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Berlin. Deutsche Oper. 13-V-2018. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Un Ballo in maschera, opéra en trois actes sur un livret d’Antonio Somma. Mise en scène : Götz Friedrich. Décors et costumes : Gottfried Pilz, Isabel Ines Glathar. Chorégraphie : Andria Hall. Avec : Dmytro Popov, Gustavo III, Roi de Suède ; Luca Salsi, Comte Anckarström ; Anja Harteros, Amelia ; Judit Kutasi, Ulrika Arvedson ; Heidi Stober, Oscar, Page ; Dean Murphy, Christian, le marin ; Andrew Harris, Comte Horn ; Derek Welton, Comte Ribbing ; Joshua Sanders, un juge ; Ya-Chung Huang, serviteur. Chor der Deutschen Oper Berlin (chef de chœur : Jeremy Bines). Opernballett der Deutschen Oper Berlin. Orchester der Deutschen Oper Berlin, direction musicale : Benjamin Reiners
Pour les Verdi-Tage de mai, une invité de marque est attendue au Deutsche Oper Berlin, et si Anja Harteros a annulé sa participation au Bal Masqué de l'Opéra de Paris cette saison, la soprano est bien présente pour les reprises du même opéra sur la scène berlinoise dans la production de Götz Friedrich, en même temps qu'elle est toujours prévue pour trois Élisabeth de Valois dans Don Carlo ensuite.Ce n'est qu'une reprise de répertoire pour laquelle il n'y a eu que très peu de répétitions, mais, à une exception près pour Der Rosenkavalier abandonné en même temps que celui de Paris lors de la saison 2015-2016, Anja Harteros lorsqu'elle est programmée à Berlin ne fait jamais défaut. La soprano allemande est donc bien présente cette année pour les Journées Verdi du Deutsche Oper et reprend le rôle d'Amelia d'Un Ballo in Maschera, déjà porté à plusieurs reprises à la Bayerische Staatsoper de Munich.
Dans cette capitale où chaque année passent les plus grands, l'apparition de la star n'est pas un évènement mais seulement le gage d'une prestation de qualité. Elle est donc applaudie à sa juste valeur après ses deux airs et aux saluts, sans aucune surexcitation de la part du public et même avec des bravi moins nourris que la veille pour Meade et Rachvelishvili dans Il Trovatore. Pourtant Ecco l'orrido campo à l'acte II et plus encore Morrò, ma prima in grazia au III montrent la superbe intégrité et l'absence de caractère démonstratif de l'artiste. À l'inverse, l'italien manque de netteté et le chant de souplesse, ne faisant plus preuve d'un contrôle du souffle parfait dans les piani comme chez Meade en Leonora ou Shagimuratova l'avant-veille dans Rigoletto, certes dans le rôle plus léger de Gilda. Habituée aux tempi lents lors de la dernière reprise du rôle à Munich avec Asher Fisch en fosse, la soprano semble ne pas avoir eu le temps de se caler avec le jeune chef Benjamin Reiners à Berlin, car même s'il prend déjà globalement l'ouvrage sans excès de dynamisme, il doit ralentir pour les arias d'Harteros et brider le temps pour elle au début du célèbre trio de l'acte II avant de l'accélérer pour Salsi, et ceci au risque qu'elle ne chante pas tous les mots dans la dernière partie, tout comme dans le quatuor du dernier tableau.
Luca Salsi maîtrise totalement son texte pour livrer un Comte Anckarström (puisque la version de Stockholm a été privilégiée à celle de Boston) impliqué et déjà rutilant pour sa cavatine, mais surtout impressionnant dans la profondeur des sentiments exprimés dans Eri tu che macchiavi au dernier acte. Dmytro Popov présente un Gustavo III intelligemment traité, agile et lyrique dans sa Canzone au II et surtout particulièrement touchant pour sa mort au final. Judit Kutasi, entendue deux jours plus tôt dans Rigoletto trouve un rôle totalement adapté à sa tessiture avec Ulrika Arvedson. On pourra cependant trouver sa voix trop jeune et trop pure pour la sorcière. Oscar revient à une grande habituée du rôle, Heidi Stober, que l'on aimerait entendre programmée dans d'autres ouvrages. Aujourd'hui dans son personnage elle est aussi évidente vocalement que scéniquement, agile dès sa ballade et encore plus souple dans Saper vorreste au dernier acte, en même temps que très identifiable à l'aigu dans le quatuor final. Monterone deux jours avant, Derek Welton donnait la malédiction à Rigoletto et c'est maintenant en Comte Ribbing qu'il lui revient de citer le nom du tiré au sort pour tuer le roi. Comme il le dit lui-même : il ne fait pas bon être baryton-basse chez Verdi. Andrew Harris offre un pendant plus clair au Comte Horn, quand Dean Murphy présente un marin bien projeté et précis sur le texte.
Le chœur aura comme pour les autres opéras de ce cycle manqué de temps pour se montrer marquant, mais se trouve presque toujours en place, sauf pour le bal où les mouvements de danses ajoutés au chant et à la difficulté de voir le chef créent quelques décalages. Benjamin Reiners ne dirigeait que cette dernière, tout juste sorti d'un Ballo au Bolchoi et alors qu'en fosse la veille se trouvait un chef italien spécialiste de Verdi – Giacomo Sagripanti -, on a fait appel ici à ce jeune chef allemand dont la pulsation ne présente clairement pas de tradition latine. Au moins est-il appliqué à toujours maintenir l'ensemble en place et à s'adapter au mieux à son plateau en même temps qu'il préserve toujours les équilibres, même aux cuivres. Il amuse le public au début du deuxième tableau tant les accords introductifs de l'orchestre se font massifs.
Quant à la scène, elle est la même ici depuis 1993, celle de l'ancien directeur des lieux Götz Friedrich. Avant l'ouverture sur le rideau se montre déjà un masque blanc de bal costumé, masque que porteront souvent sur ou avec eux les protagonistes tout au long de l'œuvre : je est un autre, et au jeu de l'amour tout le monde est perdant…
Crédit photographique : © Marcus Lieberenz/bildbuehne.de
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Berlin. Deutsche Oper. 13-V-2018. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Un Ballo in maschera, opéra en trois actes sur un livret d’Antonio Somma. Mise en scène : Götz Friedrich. Décors et costumes : Gottfried Pilz, Isabel Ines Glathar. Chorégraphie : Andria Hall. Avec : Dmytro Popov, Gustavo III, Roi de Suède ; Luca Salsi, Comte Anckarström ; Anja Harteros, Amelia ; Judit Kutasi, Ulrika Arvedson ; Heidi Stober, Oscar, Page ; Dean Murphy, Christian, le marin ; Andrew Harris, Comte Horn ; Derek Welton, Comte Ribbing ; Joshua Sanders, un juge ; Ya-Chung Huang, serviteur. Chor der Deutschen Oper Berlin (chef de chœur : Jeremy Bines). Opernballett der Deutschen Oper Berlin. Orchester der Deutschen Oper Berlin, direction musicale : Benjamin Reiners