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L’énigme du chevalet fantôme : premier épisode

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La science n’a pas été l’unique principe qui a prévalu à l’origine du violon, au début du XVIe siècle. La religion, la philosophie, l’esthétique – le hasard, aussi- y ont également contribué. Mais s’il est un paramètre fondamental à son fonctionnement technique, c’est la place du chevalet sur la table. Pour accéder au dossier complet : L’énigme du chevalet fantôme

 

Violon 11J’aime les énigmes qui mêlent histoire et art : le sourire de la Joconde, la symbolique des tableaux de Jérôme Bosch, la « tempête » de Giorgione… Concernant le violon, il en est une qui m’intrigue et qui interroge nombre de luthiers, musiciens et organologues. Je vous la présente et vous fais part de mes hypothèses.

Voici les faits. Pour fonctionner comme il se doit, un violon doit respecter un certain nombre de lois physiques. Le matériau des différentes pièces, l’agencement de celles-ci, leurs formes, leurs volumes, ont tous une incidence (plus ou moins grande) sur le résultat acoustique. Certes, la science (du moins telle que nous la concevons aujourd’hui) n’a pas été l’unique principe qui a prévalu à l’origine du violon, au début du XVIe siècle. La religion, la philosophie, l’esthétique (le hasard, aussi) y ont également contribué. Mais s’il est un paramètre fondamental à son fonctionnement technique, c’est la place du chevalet (la pièce de bois qui supporte les cordes) sur la table (le dessus de l’instrument).

Gerrit van Honthorst, Le joyeux violoniste (1624)

Gerrit van Honthorst, Le joyeux violoniste (1624)

Cette place ne doit rien au hasard : c’est celle du « barycentre » du violon, l’endroit où les forces exercées sur ce dernier se répartissent le plus équitablement sur son ensemble. C’est le paramètre de base, celui qui détermine tous les autres : la place des ouïes (les deux ouvertures latérales sur la table), celle de l’âme (un cylindre d’épicéa coincé à l’intérieur de la caisse, près du chevalet), de la barre (en épicéa également, ajustée et collée sous le chevalet), les épaisseurs de la table et du fond, la hauteur et la forme de la voûte, etc. Au regard des tracés qui nous restent des anciens luthiers, on comprend qu’une attention très particulière était portée à ce principe symbolisé par deux petits crans taillés sur les ouïes.

Violon 3En clair, malgré les évolutions qui ont marqué l’histoire du violon, le principe technique et acoustique qui détermine la place du chevalet est a priori resté le même. C’est pourquoi, tout au long de cet article, je l’appellerai « place technique » du chevalet.

Or, et c’est à ce niveau que réside l’énigme, si on observe les tableaux, dessins ou gravures représentant le violon, de son origine jusqu’au milieu du XVIIIe siècle (période couvrant une partie de l’époque Renaissance et celle dite « baroque », ce dernier terme servant à désigner le violon de façon générique sur l’ensemble des deux époques), on constate que, pratiquement deux fois sur trois, le chevalet est situé nettement plus bas qu’à sa place technique.

Orazio Gentileschi : jeune femme jouant du violon, Santa Cecilia (1612)

Orazio Gentileschi : jeune femme jouant du violon, Santa Cecilia (1612)

Pour expliquer ce phénomène, on a d’abord pensé que les peintres de l’époque étaient bien peu observateurs et n’avaient guère le souci de la « vérité ». La « fonction » de l’Art n’a d’ailleurs jamais été de représenter la réalité. Mais cette hypothèse soulève tout de suite une objection : qu’un peintre ou deux n’aient pas été scrupuleux sur les détails techniques est possible. Mais que deux peintres sur trois, sur deux siècles et demi, aient tous fait une « erreur » – et, qui plus est, la même erreur, car jamais le chevalet n’est représenté plus haut, ou de coté – cela est difficilement admissible. De plus, dans certaines œuvres, notamment des natures mortes aux instruments de musique, on comprend que l’artiste connaissait très bien les instruments. Elles sont d’un réalisme confondant, jusque dans des détails de matière, de vernis, de texture même des cordes en boyau torsadé. Il est impossible de soupçonner ces peintres de négligence sur un détail technique aussi important que la place du chevalet.

À venir : L’énigme du chevalet fantôme : deuxième épisode

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La science n’a pas été l’unique principe qui a prévalu à l’origine du violon, au début du XVIe siècle. La religion, la philosophie, l’esthétique – le hasard, aussi- y ont également contribué. Mais s’il est un paramètre fondamental à son fonctionnement technique, c’est la place du chevalet sur la table. Pour accéder au dossier complet : L’énigme du chevalet fantôme

 
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