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Paris. Auditorium du Louvre. 10-I-2020. Pascal Dusapin (né en 1955) : Piano Works – Pièce n°1 : « Did it again » ; Pièce n°2 : « Next Piece » (CM) ; Pièce n°3 : « Black letters (CM) ; Iota-50 notes en 3 variations « sur un thème de Giuseppe Colombi » – For Magnus pour violoncelle ; Invece pour violoncelle ; Slackline pour violoncelle et piano. Anssi Karttunen, violoncelle ; Nicolas Hodges, piano

Le Louvre a passé commande à dans le cadre de l'exposition « Soulages au Louvre » célébrant le peintre tout juste centenaire. Black Letters est donné en création mondiale au sein d'un concert monographique où se répondent le piano de et le violoncelle d'.

Dusapin-Pascal-Philippe-Gontier

, qui vient présenter le programme de la soirée, évoque la personnalité de Pierre Encrevé, linguiste et historien d'art (spécialiste de l'œuvre de Soulages) décédé en février dernier, à qui le concert est dédié. C'est lui qui va mettre en relation le compositeur et le peintre, Soulages ayant souhaité que la musique de Dusapin accompagne l'exposition qui lui est consacrée.

Deux interprètes et fidèles du compositeur sont à l'affiche, deux profils tout en contrastes qui se relaient sur scène avant de fédérer leur énergie dans Slackline, sorte de sonate pour violoncelle et piano qui termine le concert.

Le pianiste met sur son clavier les trois Pièces (gageons qu'il y en aura sept !) d'un nouveau cycle pour piano, « Piano Works », initié en 2016 par le compositeur :  Musique éloquente et à haute tension, réclamant un jeu puissant dont donne la mesure. De belle envergure, « Did it again », Pièce n° 1, louvoie entre phases virtuoses éprouvant la résonance de tout l'instrument et instants plus retenus et intérieurs : musique intranquille chère à Dusapin où passent furtivement les couleurs d'un Berg ou d'un Debussy, et dont l'interprète souligne l'essentielle mobilité. On sent Nicolas Hodges moins à l'aise dans les deux autres Pièces données ce soir en création mondiale. Plus courte « Next Piece » (Pièce n° 2) développe la qualité vibratile de la matière sonore et superpose deux temporalités : musique d'humeurs toujours, avec ses fulgurances et ses bourrasques, qui termine dans l'interrogation. « Black Letters », Pièce n° 3 est une co-commande du Louvre et du Concours international de piano d'Orléans : ainsi l'œuvre sera-t-elle imposée pour les finalistes du concours en avril prochain. Dusapin y complexifie les strates temporelles, joue sur l'opposition des registres et les capacités résonnantes de l'instrument, sollicitant le jeu très (trop) robuste de l'interprète qui se laisse un rien débordé par son élan. La pièce donnera sans aucun doute du fil à retordre aux concurrents d'Orléans.

Avec sa grâce féline et son geste engagé, , violoncelliste finlandais bien connu des scènes françaises, interprète quant à lui, et en alternance, deux pièces plus anciennes. Iota -50 notes en 3 variations « sur un thème de Giuseppe Colombi » for Magnus est dédié à un autre Finlandais, le compositeur , pour ses 50 ans et en 50 notes. Peu de matière, donc, sous l'archet de l'interprète mais une manière aussi sensible que subtile de nous la faire entendre, entre plénitude du son, filtrage et distorsion passagère, silences expressifs et fragilité de l'énonciation. Invece (« au contraire ») met à l'œuvre l'énergie du geste qui est ressassé de manière obsessionnelle, urgente, jusqu'à l'épuisement. Magnifiquement engagée et habitée, la performance de l'interprète est spectaculaire.

Slackline pour violoncelle et piano juxtapose trois mouvements, dont le dernier abrite en son centre un intermezzo éruptif. Le titre fait référence à cet exercice sportif qui consiste à marcher en équilibre sur une sangle élastique suspendue dans les airs. Dusapin y retient l'idée d'un équilibre fragile dont dépend la coexistence des deux parties instrumentales. Les deux « voix » sont parfaitement autonomes (violoncelle rampant, piano plutôt carillonnant) dans un premier mouvement très contemplatif, puis fusionnelles dans un second mouvement où elles « groovent » de concert. Les écritures se croisent dans la dernière partie, le violoncelle devenant l'ombre portée du piano, et réciproquement, dans une sorte d'errance au temps suspendu. L'épisode central forge un espace vibratoire impressionnant sous le geste investi de nous deux interprètes en parfait synergie.

Crédit photographique : © Philippe Gontier / Musée du Louvre

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