Sur les Vagues de Noé Soulier à Chaillot

Comment rendre tangible le stream of consciousness cher à Virginia Woolf ? Noé Soulier s'y essaie avec brio et exigence dans Les Vagues, avec l'aide de six danseurs et deux percussionnistes.

Pour rendre compte de l'écriture introspective et sensible de la romancière anglaise, le chorégraphe Noé Soulier expérimente le mouvement, crée des matières de corps inédites avec les danseurs. D'où une fascinante impression de complexité, de mouvements quasiment impossibles à reproduire. Certaines séquences, très dynamiques, proches de l'écriture musicale du jazz, conjuguent sauts et déplacements rapides. C'est une écriture nerveuse, sans être tendue. La capoeira semble être une source d'inspiration pour ces duos-duels dans lesquels les danseurs se confrontent, puis dans un tutti final où chacun semble poursuivre sa trajectoire.

On retrouve dans ce spectacle abstrait une énergie proche de ceux de Trisha Brown ou d'Anne Teresa de Keersmaeker, notamment dans ses riches interactions avec les percussionnistes. Le rapport à la musique vivante est en effet fondateur dans la structure chorégraphique du spectacle. Pieds nus, comme les danseurs, les musiciens font partie intégrante du projet et s'y impliquent avec leur corps. Parfois, la pièce fait penser à Whiplash, le film de Damien Chazelle qui met en scène l'affrontement féroce entre un jeune percussionniste et son professeur.

Après Removing, ballet abstrait présenté au Théâtre de la Bastille, puis Performing Art au Centre Pompidou dans une approche nettement plus conceptuelle, Noé Soulier montre avec Les Vagues qu'il est un talent à suivre de près.

Crédits photographiques : © Tanz im August_German Palomeque, Jose Caldeira