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Des Puritains de feu à l’Opéra Royal de Wallonie

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Liège. Opéra Royal de Wallonie. 20-VI-2019. Vincenzo Bellini (1801-1835) : I Puritani, version originale intégrale en trois actes, sur un livret de Carlo Pepoli, d’après le roman « Têtes rondes et cavaliers » d’Ancelot et Saintine. En co-prodcution avec le Städicschen Bühnen Frankfurt. Mise en scène : Vincent Boussard. Décors : Johannes Leiacker. Cosurmes : Christian Lacroix. Vidéo : Isabel Robson. Lumières : Joachim Klein, Marcel Heyde. Avec Lawrence Brownlee, Lord Arturo Talbot; Zusana Marková, Elvira; Mario Cassi, Sir Riccardo Forth; Luca Dall’Amico, Sir Giorgio; Alexise Yerna, Enrichetta; Zeno Popescu, Sir Bruno Robertson; Alexei Gorbatchev : Lord Gualtiero Walton; Sofia Pintzou, figuration dansée d’une femme, rôle muet. Choeurs de l’Opéra Royal de Wallonie (direction : Pierre Iodice). Orchestre de l’Opéra Royal de Wallonie – Liège, direction: Speranza Scappucci

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La nouvelle production d'I Puritani de l'Opéra royal de Wallonie à Liège est à marquer d'une pierre blanche.

puritani 1I Puritani furent créés triomphalement à Paris moins d'un an avant la mort prématurée de . Cet anti-parallèlisme entre parcours glorieux de l'œuvre et sombre trajet de l'auteur sert de point d'ancrage à la réflexion de . Plutôt que de recourir à un arsenal historié et romantique alla Walter Scott, le metteur en scène replonge le drame dans un contexte social contemporain de la création, en osant unifier par la pensée les destins croisés du héros Arturo, partisan fanatique des Stuart au point de renoncer à son mariage, et de deux siècles plus tard compositeur adulé, aux nombreuses conquêtes féminines, mais irrémédiablement condamné.

Ce parti-pris, bien mis en valeur par le décor de Johannes Leiacker, à mi-chemin entre façade ruinée de château provincial et loges d'opéra en lambeaux, par les somptueux costumes de ou par les éclairages très so(m)bres et dignes de Joachim Klein, mène à une dramatisation exacerbée et quelque peu factice d'un livret – d'ailleurs manipulé à l'Acte III – dont on a souvent dénoncé la relative faiblesse : c'est ici Elvira, dans son délire, qui tente d'abattre d'un coup de pistolet son fiancé au terme de l'épique duo quasi-final. Le happy end qui s'en suit apparaît d'autant plus douteux et décalé. Avouons un certain malaise devant le détournement affiché par cet improbable épilogue : la mise en abyme, avec cette grosse « ficelle » de l'opéra dans l'opéra révèle les protagonistes sous leur vrai jour mondain, alors que trois heures durant ils ont finalement pris part à un jeu de rôles – à l'antichambre de la folie pour la soprano. Ces éclats faussement triomphants, miroir aux alouettes d'une société du spectacle, augurent du sépulcral naufrage du compositeur, au tragique destin déjà figuré un peu lourdement au prélude du premier acte par une encombrante et macabre vidéo, images de son cénotaphe au Père Lachaise ! Certes il y a de très belles trouvailles, tel ce vent et ce constant ballet de feuilles mortes virevoltant sous les pas d'un Elvira égarée et (dé)possédée, ce piano à queue central, entre limbes, lit et cercueil, au beau milieu de l'espace scénique, véritable – jusqu'au sens propre – miroir des âmes, ou l'ajout de cette figurante omniprésente (évocatrice Sofia Pintzou), noire créature féminine nocturne mi-vamp, mi-féline, incarnation du Destin et sorte d'anima jungienne et tragique de l'immaculée et virginale prima donna.

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a étudié de très près la partition originale parisienne et a décidé de réhabiliter pratiquement tous les passages traditionnellement sacrifiés, y compris de nombreuses reprises exaltant la virtuosité des solistes au fil des cabalettes airs et des ensembles, telle la section en si majeur, jamais enregistrée au disque, du trio Arturo- Enrichetta-Giorgio au final du premier acte, splendide mais vocalement redoutable. Sa direction, loin de toute sécheresse musicologique, relève du travail d'orfèvre, digne d'un Riccardo Muti, le maestro qu'elle a souvent épaulé par le passé comme répétitrice ou continuiste. On admire ce large éventail de nuances dynamiques, cette expressivité des phrasés adroitement sculptés et toujours musicaux, cette mise en valeur de détails d'orchestration souvent sacrifiés sous des baguettes plus routinières, cette autorité conjuguant complicité proximale avec l'orchestre maison, ce soir d'ailleurs très en verve (belle petite harmonie, splendide pupitre de cors). Qui plus est, cette conception habitée est guidée par un sens certain de la courbe globale : l'intérêt musical ne fléchit jamais.

