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Rome. Teatro Costanzi. 10-XII-2019. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Les Vêpres Siciliennes, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugène Scribe et Charles Duveyrier. Mise en scène : Valentina Carrasco. Décors : Richard Peduzzi. Costumes : Luis F.Carvalho. Lumières : Peter van Praet. Chorégraphie : Valentina Carrasco et Massimiliano Volpini. Avec : Roberta Mantegna, La duchesse Hélène ; Irida Dragoti, Ninetta ; John Osborn, Henri ; Roberto Frontali, Guy de Montfort ; Michele Pertusi, Jean Procida ; Saverio Fiore, Thibault ; Francesco Pittari, Daniéli ; Daniele Centra, Mainfroid ; Alessio Verna, Robert ; Dario Russo, Le sire de Béthune ; Andrii Ganchuk, Le comte de Vaudemont. Chœur du Teatro dell’Opera di Roma (chef des chœurs : Roberto Gabbiani). Corps de ballet du Teatro dell’Opera di Roma, avec la participation des élèves de la Scuola di Danza del Teatro dell’Opera di Roma. Orchestre du Teatro dell’Opera di Roma. Direction : Daniele Gatti
Pour démarrer son premier programme, le directeur musical du théâtre romain, Daniele Gatti, a choisi Les Vêpres siciliennes de Giuseppe Verdi, l'opéra en cinq actes composé en 1855 à Paris d'après les principes du grand opéra. Pour cette mise en scène dans sa version intégrale en français, le théâtre dell'Opera di Roma mobilise toutes ses forces.
Dans la fosse, Daniele Gatti dirige d'une manière raffinée et réfléchie, apportant une touche précise, mesurée et analytique, par une interprétation qui libère l'essence dramaturgique de la musique des contraintes du grand opéra. Au centre de ce premier grand opéra de Verdi, il y a le drame familial qui oppose le gouverneur français Monfort et Henri le rebelle sicilien, qui s'avère être son fils. Mais il y a également le drame sentimental qui bouleverse Henri et la duchesse Hélène. L'approche du chef révèle à ces Vêpres toutes les gammes du drame psycho-sentimental, parallèle au drame historico-politique du conflit entre les Siciliens et les envahisseurs français à l'époque de Charles d'Anjou.
Mais si le drame de Verdi est rendu à son essence, c'est surtout grâce au travail d'équipe en commençant par la Sicilienne Roberta Mantegna (Hélène), une soprano sortie de « Fabrica », le programme du théâtre romain destiné aux jeunes artistes. Malgré une petite défaillance du début, due au manque d'échauffement de la voix, elle révèle la grande amplitude de sa voix, cristalline et profonde, des legato parfaits et une couleur intense. A ses côtés le ténor américain John Osborn, dans le rôle d'Henri, le patriote sicilien dévasté par la découverte de sa filiation française et hanté par la trahison, modère ses aigus pourtant magnifiques afin d'obéir aux mezzopiano et aux pianissimo indiqués par le chef d'orchestre. On salue l'excellente performance du grand baryton Roberto Frontali, qui s'impose sur scène dans le rôle de Montfort, tandis que le baryton-basse Michel Pertusi, dans le rôle de Procida, déploie son timbre grave en faisant preuve d'une parfaite diction française.
Valentina Carrasco, l'Argentine cosmopolite de la Fura dels Baus, qui avait mis en scène Carmen à Caracalla il y a deux ans, a su trouver, avec Massimiliano Volpini, une chorégraphie aérienne, délicate, évocatrice et puissante à la fois, pour traduire en mouvement la lecture de Daniele Gatti. Grâce à un brillant coup de théâtre, elle réussit à contourner l'incongruité apparente du troisième acte, lorsque le duo déchirant entre père et fils, le point d'orgue de la partition, est suivi par un divertissement de trente minutes. Le ballet des Quatre Saisons commence comme un rêve de Monfort, qui vit sa prise de conscience, puis il devient une danse obsessionnelle, lorsque le souvenir des viols revient à la surface, avant de céder le pas à la gaîté d'un jeu d'enfants, lorsque les jeunes filles se purifient dans l'eau et jouent avec les petits bassins en zinc (référence évidemment à Pina Bausch). Et enfin il prend les couleurs de la vie et de la souffrance, lorsque les voiles blancs tordus symbolisent le ventre des femmes enceintes, qui finissent par s'en débarrasser comme les poches du cordon ombilical.
Inspirés des forteresses Renaissance de Francesco di Giorgio Martini, les décors abstraits et épurés de Richard Peduzzi s'écartent des deux côtés de la scène et se rapprochent comme s'ils étaient des acteurs, partie intégrante du drame, afin de représenter les affres du siège des Français, la terreur impuissante des Siciliens et l'asphyxie des conspirateurs en prison. Ils se touchent à la fin, lorsqu'ils finissent presque par s'écraser sur scène car la révolte éclate et mène au massacre.
Une production à la hauteur d'un théâtre revenu aux fastes d'un temps que l'on croyait perdu grâce à la valorisation de ses ressources. Ce n'est pas un hasard si l'Opéra de Rome, au cours des quatre dernières années, a doublé ses revenus, jusqu'à atteindre 15 millions de recettes, sans pour autant augmenter le prix du billet, ce qui lui permet aujourd'hui un autofinancement à la hauteur de 36 %.
Crédits photographiques : © Yasuko Kageyama
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Rome. Teatro Costanzi. 10-XII-2019. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Les Vêpres Siciliennes, opéra en cinq actes sur un livret d’Eugène Scribe et Charles Duveyrier. Mise en scène : Valentina Carrasco. Décors : Richard Peduzzi. Costumes : Luis F.Carvalho. Lumières : Peter van Praet. Chorégraphie : Valentina Carrasco et Massimiliano Volpini. Avec : Roberta Mantegna, La duchesse Hélène ; Irida Dragoti, Ninetta ; John Osborn, Henri ; Roberto Frontali, Guy de Montfort ; Michele Pertusi, Jean Procida ; Saverio Fiore, Thibault ; Francesco Pittari, Daniéli ; Daniele Centra, Mainfroid ; Alessio Verna, Robert ; Dario Russo, Le sire de Béthune ; Andrii Ganchuk, Le comte de Vaudemont. Chœur du Teatro dell’Opera di Roma (chef des chœurs : Roberto Gabbiani). Corps de ballet du Teatro dell’Opera di Roma, avec la participation des élèves de la Scuola di Danza del Teatro dell’Opera di Roma. Orchestre du Teatro dell’Opera di Roma. Direction : Daniele Gatti