L’hommage bâclé de Profil à André Navarra

On ne peut certes que se réjouir de la parution de ce coffret qui rend hommage à André Navarra (1911-1988) qui fut l'un des meilleurs violoncellistes français d'une génération pourtant riche en grands maîtres comme Fournier, Gendron ou Tortelier. Toutefois, le peu de soin apporté par l'éditeur à cette publication déçoit fortement.

André Navarra fit en effet partie de cette école du violoncelle français qui continue de produire des générations de grands musiciens. Sa carrière lui fit côtoyer les plus grands et son répertoire étendu comme sa technique et sa sonorité ont fait de lui l'un des grands parmi les grands.

Le coffret publié par Profil déçoit cependant par la désinvolture de l'éditeur. Passe encore qu'un texte de présentation indifférent d'une demi-page (en anglais et en allemand seulement) se contente d'un survol négligent de la vie et de la carrière de Navarra. Mais un minutage particulièrement pingre (moins de huit heures de musique pour dix CD) n'est pas acceptable, et la table des matières inverse allègrement Haydn et Boccherini… Le choix des œuvres présentées ne rend que partiellement compte des multiples facettes de l'art d'André Navarra. Certains grands concertos sont certes présents mais pas tous ; le Schelomo de Bloch, le Double concerto de Brahms ou le Concerto n° 1 de Saint-Saëns manquent par exemple à l'appel, alors qu'il y a deux versions de celui de Schumann (sombre et introverti avec Barbirolli, plus flamboyant avec Cluytens) tandis que celui de Lalo souffre de l'accompagnement à la serpe de Jean Fournet… La musique de chambre est réduite à la portion congrue ; la Sonate n° 3 de Beethoven et l'Arpeggione exposent le talent du musicien français, mais les petites pièces ou transcriptions font pâle figure. On notera toutefois la présence d'une vraie curiosité avec les trois pièces de Louis Maingueneau (1884-1950), pochades de moins de sept minutes au total.

Dans ces conditions, malgré quelques sommets comme le concerto d'Elgar sous la baguette légendaire de Barbirolli, l'auditeur reste quelque peu frustré et continuera à chercher ailleurs le meilleur de l'art de Navarra, notamment dans ses enregistrements avec la philharmonie tchèque et Karel Ančerl ou le diptyque Saint-Saëns-Lalo avec Charles Munch. Pour ces raisons, on ne peut que recommander le superbe coffret paru chez Fondamenta, à la présentation et au contenu exemplaires, contrairement à cette compilation bâclée.