Spiritus, une prière musicale de Renaud-Gabriel Pion

Toujours avide de nouveaux projets éclectiques, Renaud-Gabriel Pion propose une plongée orchestrale au cœur de la spiritualité avec son Ensemble 1529. Le raffinement sonore, la méditation, la prière et l'extase sont au rendez-vous de ce disque très soigné.

La formation instrumentale rassemblée pour Spiritus est singulière, résolument tournée vers les tessitures graves : quatre violoncelles, trois tubas, marimba et cloches tubulaires, trompette, guitare électrique et batterie, servis par une équipe d'interprètes hautement qualifiés (Jean-Paul Dessy, Bastien Stil, Michel Massot…). Pion se charge quant à lui de toutes les anches et de la basharpa. Les couleurs suaves de l'ensemble se fondent et miroitent au sein de lentes progressions contrapuntiques éthérées. Les vibrations ancrées dans le sol semblent incarner les bourdons d'un chœur Renaissance et contrastent avec l'apparition de mélodies modales qui tirent vers le haut, comme le solo de saxophone de « Lutenist » ou les interventions de Bill Frisell, guitariste invité sur cinq des quatorze pièces qui composent le disque.

L'écriture ciselée se révèle tour-à-tour planante, toute de volutes et de brouillards harmoniques (1529, Aeon ou Mardi Gras) ; profondément rituelle, au cœur de lentes processions modales (Quintes, Harmondal) ; hypnotisante, avec des formules répétitives agissant comme des mantras et rappelant la musique minimaliste américaine (Irisation, Hymne ou Lament, dédicacé à David Bowie). Art in Vain, avec la voix du haute-contre Sébastien Fournier, constitue un des sommets du disque, motet monodique baroque associé aux harmonies et aux sonorités modernes d'un autre temps et d'un autre monde, aux confins du domaine de l'esprit.

Tout au long de l'album, le son est beau, englobant, apaisant et édifiant, au service d'un sentiment d'intemporalité et d'éternité, comme si cette musique avait toujours existé avant d'être révélée.