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Danseurs du Ballet de l'Opéra de Paris, Marion Barbeau et Simon Le Borgne ont profité de la période de confinement pour faire mûrir leurs projets. Un temps empêché mais fertile, où ils ont maintenu l'entraînement quotidien par visioconférence.
ResMusica : Vous avez profité du confinement pour créer un compte Instagram baptisé alt.take sur lequel vous diffusez des vidéos. Qu'y-a-t-il derrière ce compte ?
Marion Barbeau : Notre compte Instagram s'appelle alt.take, pour alternate take. C'est un terme que l'on retrouve souvent sur les albums vinyl, qui présentent une face B avec des prises alternatives, comme en jazz, qui sont celles qui présentent quelques imperfections, plus d'improvisation. C'est aussi le nom de l'association que nous avons créée, Alt. Take.
Simon Le Borgne : Derrière cette association, c'est avant tout la volonté de produire et diffuser ce que nous avions commencé à créer avec Marion Barbeau de manière indépendante, comme le duo La fille du fort créé il y a deux ans pour le Fort d'Aubervilliers. Nous avons une volonté commune de développer notre recherche chorégraphique, ainsi que tout ce qui est en rapport avec la mise en scène et le langage des corps. Le travail avec la vidéo est également assez présent.
Marion Barbeau : Nous souhaitons collaborer avec des artistes issus d'univers différents. Nous développons l'idée de créer un spectacle total, avec un univers sonore et lumineux.
« En confinement, nous avions du temps pour expérimenter sans être tournés vers un but précis. »
ResMusica : Pourquoi avoir mis à profit cette période de confinement pour lancer ce projet ?
SLB : Cela fait déjà un moment que nous créons de manière anonyme et nous nous sommes dit que c'était le moment de commencer à partager notre univers, notre recherche. L'arrêt des répétitions à l'Opéra de Paris et le confinement nous en a donné le temps, car cela prend du temps de créer un compte Instagram ! Désormais, nous avions du temps pour expérimenter sans être tournés vers un but précis. A travers ces petites formes, nous recherchons plus de légèreté et avons aussi envie de partager quelque chose en ces temps où les gens n'ont plus accès aux salles de spectacles.
ResMusica : Comment poursuivez-vous votre entraînement, malgré l'arrêt des répétitions ?
SLB : Nous faisons essentiellement du yoga et du Gaga, en suivant grâce à l'application Zoom les cours en ligne mis en place par des danseurs et des anciens danseurs de la Batsheva Dance Company. Nous sommes tous logés à la même enseigne et nous nous entraînons tous dans nos salons. Le Gaga est une technique d'échauffement et d'improvisation qui nous plaît beaucoup. Elle échauffe bien le corps et l'esprit et nous met dans de bonnes dispositions pour improviser. Nous faisons aussi de la barre et du Pilates. L'Opéra de Paris a mis en place des cours en ligne par Teams, avec nos professeurs habituels, qui sont facultatifs.
ResMusica : Qu'est-ce qui a été le plus difficile à vivre, avec le confinement ?
MB : Ce qui nous a le plus affecté, c'est l'arrêt de la création de Alan Lucien Øyen, car nous avions fait cinq semaines de travail très intéressant et plutôt intime.
ResMusica : Quels sont vos projets ?
MB : Nous étions programmés à Milan le 4 mai à la Fondazione Converso pour un spectacle autour de la transition et du passage. C'est un projet avec deux autres danseurs, dont l'un fait de la musique en live. L'intérêt de ce projet est de nous permettre de travailler sur des performances dans des lieux, ce qui est différent de se produire dans un théâtre. Nous l'avons fait au Fort d'Aubervilliers, nous devions le faire dans l'église San Paolo Converso de Milan.
SLB : Cet été, nous avons prévu une résidence de deux semaines à Heidelberg, en partenariat avec le théâtre de cette ville, avec d'autres danseurs du Ballet de l'Opéra de Paris (Antonin Monié, Clémence Gross, Takeru Coste) et mon frère, David Le Borgne, qui participera davantage en tant que cameraman et interprète, ainsi qu'Ulysse Zangs, danseur et musicien. Cette résidence se prolongera éventuellement dans l'église San Paolo Converso à Milan.
ResMusica : et vos projets pour plus tard ?
SLB : A l'avenir, pourquoi ne pas faire tourner cette pièce dans des lieux ou des théâtres ? Nous avons l'idée de lancer un processus avec les artistes avec lesquels nous avons envie de travailler, et de créer du matériel chorégraphique. Nous poursuivons nos recherches en cours, même en période de confinement. Cela passe aussi par beaucoup de films, de lectures… Pour Marion et moi, c'est l'avantage de travailler et de vivre ensemble !