Le pianiste Matteo Fossi exalte avec brio le jeune Debussy
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Claude Debussy (1862-1918) : Suite Bergamasque ; Rêverie ; Danse ; Ballade ; Valse romantique ; Mazurka ; Pour le Piano ; D’un cahier d’esquisses ; Masques ; Estampes. Matteo Fossi, piano. 1 CD Hortus. Enregistré au Concert Hall Fazioli de Sacile (Italie). Notice anglais-français. Durée : 82:18
HortusEn cette année 2018 célébrant le centenaire de la mort de Claude Debussy, Matteo Fossi, avec beaucoup d'esprit d'à propos et un brio indiscutable, choisit de s'intéresser aux compositions pour piano solo, parfois peu connues, du jeune Debussy.
Ce dernier opus discographique du pianiste italien nous donne à entendre des œuvres composées entre 1890 et 1903 qui portent en germe toutes les caractéristiques des compositions pianistiques de la maturité. Si le discours manque encore de la liberté souveraine et de la capricieuse imprévisibilité des œuvres plus tardives, ces compositions laissent entrevoir en filigrane le mystère épuré et ombré de mélancolie des œuvres à venir, comme les Études ou les Préludes. La période se situant entre 1890 et 1903 voit le compositeur s'éloigner des compositions vocales qui l'ont occupé jusqu'alors pour retourner aux compositions pour piano solo présentées dans cet enregistrement.
Ce renouveau pianistique observé chez le Debussy trentenaire s'appuie déjà sur des piliers qui perdureront dans son œuvre, comme l'émulation des formes classiques, la suggestion de la nature, le magnétisme de la danse, l'humour, la ciselure de l'écriture et la fascination pour les images. La Suite Bergamasque, avec son Prélude charpenté, son Menuet et son Passepied riches en staccato et en ornementation, trahit une inspiration redevable à la Suite baroque, tandis que Clair de Lune, par sa fluidité et sa poésie, rappelle le goût du compositeur pour les ambiances, les évocations, ainsi que ses liens d'amitié avec Verlaine. La Rêverie délicate et hésitante est contemporaine de l'envoûtante Danse, comme la séduisante et langoureuse Ballade, ou l'humoristique et quelque peu bringuebalante Valse romantique, tandis que la Mazurka, par son titre, rappelle Chopin, auquel Debussy vouait une admiration sans bornes. Pour le Piano renoue, mais de très loin, et dans sa forme uniquement, avec l'inspiration baroquisante, mais souligne surtout l'inclination certaine de Debussy pour le triptyque, qu'il soit instrumental ou orchestral. Les trois œuvres suivantes, les plus tardives (1903 et 1904) regardent vers l'avenir, contemporaines de la rencontre avec Emma. Masques, tourmentée, porte les stigmates des difficultés rencontrées par Debussy dans sa vie sentimentale. Par sa rugosité, son urgence et sa ligne abrupte, mêlant violence et douceur, elle évoque l'expression tragique de l'existence faisant suite à la tentative de suicide de Lilly. D'un cahier d'esquisses, par son écriture symphonique, son balancement, rappelle le premier mouvement de la La Mer dont la composition est contemporaine, alors qu'Estampes (Pagodes, la Soirée dans Grenade, Jardin sous la pluie) est dédiée à Emma, laissant libre cours aux images imaginaires de contrées lointaines rêvées.
Pianiste et chambriste, fort d'une discographie déjà copieuse comportant plus d'une vingtaine d'enregistrements, Matteo Fossi nous livre avec ce quatrième opus pour piano solo (après Brahms, Schumann et Schubert) un disque original par son programme, parfaitement interprété, où le pianiste s'attache à la clarté de la ligne, à la netteté du jeu, tout en préservant la poésie et la structure qui ne sombrent jamais dans une lecture évanescente de mauvais goût. Le piano Fazioli, par sa sonorité, volontiers confidente, participe également à la réussite de ce CD.
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Claude Debussy (1862-1918) : Suite Bergamasque ; Rêverie ; Danse ; Ballade ; Valse romantique ; Mazurka ; Pour le Piano ; D’un cahier d’esquisses ; Masques ; Estampes. Matteo Fossi, piano. 1 CD Hortus. Enregistré au Concert Hall Fazioli de Sacile (Italie). Notice anglais-français. Durée : 82:18
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