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Lyon. Auditorium Maurice Ravel. 14-IX-2019. Richard Wagner (1813-1883) : Tannhaüser, ouverture. Richard Strauss (1864-1949) : Vier letzte lieder ; Ein heldenleben. Genia Kühmeier, soprano. Orchestre National de Lyon, direction : Nikolaj Szeps-Znaider
Nommé à la surprise générale directeur musical de l'Orchestre National de Lyon, avec prise de fonction en septembre 2020, Nikolaj Szeps-Znaider s'impose par la cohérence et l'intelligence de ses options dans un ambitieux programme Wagner/Strauss.
Nikolaj Szeps-Znaider, c'est tout d'abord une présence : bonhommie gourmande, charisme évident mais sans forfanterie, regard vif et lumineux, gestuelle exubérante qui gagnera sans doute en sobriété avec le temps. Heureux et fier d'être là, en présence de musiciens qu'il sollicite avec bienveillance et avec lesquels il semble en empathie, le nouveau directeur musical de l'ONL n'est pas pas un adepte de la manière forte. Cela se sent et surtout s'entend.
Point de grande houle orchestrale, ni de ton martial dans le Tannhaüser qui ouvre le bal. Deux mots d'ordre guident la démarche du chef : clarté des textures et fluidité du discours, en dépit des forces conflictuelles et de la tension qui innervent l'œuvre. Le drame est là, mais on entend surtout la lumière. Bois au chant serein, y compris dans la solennité, cordes à la pénétrante douceur – triomphe de la mezza voce, délicat vibrato des premiers violons, tremolo océanique. Même les cuivres ne cherchent pas la déflagration. Un Wagner à la clarté toute italienne, rienzienne, indéniablement séduisant.
Viennent ensuite les Quatre derniers Lieder. Genia Kühmeier, admirable mozartienne (sa Pamina avec Harnoncourt !), précieuse dans les oratorios de Haydn, ou dans la Quatrième de Mahler, n'en est pas une interprète d'élection. Timbre lumineux, qui s'irise dans l'aigu, jolie diction, musicalité somme toute exquise mais ambitus insuffisant pour épouser les voluptueux méandres de cet Adieu au monde. Soucieux de pas couvrir cette voix, que l'acoustique de l'Auditorium ne ménage pas, et de lui offrir un écrin harmonieux, Nikolaj Szeps-Znaider bride l'orchestre qui n'a pas la luxuriante touffeur espérée. Le sublime mausolée à la voix construit par Richard Strauss, ses capiteux parfums, des diaprures, perdent incontestablement en magie. Très en beauté néanmoins, le violon de Giovanni Radivo dans le merveilleux solo de Beim Schlafengehen, le cor idéalement mélancolique dans September, les flûtes et harpes qui accompagnent la traversée du Styx dans Im Abendrot.
Partition qu'il adore, et qu'il dirige par cœur, Une vie de Héros trouve en Nikolaj Szeps-Znaider un prosélyte de premier ordre. Dès le premier épisode, le chef impulse un geste allant et généreux, une énergie vibrante dont il ne se départira pas. C'est une vision premier degré, que des esprits chagrins trouveront sans dimension nietzschéenne, mais irrésistible. Sens aigu de la narration, caractérisation parfaite de chaque épisode, attention accordée aux couleurs et aux textures, belle cohésion d'ensemble, dialogue parfait entre les interventions solistes et le reste de l'orchestre. Des moments élégiaques succèdent à d'épiques tutti sans que la tension ne faiblisse un seul instant. Le public galvanisé fait un triomphe à l'orchestre et à son chef, et à cette soirée porteuse de belles promesses.
Une ouverture de saison réussie, deux ans après une Sixième de Tchaïkovski mémorable.
Crédit photographique : © Uwe Arens
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Lyon. Auditorium Maurice Ravel. 14-IX-2019. Richard Wagner (1813-1883) : Tannhaüser, ouverture. Richard Strauss (1864-1949) : Vier letzte lieder ; Ein heldenleben. Genia Kühmeier, soprano. Orchestre National de Lyon, direction : Nikolaj Szeps-Znaider