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Paris. Théâtre des Champs-Élysées. 4-XII-2018. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : 10 Variations pour violon, violoncelle et piano sur « Ich bin der Schneider Kakadu » de Wenzel Müller en sol majeur op. 121 a ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Trio pour piano et cordes n° 2 en mi mineur op. 67 ; Johannes Brahms (1833-1897) : Trio pour piano et cordes en si majeur op. 8. Trio Wanderer : Vincent Coq, piano ; Jean-Marc Phillips-Varjabédian, violon ; Raphaël Pidoux, violoncelle

triowanderer-copyright_Francois-SechetPour ce récital de gala au Théâtre des Champs-Élysées, le livre une interprétation assez inégale des œuvres de Beethoven, Chostakovitch et Brahms.

Le public était venu nombreux avenue Montaigne, pour répondre à l'invitation du Centre de documentation juive contemporaine qui fêtait son 75e anniversaire (1943-2018), mais également pour assister à cet alléchant récital donné par le célèbre constitué de Vincent Coq au piano, Jean-Marc Phillips-Varjabédian au violon et Raphaël Pidoux au violoncelle. Un trio qu'il est bien inutile de présenter tant sa notoriété, après plus de trente années d'expérience, ne fait aujourd'hui plus de doute, reconnu pour sa somptueuse sonorité et son inaltérable cohésion qui l'inscrivent dans la droite ligne du Beaux-Arts Trio et autres monuments de la tradition chambriste. Et pourtant…

Les Variations « Ich bin der Schneider Kakadu » de Beethoven ouvrent le récital. L'humour de cette œuvre de jeunesse ne saurait faire oublier l'ambition du propos justifiant plusieurs révisions du compositeur avant l'édition de sa forme définitive. Dans un mélange de faux drame et de vraie joie, les parties se succèdent plus souvent qu'elles ne se superposent, nous donnant l'occasion d'apprécier le parfait équilibre entre les voix et les superbes sonorités individuelles, et tout particulièrement celle du violoncelle de Raphaël Pidoux.

Changement radical de climat avec le Trio n° 2 de Chostakovitch, tout imprégné de deuil, d'images de guerre et de déploration, composé en 1944, et dont l'inspiration s'abreuve à plusieurs sources. Le décès de son ami historien d'art et directeur de la Philharmonie de Leningrad, Ivan Sollertinski, à qui le trio est dédié, la mort au combat de son élève juif Benjamin Fleischmann, la découverte du camp d'extermination de Majdanek en Pologne par les troupes soviétiques, sont autant d'éléments qui expliquent, sans doute, que ce trio se structure autour d'un thème juif traditionnel qu'on retrouvera dans le Quatuor à cordes n° 8. Ce trio marque la première référence aux thèmes juifs utilisés à de multiples reprises dans l'œuvre de Chostakovitch, mais au-delà, il constitue indiscutablement un véritable réquisitoire contre le fascisme et une vibrante péroraison sur la mort. Sa création en novembre 1944, contemporaine de celle du Quatuor n° 2 dont le mouvement lent rappelle les « champs de ruines musicaux » n'est sans doute pas fortuite… Malgré quelques dérapages liés sans doute à la complexité de la partition, les Wanderer nous en livrent une lecture bouleversante et équilibrée, au phrasé acéré, volontiers rageur et descriptif (Jean-Marc Phillips-Varjabédian en donne quelques clés de lecture avant son exécution). L'Andante initial s'ouvre sur la lugubre complainte du violoncelle solo, bientôt relayé par une sorte d'oraison funèbre au caractère élégiaque, suivi d'un Scherzo chargé de sarcasme et de menaces, précédant un Largo en forme de passacaille ponctuée par le glas obstiné du piano portant, alors, la douleur à son comble. Avant que le Final envoûtant, obsessionnel et lancinant ne conduise irrémédiablement au néant et à la mort.

Le Trio en si majeur, qui occupe à lui seul toute la seconde partie du concert, est la première œuvre de musique de chambre de Brahms. La première version de cette œuvre terminée en 1891 remonte à 1854 ; c'est dire combien ce trio combine à la fois la vitalité de la jeunesse et le sens de la grande forme lié à la maturité. Un trio d'une particulière richesse dont les Wanderer nous donnent une bien pâle vision, terne et sans allant, où l'émotion fait cruellement défaut. Point d'exaltation dans l'Allegro con brio initial, point de jubilation dans le Scherzo, guère plus de spiritualité dans l'Adagio, ni d'incitation à la danse dans le Finale. Autant dire pas grand-chose, en dehors d'une interprétation quasi mécanique, d'une ennuyeuse fluidité.

En « bis », une Dumky du Trio n°4 de Dvorák, et un Rondo dans le style tzigane de Haydn n'apporteront pas plus d'originalité, puisqu'ils sont joués à chaque concert depuis 31 ans !

Crédit photographique :  Vincent Coq, Jean-Marc Phillips-Varjabédian, Raphaël Pidoux © François Sechet

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