Edda II de Jón Leifs, aux sources sauvages de la saga islandaise
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Jón Leifs (1899-1968) : Edda II: Sköpun Heimsis (Deuxième partie : la vie des Dieux). Hanna Dóra Sturludóttir, mezzo-soprano. Elmar Gilbertsson, ténor. Kristinn Sigmundsson basse. Chœur de la Schola Cantorum Reykjavicensis (chef de chœur : Hörđur Áskelsson). Orchestre Symphonique d’Islande, direction : Hermann Bäumer. 1 SACD hybride BIS Records. Enregistré en avril 2018 à la salle de concert Harpa, Reykjavik, Islande. Riche notice quadrilingue (français, anglais, islandais, allemand), livret bilingue (islandais, anglais). Durée : 64:38
BIS RecordsSi la lointaine Islande est devenue en dix ans la coqueluche des touristes et des amateurs de séries de médiéval fantasy , l'oratorio-saga monumental Edda de Jón Leifs émerge seulement aujourd'hui d'un oubli de cinquante ans. Probablement parce que son temps est maintenant venu.
Edda est le grand œuvre du compositeur Jón Leifs, jamais exécuté de son vivant. La première partie a été enregistrée en 2006 par les mêmes forces chorales et orchestrales, et publiée par Bis. Il aura fallu douze ans pour trouver l'énergie de graver la deuxième partie, une troisième d'une durée d'une heure étant encore inédite.
Statisme hiératique et brutal, rudesse farouche dont la rythmique répétitive pourra exercer une sorte de fascination, décrivent probablement assez bien la tonalité générale de l'œuvre et l'intention profonde du compositeur : revenir aux sources médiévales de l'Islande, de ses sagas, où la dureté et la pureté des éléments dictent la musique. Si le premier mouvement Odin laisse place à quelques vocalises (« presque du yodel » note le compositeur) et le dernier mouvement Guerriers offre un texte plus dynamique parmi les textes du XIIIᵉ siècle utilisés pour Edda, les autres mouvements (Les fils d'Odin, Déesses, Walkyries, Nornes) reposent sur des textes descriptifs ou elliptiques qui par leur tonalité pourraient être issus de la Bible.
Tant que l'Islande était considérée comme une île du bout du monde, avec sa langue qui n'a pas évolué depuis le Moyen Âge, le parti pris extrême du compositeur pouvait choquer ou s'attirer les moqueries. Mais aujourd'hui où les arts qu'on disait primitifs s'appellent les arts premiers, où l'on commence à réaliser que la civilisation moderne produit surtout des mers de plastique et des champs d'asphalte noir qui font suffoquer les villes, la sauvagerie minérale d'Edda interloque et capte l'attention. D'autant que l'interprétation de l'orchestre symphonique d'Islande et du chœur Schola Cantorum de Reykjavik est d'un engagement idoine.
On a du mal aujourd'hui à imaginer qu'Edda devienne populaire, mais déjà cela paraît moins invraisemblable que lors de la parution du premier volet en 2008. Si les Islandais ne perdent pas leur âme ancestrale après les siècles passés de christianisation et la déferlante touristique assoiffée de fraîcheur qui s'abat sur eux aujourd'hui, cet oratorio devrait devenir pour eux ce que la Passion selon Saint-Matthieu est aux Allemands, Le Messie aux Britanniques ou la Marseillaise pour les Français : une œuvre chorale intransigeante qui incarne l'essence même de leur peuple.
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Jón Leifs (1899-1968) : Edda II: Sköpun Heimsis (Deuxième partie : la vie des Dieux). Hanna Dóra Sturludóttir, mezzo-soprano. Elmar Gilbertsson, ténor. Kristinn Sigmundsson basse. Chœur de la Schola Cantorum Reykjavicensis (chef de chœur : Hörđur Áskelsson). Orchestre Symphonique d’Islande, direction : Hermann Bäumer. 1 SACD hybride BIS Records. Enregistré en avril 2018 à la salle de concert Harpa, Reykjavik, Islande. Riche notice quadrilingue (français, anglais, islandais, allemand), livret bilingue (islandais, anglais). Durée : 64:38
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