La cheffe titulaire de l'opéra mosan peut d'ailleurs compter sur une distribution exceptionnelle pour exalter  sa poétique vision de la partition. L'Opéra Royal de Wallonie accueille en effet pour le première fois l'Américain  : ce dernier possède et maîtrise l'exacte tessiture du rôle d'Arturo Talbot, celle d'un ténor suraigu (le contre-fa  final !) et agile, au timbre vif-argent, se jouant avec une déconcertante facilité de toutes les vocalises, roulades, ou effets de voix lors des reprises da capo. Et ce dans les positions les plus physiquement improbables imposées par la mise en scène. Sa présence scénique, malgré sa petite taille, en est d'autant plus impressionnante d'autorité.

Il trouve en l'Elvira de la jeune soprano colorature tchèque , également invitée pour la première fois par la maison, une partenaire de choix. Celle-ci  brosse un très habile et sensible portrait par petites touches au fil des actes de la malheureuse héroïne, depuis une relative timidité face à l'autorité paternelle, jusqu'à l'accès de folie extraverti ou l'explosion d'une passion débordante, une fois la raison recouvrée, dans le duo avec Arturo déjà évoqué, sommet de cette représentation tant par l'incroyable complémentarité des voix que par le travail musical quasi chambriste des interprètes.

Le reste de la distribution est à l'avenant. Luca Dall'Amico,un habitué de la maison, campe un Sir Giorgio, solide et vaillant baryton, impeccable vocalement, mais laissant entrevoir la faille psychologique du personnage partagé entre devoir et fidélité envers le clan puritain et volonté de bonheur pour sa fille adoptive, amoureuse d'un royaliste. en Sir Riccardo Ford, le prétendant éconduit et avide de vengeance, nous a moins convaincu, à la fois par un léger manque de puissance et une moindre agilité dans les vocalises les plus périlleuses. Il apparaît en retrait dans le célèbre duo « Suoni la tromba » qui ponctue l'acte II et où Luca Dall'Amico lui dame un peu le pion. Alexise Yerna campe intelligemment une Reine Enrichetta à la fois paniquée et manipulatrice, par son timbre chaud et son irréprochable engagement, tout en s'intégrant idéalement au fameux et redoutable trio précédant sa fuite en compagnie d'Arturo. Enfin, accordons une mention spéciale pour des chœurs sensiblement renforcés, particulièrement en voix, et idéalement préparés par Pierre Iodice. Justice est ainsi rendue à une partition retrouvant son lustre original, grâce à un travail d'équipe magnifiant par un salutaire égrégore l'éclatante et souveraine maîtrise d'individualités vocales de rang mondial.

Crédits photographiques : Zazana Markova et les choeurs, Sofia Pintzou, © Opéra Royal de Wallonie-Liège

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Liège. Opéra Royal de Wallonie. 20-VI-2019. Vincenzo Bellini (1801-1835) : I Puritani, version originale intégrale en trois actes, sur un livret de Carlo Pepoli, d’après le roman « Têtes rondes et cavaliers » d’Ancelot et Saintine. En co-prodcution avec le Städicschen Bühnen Frankfurt. Mise en scène : Vincent Boussard. Décors : Johannes Leiacker. Cosurmes : Christian Lacroix. Vidéo : Isabel Robson. Lumières : Joachim Klein, Marcel Heyde. Avec Lawrence Brownlee, Lord Arturo Talbot; Zusana Marková, Elvira; Mario Cassi, Sir Riccardo Forth; Luca Dall’Amico, Sir Giorgio; Alexise Yerna, Enrichetta; Zeno Popescu, Sir Bruno Robertson; Alexei Gorbatchev : Lord Gualtiero Walton; Sofia Pintzou, figuration dansée d’une femme, rôle muet. Choeurs de l’Opéra Royal de Wallonie (direction : Pierre Iodice). Orchestre de l’Opéra Royal de Wallonie – Liège, direction: Speranza Scappucci

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