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Attila ouvre la saison de La Scala avec Ildar Abdrazakov et Riccardo Chailly

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Milan. Teatro alla Scala. 14-XII-2018. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Attila, drama lirico en un prologue et trois actes sur un livret de Temistocle Solera et Francesco Maria Piave. Mise en scène : David Livermore. Décors : Gio Forma. Costumes : Gianluca Falaschi. Lumières : Antonio Castro. Vidéos : D-Wok. Avec : Ildar Abdrazakov, Attila ; George Petean, Ezio ; Saioa Hernández, Odabella ; Fabio Sartori, Foresto ; Francesco Pittari, Uldino ; Gianluca Buratto, Leone. Core del Teatro alla Scala (chef de choeur : Bruno Casoni). Orchestra del Teatro alla Scala, direction : Riccardo Chailly

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Avec Attila, La Scala et son directeur musical ne parviennent pas à reproduire la réussite de Giovanna d'Arco trois années plus tôt.

220_K61A1669 Saioa Hernandez e Ildar Abdrazakov - copieLors de son arrivée à la tête du Teatro alla Scala, avait soumis le projet d'une intégrale Puccini, dont on verra cette saison Manon Lescaut, et prévenu qu'il remonterait certains ouvrages rares de Verdi. Giovanna d'Arco avec Anna Netrebko et Francesco Meli avait ouvert la saison 2015-16 et démontré le niveau recherché par la plus grande maison d'opéra italienne, qualité globale non retrouvée pour l'ouverture de la saison 2018-19 (toujours en fin d'année en Italie) avec Attila de Verdi.

Le spectacle précédent bénéficiait d'une véritable cohérence puisque l'ouvrage avait été commandé et créé à La Scala. Attila est certes remonté dès l'année de sa création sur les planches milanaises, mais il est composé et créé en 1846 à La Fenice de Venise. La direction propose donc un ouvrage rare dont l'histoire n'est pas totalement scaligère, il lui reste alors à offrir le meilleur musicalement. Or c'est ici qu'apparaît le véritable problème, car si Giovanna d'Arco bénéficiait de Meli et Netrebko, difficile de trouver autant d'attrait chez , déjà Ferrero dans cette salle lors de la dernière reprise en 2011. Il est malgré tout l'artiste le plus marquant du plateau aujourd'hui. Au moins dispose-t-il d'une diction et d'un legato verdiens, en plus de surprendre par une sensibilité qu'il ne possédait pas quelques années plus tôt. Il pousse maintenant moins la voix et contrôle mieux le chant, notamment les piani, sans jamais dénaturer son timbre, il sait aussi être touchant dans sa romance au troisième acte.

Face à lui aurait dû se trouver une soprano du calibre de Sonya Yoncheva, marquante à l'été pour Il Pirata. Mais en plus de présenter les mêmes difficultés que celui d'Abigaïlle pour lequel notre époque a des difficultés à trouver une artiste référente, le rôle d'Odabella est de surcroît trop rarement proposé et donc encore moins recherché par les grandes verdiennes actuelles. s'en sort alors dignement, acide dans le haut du spectre mais énergique et puissante dans tout l'ambitus du médium. Pourtant, ni son timbre ni son style ne justifient sa présence pour une soirée d'ouverture de l'institution verdienne par excellence, au milieu d'une production parmi les plus importantes de la saison dans le monde. offre plus de charisme et un monologue de très belle tenue, bien qu'en basso profondo, on ait connu graves plus impactants. Simone Piazzola devait être Ezio, remplacé quelques jours seulement avant la première par , vaillant dès le premier duo au Prologue et intelligent ensuite dans son air. intéresse dans un Uldino bien identifié dès sa première intervention, quand possède les graves proches de la terre du Pape Leone au moment où le ciel intervient pour empêcher Attila de brûler Rome. Non négligeable comme dans tout ouvrage de Verdi, le chœur bien préparé par Bruno Casoni participe à rendre plus dynamique les scènes dans lesquels il se trouve.

010_K65A7882 Ildar Abdrazakov
avait largement participé au succès du spectacle qui l'intronisait directeur musical de Milan en 2015 ; il ne fédère cette fois pas autant, d'autant que l'Orchestra del Teatro alla Scala que l'on connaît exceptionnel, propose ce soir de désagréables soli au hautbois et au basson, sans non plus trouver toujours toute sa justesse dans certaines grandes phrases des violons. Il doit exister une sensation de fatigue physique de la part du chef milanais, car l'on se surprend même à entendre quelques décalages dans le Finale, au risque de mettre le plateau en difficulté et de ne pas lui permettre toute la vigueur des derniers instants. Heureusement retrouve-t-on tout de même le grand verdien lors des introductions symphoniques de quelques grandes scènes, à l'image de la superbe délicatesse du début de l'acte I pour porter la souffrance d'Odabella.

A la mise en scène, David Livermore fait partie de ces artistes dynamiques par rapport à la vision transalpine, mais souvent peu marquant lorsqu'on met en regard les productions d'Outre-Rhin de ces dernières décennies. L'ouverture de rideau offre donc un premier sujet à discussion à voix haute à un parterre qui s'est cru dans son salon tout au long de l'opéra. Mais en glanant quelques bribes de conversations ici et là, alors que l'on tend l'oreille pour écouter la musique, difficile d'y percevoir quelqu'un pour qui l'image projetée sur l'écran du fond s'apparente à celle des ruines du Berlin d'Allemagne année zéro du film de Roberto Rosselini. Image évidemment placée ici par Livermore pour soumettre l'idée par syllogisme du Rome, ville ouverte réalisé quelques années auparavant. Les costumes de Gianluca Falaschi de la Seconde Guerre mondiale nous préparent bien à une transposition dans les années quarante, avec un décor certes de superbe facture de Gio Forma assisté des vidéos du groupe D-Wok. Elles sont d'un niveau supérieur à celui attendu au minimum dans une telle institution. Des limites se laissent pourtant découvrir dès le deuxième acte, implanté en pleine fresque de Raphaël (La Rencontre entre Léon Ier le Grand et Attila) visible encore de nos jours au Vatican. Les vrais chevaux, noirs, puis blancs, sur lesquels apparaissent respectivement Attila puis Leone, permettent de créer une belle atmosphère. Pourtant, une cohérence globale manque au propos lorsque les derniers actes nous replacent dès la fête romaine dans la dictature de Quarante, par l'intermédiaire de l'idée d'un décorum aux relents pasolinien.

Crédit photographiques © : Brescia/Amisano – Teatro alla Scala

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