Festival Présences 2020 : suite de l’hommage à George Benjamin
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Paris. Auditorium de Radio France. 12-II-2020. George Benjamin (1960*) : Sudden Time. Julian Anderson (1968*) : Litanies pour violoncelle et orchestre ; CM. Alban Gerhardt, violoncelle. Dai Fujikura (1977*) : Twin Tweets pour deux clarinettes ; CM. Patrick Messina, Christelle Pochet, clarinettes. Pierre Boulez (1925-2016) : Figures – Doubles – Prismes. Orchestre National de France, direction : Pascal Rophé. Philharmonie de Paris. 13-II-2020. Jan Pieterszoon Sweelinck (1562-1621) : Fantasia Cromatica. George Benjamin (né en 1960) : Shadowlines. Alban Berg (1885-1935) : Sonate pour piano, op. 1. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Sonate n°29 op. 106 « Hammerklavier ». Pierre-Laurent Aimard, piano.
Consacré à George Benjamin, le festival Présences 2020 concentré sur deux week-ends propose seulement deux concerts médians pendant la semaine. Le mercredi avec l'Orchestre National de France et Pascal Rophé, pour deux créations mondiales, et le jeudi, avec Pierre-Laurent Aimard à la Cité de la musique, pour un programme mixte.
Les billets à prix très réduits n'ont pas permis de ramener plus d'une poignée de spectateurs dans un Auditorium de Radio France à peine un tiers plein ce mercredi, malgré la qualité du spectacle, mais, il est vrai, pendant les vacances scolaires.
Pourtant, à défaut d'être fortement inspiré sous la battue nette de Pascal Rophé, l'Orchestre National de France s'y montre parfaitement préparé et livre une première pièce de George Benjamin de grande tenue. Sudden Time, tirée d'une citation d'un poème de Wallace Stevens, a pris près de dix ans pour sa composition, initiée alors que l'artiste n'a que vingt-trois ans en 1983, pour être achevée seulement en 1993. L'introduction et ses cataclysmes orchestraux, définissant l'excellente concentration des musiciens, développe en cinq minutes une polyrythmie complexe avec toujours une ligne claire vers laquelle l'ensemble avance. Puis le matériau se développe et s'étire, par des cuivres chauds et des percussions d'une parfaite rigueur. De l'ensemble se démarquent également les bois de l'orchestre, à commencer par la flûte alto, le hautbois et le cor anglais. A la coda, la reprise d'accords bruts s'interrompt pour laisser place à un splendide solo d'alto, préparation idéale à la litanie à suivre.
Le lendemain, le programme d'œuvres de transition, préparé par Pierre-Laurent Aimard et interprété cette fois dans une Cité de la Musique bien remplie, est centré sur George Benjamin. Le pianiste a préféré donner pour l'occasion Shadowlines, plutôt que Duet qui lui est dédicacé, laissé le samedi précédent à Vanessa Benelli Mosel. Annoncé par une partition baroque de Sweelinck, Fantasia Cromatica, pour laquelle les mains d'Aimard se délient une fois passé les premières minutes, l'ouvrage du compositeur contemporain est ensuite mis en regard avec la Sonate op. 1 d'Alban Berg. Une même vision trop concentrée limite l'expansivité de ces deux pièces. Le double risque est d'altérer leur caractère novateur, et de ne pas particulièrement définir ce qu'elles intègrent de nouveau et d'ancien en elles. Puis des six mouvements de Shadowlines, le pianiste traite un Cantabile (I) bien posé, pour ensuite développer la nervosité des accords chromatiques atonaux de Wild (II) et de Tempestoso (IV). En seconde partie de soirée, Aimard use d'une grande dextérité pour l'Allegro d'une Sonate n°29 op. 106 traitée bien plus par la forme que par le fond. Trop peu sentimental dans sa deuxième partie, l'Adagio sostenuto développe une fugue bienvenue, mais où l'interprète brouille le message à vouloir la traiter trop vite.
Le mercredi, en plus de l'œuvre de Benjamin, une Litanie pour violoncelle et orchestre de Julian Anderson, marqué par la mort d'Olivier Knussen en 2018, permet de profiter à nouveau de l'Orchestre National de France, cuivres et cordes graves en tête, en plus de mettre en avant la prestation impressionnante du violoncelliste Alban Gerhardt, sans partition pour cette création! D'environ vingt-trois minutes sur un schéma classique de concerto vif-lent-vif, l'ouvrage maintient un véritable climat nostalgique et mémoriel. Plus court et agréablement libre, Twin Tweets de Dai Fujikura, présent comme les deux autres compositeurs dans le public de la Maison de la Radio, met en avant les deux clarinettes de Patrick Messina et Christelle Pochet, pour une conversation à l'image d'un duo d'oiseaux en plein ciel. Après cette seconde création mondiale, la soirée s'achève sur la très complexe Figures – Doubles – Prismes de Pierre Boulez, dans sa révision de 1968. L'orchestre s'installe dans une configuration triple, en miroir avec dans chaque groupe tous les pupitres de cordes et une harpe. Ce jeu de spatialisation s'attèle au développement des mesures courtes, spécifiques à l'écriture du compositeur à cette période. Les multiples interruptions d'une forme toujours reprise par à coup sont parfaitement gérées par le geste connaisseur de Pascal Rophé.
Crédits Photographiques : Benjamin : Christophe Abramowitz/Radio France ; Gerhardt : Tonhalle Düsseldorf-Susanne Diesner
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