Ce court essai paru chez Actes Sud reste aussi indéfinissable que son sujet, Domenico Scarlatti.
On croit d'abord avoir affaire à une biographie. Le plan chronologique, qui déroule la vie du compositeur en partant de celle de son père Alessandro Scarlatti, pour se prolonger par la postérité de sa musique et par des considérations sur la manière de la jouer, donne cette impression. Mais on se rend bien vite compte qu'au-delà des éléments factuels, l'auteur, tout en reconnaissant la pauvreté des sources disponibles pour caractériser la personnalité de Scarlatti, est attiré par des explications psychologisantes que rien n'étaye, si ce n'est son imagination. En particulier, la manière de décrire les relations de Domenico à son père et à l'infante du Portugal puis reine d'Espagne Maria Barbara, est bien hasardeuse. Si l'on garde la tête froide, la vie et la personnalité de Domenico Scarlatti restent nimbées de mystère.
A-t-on alors affaire à une étude musicologique ? Pas davantage. Martin Mirabel (auteur d'un documentaire sur Lucas Debargue, jeune interprète de Scarlatti) connaît visiblement son sujet et se plaît à parler de musique, mais l'étude systématique de l'œuvre n'est pas l'angle qu'il a choisi.
C'est donc un essai développant des idées personnelles que l'on a en main. On lit avec intérêt des développements sur les rencontres dont le parcours de Scarlatti est parsemé (Thomas Roseingrave, Farinelli, Antonio Soler…), sur ses sonates évidemment, ou sur ses interprètes au XXe siècle, en particulier Scott Ross et sa formidable intégrale de 1984-1985. Hélas, l'auteur passe bien vite sur nombre de sujets potentiellement féconds : citons, parmi d'autres, une comparaison avec Rameau qui éveille la curiosité (p. 50), les recherches de Ralph Kirkpatrick (p. 102) ou l'interprétation des sonates au piano par rapport au clavecin (p. 112 et 119). Surtout, la désagréable impression de voir une réflexion avortée par la recherche d'un bon mot ou d'une formule clinquante, se présente trop souvent. À quoi il faut ajouter l'emploi abusif du futur, tic d'écriture qui a tendance à rendre le propos confus.
Cet ouvrage apparaît donc à l'image de la collection Musique à laquelle il appartient : inégal.
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Domenico Scarlatti. Martin Mirabel. Actes Sud. 155 p. 17 €. Septembre 2019
Actes Sud