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Paris. Théâtre national de Chaillot, Salle Jean Vilar. 25-X-2018. Sadeh21. Chorégraphie : Ohad Naharin. Lumières et scénographie : Avi Yona Bueno (Bambi). Musique : Maxim Waratt. Costumes : Ariel Cohen. Surtitrage vidéo : Raz Friedman. Avec 18 danseurs du Young Ensemble
C'est avec une aisance remarquable que la compagnie junior de la Batsheva Dance Company reprend Sadeh21, pièce maîtresse de l'œuvre d'Ohad Naharin créée en 2011, et clôt avec brio le cycle « Tous Gaga » au Théâtre national de Chaillot.
Sadeh signifie « champ » en hébreu. Champ d'expérimentation ou champ de bataille, on ne sait. Sans doute un peu des deux. Ohad Naharin, dont l'œuvre n'est jamais narrative, ne donne pas de clef de lecture et laisse à chacun le soin de se faire son idée. Mais les notions d'engagement et de combat innervent Sadeh21.
Vingt et un tableaux séquencent la pièce. Sadeh 1 et Sadeh 21 sont une succession de solos où les danseurs et danseuses jaillissent des coulisses et traversent la scène avec des enchaînements de mouvements rapides et acrobatiques. Entre les deux, les ensembles dominent, avec des images frappantes. Les corps qui se tordent, un garçon qui cherche à délivrer un message mais ne parvient à formuler que des sons inarticulés, une fille qui intime un tempo de plus en plus rapide aux cinq danseurs qui suivent ses indications verbales, des corps secoués comme dans la simulation d'un acte sexuel brutal ou d'une salve de mitraillette. La violence est présente et Naharin la fait éprouver aux spectateurs à l'aide des images mais aussi des sons comme ces cris stridents d'une femme que l'on ne voit pas sur scène.
Loin d'être univoque, la violence se mêle à la beauté comme dans le tableau où les danseurs vêtus d'amples jupes marrons tournoient comme des derviches. L'humour n'est jamais loin non plus et l'on sourit à voir deux danseurs cogner les postérieurs de leurs partenaires l'un contre l'autre ou à regarder les danseurs sauter avec grâce dans le vide dans le dernier tableau. Ce mélange des genres est propre au chorégraphe dont il constitue la pâte. L'angoisse d'un monde où la violence et la guerre sont omniprésentes ne conduit pas chez Naharin à un désespoir stérile ; elle est mâtinée par le bonheur et la liberté du corps qui danse, sources d'espoir et de joie aux heures sombres.
Cette pièce, créée par la Batsheva Dance Company, est interprétée ici par le Young Ensemble, sa compagnie junior. La reprise est excellente et l'on ne peut qu'admirer la parfaite appropriation du style gaga par ces jeunes danseurs dont les corps semblent façonnés par cette technique.
Le cycle « Tous Gaga » aura permis de donner un large aperçu du travail d'Ohad Naharin et des danseurs de sa compagnie et de prendre la mesure de l'apport immense du chorégraphe à la danse contemporaine.
Crédits photographiques : © Gadi Dagon
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