Franz Xaver Richter, découverte d’un important compositeur morave
Plus de détails
Franz Xaver Richter (1709-1789) : Super flumina Babylonis, psalmus 136 à 12 voci ; Miserere à 10 voci per il Venerdì Santo. Markéta Böhmová, soprano. Pavla Radostová, soprano. Piotr Olech, contre-ténor alto. Kamila Mazalová, alto. Jaroslav Březina, ténor. Jakub Kubín, ténor. Jiří Miroslav Procházka, basse. Czech Ensemble Baroque Orchestra & Choir (chef de chœur : Tereza Válková), direction : Roman Válek. 1 CD Supraphon. Enregistré du 12 au 15 juin 2019 en l’église Saint-Michel à Znaïm dans la région de Moravie-du-Sud, en République tchèque. Textes de présentation en anglais, allemand, français et tchèque. Durée : 67:56
SupraphonLe Czech Ensemble Baroque Orchestra & Choir sous la direction de Roman Válek, nous procurent une belle découverte : les premiers enregistrements mondiaux de deux partitions sublimes de Franz Xaver Richter, composées pour le Concert spirituel à Paris et pour la cathédrale de Strasbourg.
Né en Moravie dans l'empire des Habsbourg en 1709, Franz Xaver Richter était chanteur (la basse), instrumentiste (le violon et l'alto), compositeur, chef d'orchestre, ainsi que théoricien de la musique, mais surtout l'un de ces artistes moraves qui ont obtenu la reconnaissance à l'étranger. Un homme ambitieux, il fut, entre 1740 et 1746 vice-maître de chapelle auprès du prince-abbé Anselme de Reichlin-Meldegg à Kempten dans l'Allgäu, en Bavière. Puis, de 1746 jusqu'en 1768, il fut l'un des principaux membres de l'orchestre de la chapelle de cour de Mannheim, un centre important de la vie musicale européenne à l'époque, au service du prince-électeur Charles-Théodore. Il semblerait que Richter ne fût pas satisfait à Mannheim car son travail y consistait avant tout à jouer de l'alto et à chanter. Et quand il s'agissait d'écrire de la musique, il était surtout accepté comme compositeur de pages chambristes, tandis que dans ses précédents engagements – dans des villes moins significatives –, il avait eu la possibilité de créer des oratorios. À Mannheim, il n'a pas réussi à s'imposer comme auteur de musique sacrée ni comme théoricien de premier plan. Malgré ces désavantages, il a façonné 80 symphonies qui se sont avérées essentielles pour le développement de la symphonie préromantique, bien qu'il était toujours resté baroque sur le fond. Le titre du « compositeur de chambre de la cour » qui lui a été décerné en 1768, paraît n'avoir été qu'honorifique en raison de son style « à l'ancienne ». Entre 1761 et 1767, Richter a rédigé un traité d'harmonie et de composition, traduit et publié à Paris en 1804. Par la suite, de 1769 jusqu'à son décès en 1789, il fut maître de chapelle de la cathédrale Notre-Dame de Strasbourg, où il avait comme assistant, à partir de 1783, Ignace Pleyel.
Le Super flumina Babylonis à douze voix, élaboré sur le texte du psaume 136 (137) et destiné au concert, appartient au genre du « motet à grand cœur ». Avec ses modulations harmoniques soudaines et les brusques changements dynamiques, cette œuvre est inspirée par l'esprit Sturm und Drang comme par la musique d'opéra. Franz Xaver Richter l'écrivit en vue d'un concours pour la composition de grands motets, publié en 1767 par Antoine Dauvergne, le directeur du Concert spirituel. Ce concours fut organisé (à plusieurs reprises) par cette prestigieuse société de concerts publics parisienne car Dauvergne manquait de répertoire après que son prédécesseur à ce poste, Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville, lui avait refusé de mettre à sa disposition sa bibliothèque de partitions. Encore que la participation au concours ne valût pas à Richter de prix, il se fit remarquer en France et put, par la suite, prendre fonction à la maîtrise de la cathédrale de Strasbourg, le 24 avril 1769, en y succédant à Joseph Garnier.
Pour ce qui est du Miserere à dix voix pour le Vendredi saint, façonné sur le texte du psaume 50 (51), il est l'une des trois mises en musique de ce poème de pénitence que Franz Xaver Richter accomplit au commencement de sa période strasbourgeoise, dans les années 1770-1773. Ces pages étaient destinées à être proposées durant l'Office des Ténèbres. Il s'agissait de prières nocturnes constituées de psaumes bibliques et de lamentations, se tenant – dans l'atmosphère du deuil et de la douleur – les trois derniers jours de la Semaine sainte. Pendant la liturgie, on éteignait successivement les bougies d'un chandelier triangulaire, d'où le nom « ténèbres ». Une curiosité de ce Miserere en fa mineur est que Richter y fit des citations du Stabat Mater de Giovanni Battista Pergolesi, en rendant ainsi hommage au style « italien », l'un de ses préférés.
Sur le plan de l'interprétation, nous admirons aussi bien l'apport de l'ensemble instrumental que celui du chœur, de même que des solistes qui en sont issus. Pour le jeu de l'orchestre, nous sommes saisis par la subtilité des nuances et la souplesse des phrasés, mais également par sa vitalité. L'énergie solaire est ici au rendez-vous de la variété des couleurs, de la netteté des attaques et donc d'une sonorité cristalline. Quant au chœur, nous en apprécions l'intensité et l'homogénéité en termes de la maîtrise du vibrato, jamais envahissant, et du timbre. Pour les solistes, les deux sopranos et les deux ténors sont aussi légers et délicats que lumineux, le fausset du contre-ténor Piotr Olech a de la douceur, le contralto de Kamila Mazalová est noble et la basse de Miroslav Procházka est habile et assez chaleureuse, quoique manquant de gravité.
Plus de détails
Franz Xaver Richter (1709-1789) : Super flumina Babylonis, psalmus 136 à 12 voci ; Miserere à 10 voci per il Venerdì Santo. Markéta Böhmová, soprano. Pavla Radostová, soprano. Piotr Olech, contre-ténor alto. Kamila Mazalová, alto. Jaroslav Březina, ténor. Jakub Kubín, ténor. Jiří Miroslav Procházka, basse. Czech Ensemble Baroque Orchestra & Choir (chef de chœur : Tereza Válková), direction : Roman Válek. 1 CD Supraphon. Enregistré du 12 au 15 juin 2019 en l’église Saint-Michel à Znaïm dans la région de Moravie-du-Sud, en République tchèque. Textes de présentation en anglais, allemand, français et tchèque. Durée : 67:56
Supraphon