Mesure.

Crédits photographiques :  © Chaehong Lim ; © alvisesinivia.com

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